28) "La Malédiction de l'Écorce" : Différence entre versions

De Marches du Nord
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(Rencontre avec les Oloden)
m (Les Enfants-Arbres)
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Nil, qui était partie explorer les environs immédiats, revient sur ces entrefaites. Mise au courant de la situation, elle explique qu'il s'agit ''"d'esprits de la forêt"'' et qu'il convient de leur faire une offrande. Tout le monde constate alors que les étranges enfants mêlés de bois sont en réalité cinq ou six, tout autour du bivouac. Ésébilio, que l'horrible grincement a lui-aussi fortement effrayé, s'avance vers eux, bien décidé à faire offrande d'un de ses carnets. Mais les enfants n'ont d'yeux que pour sa lanterne, qu'ils regardent plus fascinés qu'une phalène par le lueur d'une flamme. Inquiet, le moine finit par reculer et se placer sous la protection de Falnen. Les Enfants-Arbres ont l'air assez irrités de la retraite d'Ésébilio et ils s'avancent vers lui, les mains tendues. Ils se remettent alors tous à faire l'horrible grincement et nos héros, horrifiés, en comprennent alors l'origine. Il s'agit du bruit produit par leurs mâchoires qui se déboitent alors qu'elles essaient de s'ouvrir selon un angle bien trop trop grand... <br>
 
Nil, qui était partie explorer les environs immédiats, revient sur ces entrefaites. Mise au courant de la situation, elle explique qu'il s'agit ''"d'esprits de la forêt"'' et qu'il convient de leur faire une offrande. Tout le monde constate alors que les étranges enfants mêlés de bois sont en réalité cinq ou six, tout autour du bivouac. Ésébilio, que l'horrible grincement a lui-aussi fortement effrayé, s'avance vers eux, bien décidé à faire offrande d'un de ses carnets. Mais les enfants n'ont d'yeux que pour sa lanterne, qu'ils regardent plus fascinés qu'une phalène par le lueur d'une flamme. Inquiet, le moine finit par reculer et se placer sous la protection de Falnen. Les Enfants-Arbres ont l'air assez irrités de la retraite d'Ésébilio et ils s'avancent vers lui, les mains tendues. Ils se remettent alors tous à faire l'horrible grincement et nos héros, horrifiés, en comprennent alors l'origine. Il s'agit du bruit produit par leurs mâchoires qui se déboitent alors qu'elles essaient de s'ouvrir selon un angle bien trop trop grand... <br>
Nil, qui s'était avancée un peu plus loin que les autres, est alors attaquée par les Enfants-Arbres. Elle parvient à les repousser, mais ces derniers parviennent tout de même à la griffer. Lorsque Nil revient prêt d'eux, Vera remarque que Falnen a pâlit en envoyant les écorchures dont les bras d'Avant l'Aube sont désormais couverts...  
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Nil, qui s'était avancée un peu plus loin que les autres, est alors attaquée par les Enfants-Arbres. Elle parvient à les repousser, mais ces derniers parviennent tout de même à la griffer. Lorsque Nil revient près d'eux, Vera remarque que Falnen a pâlit en envoyant les écorchures dont les bras d'Avant l'Aube sont désormais couverts...  
  
  

Version du 3 mars 2017 à 23:18

L'expédition nordique qui traversera l'immense forêt boréale et le territoire des nomades Liam'Lon est sur le point de partir: "des marchands-diplomates y vont pour établir de nouveaux accords commerciaux et négocier des traités territoriaux, des cartographes y cherchent un mythique passage vers l'Ouest inconnu, des archéologues vont y ausculter de vieux cailloux, des baroudeurs escorteront tous ceux-là et des guerriers indigènes comptent y mener une quête spirituelle."

PROTAGONISTES :


Le Vaillant équipage de l'Orso :

  • Ertond, marin et charpentier de bord
  • Yanta, marinière et ex-comptable de Ranyella
  • Gregorio, marin un peu simple

Les autres passagers :


Prologue : trois jours à quai

Sur le ponton d’Écume 6, c'est le jour du grand départ. Perché sur le pont de l'Orso, Bartolome Sotorine fait des nœuds, tend des voiles, vérifie des cordages. "Hissez-haut les amis ! Nous allons prendre le large !" Tous les regards se tournent vers lui.
"D'accord capitaine, mais on va où exactement ?" demande Ertond, le charpentier de bord.
"Et puis, il nous manque encore des instruments de navigation pour la cartographie", précise Vera.
"Tu as une idée des distances, dans le Grand Nord ? Il faut qu'on se déplace à cheval !", s'inquiète Falnen.
"Personne ne se déplace à pied, c'est n'importe quoi. Il nous faut des chevaux," ajoute Nil Sholenshen.
Bartolome soupire. Il regarde ce beau ciel, et ce vent puissant qui soufflait vers le large, prêt à porter son navire. "Bon, d'accord. On a encore quelques points à régler. Installons-nous dans la grande maison, nous allons régler les détails".

Ces "détails" prendront trois jours pleins à régler. Trois jours sous les regards noirs des Sotorine du comptoir, impatients de voir les bruyants Talendans dégager de leur ponton. Vera et Ésébilio commencent par expliquer l'étrange concept dirsen de "carte" à Falnen et Nil. Avec leur aide, une première ébauche de carte de la région à explorer est mise au point. Vera et Bart découvrent avec surprise le gigantisme du Grand Nord : clairement, une exploration à pied parait remise en cause. Selon les Liam'Lon, il leur faudrait probablement deux semaines minimum pour rallier la Croisée des Pistes depuis Écume 7. Les deux Emishen plaident longuement pour qu'on prenne des chevaux pour explorer.
"Mais enfin, nous sommes plusieurs à ne pas savoir monter, moi le premier !
- Et bien ce n'est pas grave, tu auras le cul tanné. On ne va pas en faire un drame, non ?
- Pas question. On va explorer en utilisant une méthode qui a fait ses preuves. La méthode Kerdane. On explore depuis la mer en remontant les fleuves."
Pour trancher cette question, Vera se décide à fouiller les archives des Sotorine, et en particulier les fameux carnets de navigation d'Arenzio Sotorine. Elle peut alors identifier plusieurs fleuves que le navire du fameux navigateur Kerdan a déjà remonté, et commencer à préparer un itinéraire crédible, en recoupant les informations des carnets avec les connaissances de terrain des deux Liam'Lon.

Pendant ce temps, Bartolome recherche un octant pour aider l'expédition à se diriger et à cartographier ces nouvelles terres. Diovire a accepté de prêter sa longue-vue à son frérot, mais malheureusement, les Sotorine ne possèdent qu'un seul octant et ils en auront besoin pour le prochain voyage du Coppavento. Adira a bien proposé à Vera "d'emprunter" l'octant de Diovire sans trop lui demander son avis, mais Bart ne semble pas prêt à risquer les foudres de Ranyella et de son frère. C'est alors qu'Esébilio lève timidement le doigt : "Mais vous savez Monsieur Bartolome, je pense que je pourrai en fabriquer un, avec un peu de matériel..." Et effectivement, à la stupéfaction générale, l'ingénieux Brasain fabriquera un octant tout à fait fonctionnel en une paire de jours de travail. De son côté, Adira a réussi à acquérir des canoés Emishen aptes à remonter les fleuves. Après trois jours d'intenses préparatifs, l'expédition serait-elle enfin prête à partir ? Bart en semble en tout cas convaincu, et il remonte sur l'Orso pour haranguer son équipage et ses passagers.

Première ébauche de carte réalisée avant le départ par Vera Sotorine avec l'aide de Nils Sholenshen et Falnen.

"Les amis ! Il est enfin temps de dresser les voiles et de quitter Écume 6 ! Nous sommes restés trois jours ici pour nous préparer, mais je pense que ce n’était pas du temps de perdu. Nous avons pu nous mettre d’accord sur un itinéraire clair et qui je crois nous fera gagner du temps au final. Vera et Ésébilio ont conjugué leurs talents de cartographes aux connaissances de Nil et Falnen pour établir une première carte, encore approximative, des terres que nous allons traverser. On peut voir que les distances sont colossales, ne serait-ce que pour atteindre la Croisée des Pistes. Pas question d’y aller à pied, or beaucoup d’entre-nous sont de piètres cavaliers. Nous allons donc procéder à la Kerdane : en remontant les fleuves le plus en amont possible avec l’Orso, puis en continuant en canoë. Nous pourrons ainsi aisément transporter du matériel et des marchandises, tout en ayant une base arrière à portée. Notre itinéraire sera le suivant.
Tout d’abord, une fois sortis des Baies Jumelles nous irons faire étape au comptoir d’Écume 7. Puis nous remonterons le bras le plus à l’est du Fleuve aux Cinq Bras. Les carnets de navigation de la famille Sotorine indiquent que ce bras de fleuve peut être remonté assez haut, à peu près jusqu’ici (Bart indique sur la carte, dans le cadran tout en bas au milieu, le bras de fleuve le plus à l’est et remonte jusqu’au petit trait bleu horizontal). De là, nous serons à une journée de canoë du Pays des Gens de Pierre que notre ami Ésébilio souhaite tant découvrir. Le reste de l’équipage pourra nous attendre sur l’Orso qui restera à l’ancre quelques jours le temps de l’exploration des lieux... ou quoi que messire Ésébilio désire faire là-bas. Ensuite, retour sur l’Orso, qui redescendra le fleuve vers la Mer d'Écume.
Nous suivrons ensuite la côte est (le doigt de Bartolome remonte le long de la carte) jusqu’à un fjord bien précis (il désigne l’embouchure du fleuve juste au nord de la barrière des Géants). Comme précédemment, nous le remonterons le plus loin possible avec l’Orso et continuerons en canoë jusqu’à la Croisée des Pistes. Chacun pourra y conduire ses affaires et ses négociations diplomatiques, et nous en profiterons pour essayer de négocier un droit de passage pour la suite de notre exploration. Les canoës pourront rapporter vers l’Orso les marchandises que les marchands auront troquées. A ce stade, il faudra que ceux qui ne veulent pas continuer plus au nord fassent un choix, car l’Orso repartira ensuite vers les terres boréales. Ceux qui ne veulent pas nous suivre dans cette dernière aventure, risquée j’en conviens, pourront sans doute négocier un voyage retour vers le sud en accompagnant une des manades Liam’Lon.
Les explorateurs restant retrouveront l’Orso qui reprendra le chemin vers la mer. De là, nous repiquerons plein nord, jusqu’à ce long fleuve, celui-là même qui mène jusqu’à la Mer Intérieure. Nous savons que la Frontosa d’Arenzio Sotorine l’a remonté presque jusqu’au niveau des Monts Décorés (Bart indique le petit trait bleu sur le fleuve). Mais l’Orso a un tirant d’eau bien plus faible que la Frontosa, nous pourrons aller plus loin que lui, jusqu’à la Mer Intérieure, je l’espère ! Et sinon, nous reprendrons nos pirogues. Au-delà de la Mer Intérieure commencent les Landes Pales, et le début de l’inconnu pour nous. Et ce sera une course contre la montre, contre l’hiver et la neige, dont l’arrivée sonnera le moment où il faudra faire demi-tour, avant que l’Orso ne se retrouve prisonnier des glaces...
Ah, j’oubliais : notre Ésébilio est décidément plein de ressources, puisqu’il a confectionné un Octant ! Regardez-moi cette merveille ! Il nous sera fort utile pour cartographier ces terres lointaines. Voilà, des questions ?"

Après avoir écouté les explications de son Tonton préféré, et manifestement ravie de naviguer à nouveau, Islinna demande d'un air gentiment circonspect : "Et comment L'Orso va-t-il les remonter, ces fleuves ? Savez-vous s'ils sont assez larges pour y naviguer à la voile, avez-vous prévu de grands avirons ou des perches pour nous propulser ? Ces fameux canoës sauront-ils remorquer le navire ou comptez-vous sur notre seul âne pour nous haler ? - Et bien, ah ah, excellente remarque, Islinna ! Évidemment, on compte d’abord sur nos voiles. Ensuite, sur des avirons que nous avions évidemment prévus. C’était tellement évident que j’ai oublié de le dire, ah ah ah ! Et Anzio l’a fait, hein. Ses carnets expliquent en détail sa méthode. Bon, elle était assez aventureuse, pour ne pas dire risquée, mais on a les grand principes : alléger le navire au maximum pour diminuer son tirant d'eau, et le hâler. Ce ne sera pas une partie de plaisir, mais c'est possible !” Un grand sourire se dessina sur le visage de Bartolome.

"Mais assez perdu de temps ! Tout le monde à bord !" Une large main prit alors Bartolome par l'épaule. Diovire le regardait d'un air sévère.
"Bon... Tu me ramèneras ma longue-vue, hein ?
- Ça... J'aurais trop peur que tu me poursuives jusqu'aux landes pales pour la récupérer, radin comme tu es !"
Et c'est sur cette émouvante démonstration d'amour fraternel que l'Orso put enfin prendre la mer.

Voyage vers Écume 7

"Hissez-haut ! Levez l'ancre !
- Un instant ! On ne peut pas partir comme ça."
L'espace d'un moment, Bartolome croit vouloir étrangler Nil Sholenshen : pourquoi diable veut-elle encore retarder le départ ? En fait, elle souhaite effectuer un rituel Emishen pour l'Esprit Faucon, l'Esprit des terres qu'ils vont explorer. Bartolome accepte l'idée de bonne grâce et suggère à l'équipage d'y participer, provoquant les récriminations d'Ertond : l'Ondrène est bien trop pieux pour participer à un rite païen. Tandis qu'Ertond boude en récitant le nom des Premiers, les autres écoutent Nil invoquer les Esprits. Mais il se passe un truc bizarre : tous les participants ont soudain l'impression que la Liam'Lon essaie, d'une certaine façon, de prendre une forme d'autorité morale sur l'expédition. Et à ce moment là, un rai de lumière perce entre les nuages, donnant un caractère surnaturel au rituel qui fait douter même Ertond. Mais il en faut plus pour impressionner l'équipage et les passagers de l'Orso. "Bon, il est content le faucon, on peut y aller, maintenant ?", demande un brin sèchement Bartolome. Cela rompt un peu la magie de l'instant et tout le monde se met à son poste. Il n'y a guère que Ésébilio qui reste un peu troublé par ce qui vient de se produire.

Il fait donc grand beau quand l'Orso quitte enfin le ponton d'Écume 6. Beau, mais avec un vent faible et contraire qui fait que le brigantino n'avance guère. Bartolome donne le cap, tandis que le selon la tradition Kerdane, c'est la quartier-maître Vera qui tient la barre. Malgré les efforts de Bartolome qui essaie d'attraper le vent, l'allure reste faible, suscitant les moqueries de Vighnu "Ça allait plus vite quand on voyageait avec Diovire", persifle-t-il. En tout cas, si le pauvre Ésébilio découvre avec Adira les joies du mal de mer, Vighnu et Nil décident de mettre la main à la pâte et de participer au manœuvres. Nil s'en sort bien, mais Vighnu se révèle d'une agilité surprenante dans les haubans. En fin d'après-midi, on arrive enfin au détroit des oubliés, au devant de ses traitres tourbillons. L'Orso s'avance pour le traverser, mais avec un excès de prudence qui ne lui ressemble pas, Vera ne prend pas assez de vitesse et le navire est repoussé par le force du tourbillon. Il faut reprendre une nouvelle trajectoire, et cette fois Vera ne s'y trompe pas : l'Orso prend de la vitesse et passe les deux tourbillons, se laissant porter par le second qui les amène au nord du détroit. Le crépuscule s'annonce, et l'endroit est fort peu propice au mouillage : la côte est entièrement formée de falaises. Mais l'équipage trouve une crique suffisamment peu profonde pour qu'on puisse y jeter l'ancre. Le temps restant calme, l'équipage pourra se reposer - et Ésébilio prendre un remède contre le mal de mer concocté par Vighnu.

Le lendemain, malgré un départ un peu tardif qui lui fait rater la marée, Vera et Bart sont bien décidés à rattraper leur retard. Ce fichu vent est toujours contraire, mais grâce à d'ingénieuses manœuvres l'Orso prend de la vitesse. Il se présente devant le Détroit des Griffes, que Vera passe sans presque ralentir. Devant, Ésébilio s'est muni de la longue-vue et a pris le rôle de vigie. Il annonce au capitaine que cinq ou six petites voiles semblent attendre l'Orso à la sortie du détroit. Il s'agit de petites embarcations Oloden, positionnées en arc de cercle, comme pour bloquer la route de l'Orso. Mais les marins Oloden n'avaient sans doute pas prévu que l'Orso sortirait du détroit à une telle vitesse : paniqués, les Emishens manoeuvre pour se sortir de la trajectoire du brigantino. Bartolome fait légèrement descendre les voiles pour ralentir l'allure, tandis que Vera s'arrange pour éviter toute collision. Malgré les protestations de Nils qui demande à ce qu'on s'arrête, Bartolome refuse absolument : il estime que l'expédition a déjà assez perdu de temps comme ça. Il se contente donc de saluer les Oloden d'un large geste, tandis que ces derniers s'époumonent. On entend à peine leurs "Revenez !" alors que l'Orso file vers Écume 7.

L'allure ne faiblira pas, et c'est en milieu d'après-midi que l'Orso se présentera devant le large chenal qui mène au comptoir.

Rencontre avec les Oloden

Dès l'entrée du chenal, la vigie note la présence de cavaliers sur les hauteurs entourant le chenal. Plus étrange, alors que le navire s'approche du comptoir, Bartolome constate que les guirlandes et les fanions qu'il installe d'habitude pour indiquer le comptoir est ouvert au commerce ont été sortis. Et sur le ponton d’Écume 7, une foule de petites embarcations très semblables à celles qu'ils viennent de croiser sont amarrées... Rapidement, un comité d'accueil Oloden se forme sur le ponton. Un homme fend la foule et se dirige vers le navire. Tout à coup, un grand sourire illumine son visage et il agite la main en direction du pont :
"Islinna ! s'exclame-t-il
- Mil'orind !" répond une Islinna visiblement ravie, en agitant elle-aussi la main.
Vighnu, au contraire, a l'air beaucoup moins ravi devant ces retrouvailles entre sa fiancée et le play-boy des fonds marins Oloden. En tout cas, Mil'orind a l'air concerné par une autre question : il brûle de savoir si Bartolome est bien "le chef des marchands secrets". Un bref dialogue permet d'éclaircir cette histoire : les Olodens ont été informés par une corneille (pas un Esprit-Corneille, une corneille littérale) que des Kerdans viendraient vendre des armes à Écume 7. Or les Oloden ont un besoin pressant d'armes dans la sanglante guerre qui les oppose au Prévôt de la Marche des Lacs, Rhilder le Fou. Ils sont donc venus avec des marchandises pour troquer : quelques poteries, et surtout... des huîtres. Trois grands sacs d'huîtres puant le varech. Sauf que voilà : on ne doit pas vendre d'armes dans la Frontière de l'Orage. Et que deux sentinelles de l'orage accompagnent le groupe...

Tout le monde se retrouve dans la grande maison en bois qui forme le centre du comptoir. Autour d'un repas de fruits de mer, on négocie. Bartolome, poussé par Adira et Vighnu, n'est pas contre vendre une partie de son stock d'armes, surtout quand il apparaît que les Oloden ont accès à des huîtres perlières dont ils seraient disposés à faire commerce. Edianan Gehil, la négociante des Oloden, essaie de convaincre Nil Sholenshen de la justesse de son combat. Les armes négociées ne serviront qu'à faire la guerre contre ce monstre de Rhilder. Nil est prise dans un puissant dilemme moral : elle sait que ce combat est juste, qu'elle devrait le soutenir, et pourtant le Hagad ne permet pas de transiger : on ne peut pas faire entrer la Guerre dans la Zone de Paix. Sous aucun prétexte. Vighnu tente bien une ruse pour contourner cette règle : "Mais on a bien le droit de troquer des armes aux Liam'Lon, non ? Et de les troquer contre des huîtres ? Après, comment les Liam'Lon obtiennent les huîtres, ce n'est pas notre affaire. N'est-ce pas ?" Bartolome approuve, tout en disant qu'il respectera la décision de Nil. Déchirée par ce choix, Nil sort s'isoler, mais Edianan Gehil la suit pour continuer son discours : il faut sauver les enfants des griffes de Rhilder. C'est la seule décision juste, comment le Hagad pourrait-il l'interdire ? Nil réfléchit un long moment, puis rentre pour faire part de sa décision : il n'y aura aucun trafic d'armes dans la zone de paix. Quelques qu'en soient les intermédiaires. Bartolome hausse les épaules, mais Vighnu n'a pas l'air de s'avouer vaincu. Le Fehnri sort en compagnie de Edianan Gehil et les deux conspirateurs s'embarquent sur un canoë afin de discuter loin des oreilles indiscrètes. Pourtant, au bout de quelques minutes, les deux conspirateurs se mettent à pagayer frénétiquement en direction de la rive, et les voilà qui rentrent tous penauds, à pied, portant sur leurs têtes l'encombrant canoë. Vighnu expliquera qu'ils ont vu des formes sombres dans l'eau, et que des pointes oseusses en perçaient la surface. Des pointes d'une bonne taille, rappelant celles des étranges anguilles que Vighnu avait croisé lors de la traque de Soashna, mais en bien plus gros...

Les Enfants-Arbres

Le lendemain matin, alors que Bartolome décroche les guirlandes et les pièges à vent indiquant que le comptoir est ouvert, de nouvelles embarcations Oloden arrivent à Ecume 7. Il s'agit du petit groupe que l'Orso avait croisé la veille en sortant du Détroit des Griffres et ouvertement snobé. Les Oloden n'ont pas l'air très contents et font état à Mil'orind du comportement des Talendans. Mil'orind soupire et dit que Talendans n'ont pas été très sympathiques ici non plus, et l'affaire en reste là. L'Orso peut alors appareiller en direction du Fleuve au Cinq Bras, qu'il entreprend de remonter. Le bras est large et l'Orso peu le remonter à la voile durant un bon moment. Toutefois, le courant finit par se renforcer et les Sotorine décident alors d'appliquer la technique de leur illustre ancêtre. Deux canoës sont mis à l'eau, avec de solides rameurs : les deux Liam'Lon en occupe eux, tandis que l'autre est occupé par Islinna, Vighnu et... Adira. Charge à eux de hâler l'Orso, dont l'équipage surveille la direction et navigue "à la sonde". Un échouage sur un banc de sable est d'ailleurs évité de justesse. Penché sur le bastingage, Ésébilio s'occupe de cartographier plus précisément les nombreux méandres du fleuve. Tout en ramant, Nil Sholenshen remarque un petit groupe de cavaliers qui semblent les suivre à bonne distance. Si Falnen est convaincu qu'il ne peut s'agir que d'autres Liam'lon, Nil est surprise quand les cavaliers ne répondent pas à ses saluts.

Le soir, Bartolome décide d'ancrer le navire au milieu du fleuve, position qui lui semble plus sûre. Nil décide d'aller quand même à terre pour confronter les cavaliers au comportement si... cavalier. Falnen, mais aussi Vera et Ésébilio (qui semblent désireux de se dégourdir les jambes sur le plancher des vaches) l'accompagnent. Restés sur l'Orso, Bart, Ertond et Adira pèchent. Si le Kerdan semble plus faire la sieste que réellement pécher, Adira semble avoir ferré une grosse prise. Sa ligne est tendue, et il n'arrive pas à la remonter. Ertond vient l'aider, mais ça ne suffit pas : ça tire vraiment très fort, apparemment. En grognant un peu, Bart vient prêter main forte : ses efforts ne parviennent qu'à rompre brutalement la ligne. Quoi que ce fut, c'était vraiment gros. "Je vous avais bien dit qu'il y avait de gros poissons par ici !", dit Vighnu.

Pendant ce temps, la nuit tombe rapidement sur la petite expédition descendue à terre. Nil est tellement décidée à retrouver les cavaliers qu'elle finit par se perdre dans la nature. Après plusieurs tentatives d'orientation infructueuses, il faut admettre qu'il est tard et ils n'ont pas la moindre idée d'où ils sont. Le petit groupe décide de monter un bivouac pour attendre l'aube. Falnen est nerveux : il est persuadé qu'on l'observe. Vera monte le bivouac tandis que les deux Emishen surveillent les environs. Elle remarque soudain, comme surgie d'un buisson, une fillette Emishen. Elle semble s'être éveillée brutalement, comme si elle dormait dans ce buisson. Une petite branche est encore attrapée comiquement dans ses cheveux. Puis c'est un petit garçon, tout jeune, qui apparait. Tous deux sont étrangement silencieux et regardent dans le vide. Vera essaie de communiquer avec la fillette, sans succès. Elle remarque que ses cheveux bougent étrangement dans le vent, et que la branche semble arrimée à son crâne bien plus solidement que ses cheveux. Que cette branche semble faire partie intégrante de la fillette. Cette dernière produit tout à coup une sorte d'horrible grincement, un son affreux qui donne la chair de poule à Vera qui en lâche sa torche. Falnen attrape alors Vera par l'épaule et la force à reculer. "Il ne faut surtout pas les toucher !", affirme-t-il dans un souffle. Les deux enfants disparaissent dans l'obscurité.

Nil, qui était partie explorer les environs immédiats, revient sur ces entrefaites. Mise au courant de la situation, elle explique qu'il s'agit "d'esprits de la forêt" et qu'il convient de leur faire une offrande. Tout le monde constate alors que les étranges enfants mêlés de bois sont en réalité cinq ou six, tout autour du bivouac. Ésébilio, que l'horrible grincement a lui-aussi fortement effrayé, s'avance vers eux, bien décidé à faire offrande d'un de ses carnets. Mais les enfants n'ont d'yeux que pour sa lanterne, qu'ils regardent plus fascinés qu'une phalène par le lueur d'une flamme. Inquiet, le moine finit par reculer et se placer sous la protection de Falnen. Les Enfants-Arbres ont l'air assez irrités de la retraite d'Ésébilio et ils s'avancent vers lui, les mains tendues. Ils se remettent alors tous à faire l'horrible grincement et nos héros, horrifiés, en comprennent alors l'origine. Il s'agit du bruit produit par leurs mâchoires qui se déboitent alors qu'elles essaient de s'ouvrir selon un angle bien trop trop grand...
Nil, qui s'était avancée un peu plus loin que les autres, est alors attaquée par les Enfants-Arbres. Elle parvient à les repousser, mais ces derniers parviennent tout de même à la griffer. Lorsque Nil revient près d'eux, Vera remarque que Falnen a pâlit en envoyant les écorchures dont les bras d'Avant l'Aube sont désormais couverts...