Plirune

De Marches du Nord
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Aigri, boiteux, avare et volontiers raciste, "Maître" Plirune est l'un des doyens de Tal Endhil et, de loin, son plus grand propriétaire terrien : une grande partie des fermes en aval du du village lui appartiennent, d'ailleurs l'ancien moulin (brûlé par les Kormes durant le siège de Tal Endhil) était à lui aussi.
Sa fortune ne s'arrête d'ailleurs pas là : il possède encore un tiers de la mine de fer du Camail, des parts dans la Guilde Franche et, après avoir été le seul usurier/banquier de la vallée pendant des décennies, il a aujourd'hui des intérêts dans nombre de commerces locaux : le charpentier Osric, le cordonnier Péorème et même Hartan, le patron de l'Auberge du Cygne, lui doivent tous de l'argent...

De fait, une grande partie du village le déteste, et c'est réciproque : le vieux Plirune tyrannise ses métayers, harcèle ses débiteurs, méprise les Emishen autant que les "étrangers" (en premier lieu les Fehnri et les Hornois), il raconte à qui veut l'entendre la "malédiction d'Hadrien Muraille" et semble même insensible à l'héroïsme du Capitaine Durgaut.
Il est veuf et on ne lui connaît pas vraiment d'héritier, quoique la rumeur prétend qu'il aurait une fille à moitié folle, encore vivante dans quelque hospice lointain.

Le chapelain Daverom est probablement le seul à avoir de la compassion pour le vieillard, sans doute parce qu'il connaît l'origine ancienne de toute cette rancœur : il y a plus de 20 ans, quand la famille de Plirune a été horriblement massacrée par des brigands...


Tout ça remonte à un peu plus de 25 ans, lorsque Daverom n'était encore qu'un missionnaire errant, arrivé depuis quelques étés dans la Région des Lacs. Après qu'il ait maladroitement tenté d'évangéliser les clans alentours, et que quelques "déconvenues" aient failli lui coûté la vie, le chaman elloran Kal Lerken l'avait pris sous sa protection et le jeune prêtre s'était finalement installé à Tal Endhil pour tenter d'y bâtir une chapelle.
L'endroit n'était encore qu'un village de pêcheurs elloran où les Lewyllen et les Liam'Lon venaient commercer avec les Kerdans qui, chaque printemps remontaient le Fleuve des Lacs en Paliers. Les Sotorine avaient en effet établi le comptoir d'Écume 6 depuis déjà quelques décennies pour faire la traite des peaux, de la laine, des plantes médicinales et récolter la guède des marais, dont ils tiraient déjà leur fameux "Bleu des Lacs".

Il n'y avait pas vraiment de garnison, en ce temps-là, encore moins de donjon, et même le pont qui franchit aujourd'hui le fleuve depuis la porte sud n'était encore qu'une passerelle de bois "temporaire", établie par l'armée impériale quelques années auparavant, lors de sa malheureuse tentative pour envahir le territoire des Liam'Lon.
Mais un traité de paix en avait résulté et la frontière avait été fixée au fleuve, aussi quelques patrouilleurs impériaux poussaient parfois jusqu'à Tal Endhil depuis la Mine du Camail, ouverte 6 ou 7 ans auparavant, et rendaient visite aux quelques colons qui avaient commencé à s'installer aux alentours du village lacustre.

Il n'y avait pas non-plus de Kormes à cette époque [1], la guerre semblait très loin, mais une bande de brigands assez importante avait élu domicile dans la vallée : ils étaient peut-être deux douzaines, pour la plupart des repris de justice ayant fuit Darverane ou des déserteurs de l'Armée du Nord, paraît-il menés par un sang-mêlé que les gens du pays appelaient "Vent-Noir".
À l'automne précédent, ils avaient tenté d'attaquer le comptoir kerdan juste avant le départ des navires pour l'hiver, et avaient essuyé de méchantes pertes, aussi les croyait-on débandés et sans doute en fuite...

Plirune et les siens sont arrivés au printemps suivant, lui-même étant semble-t-il issu d'une famille de chandeliers d'Archerune. Il amenait avec lui sa femme, ses 4 enfants -dont la fille aînée, Serelle, était déjà presque adulte- et une dizaine d'ouvriers embauchés à Darverane, Celanire ou Solerane.
Ils avaient des chariots de matériel et de l'argent, apparemment tiré de la vente du commerce familial, et ils avaient acheté beaucoup de terres auprès du sénéchal impérial alors en poste à Solerane (Daverom ne se souvient plus de son nom, mais c'était bien avant Quentos). Les arpents de terrain ne coûtaient presque rien, à l'époque, car l'Empire espérait inciter les colons à s'installer, aussi Plirune s'est-il retrouvé à la tête d'une vaste propriété.

Avec tout son petit monde, il a défriché et déboisé de grands terrains en aval du village, il s'est bâti une grande ferme (actuellement gérée par un métayer) et une bicoque au village, où il importait des outils de fer, de la farine et du vin qu'il vendait à un méchant prix.<br[[>]] Plirune était déjà grippe-sous et ambitieux, il tentait souvent de chasser les Emishen qui traversaient ses terres sans s'en soucier, il prêtait de l'argent à des taux usuraires et personne dans la région ne l'aimaient tellement.
Mais sa fille, Serelle, était une jeune créature fraîche et enjouée, toujours à rire ou à chanter, et le père a fait venir d'autres colons, d'autres fermiers...
Tardil est arrivé la même année. Il avait lui aussi acheté de vastes terres, voisine de celles de Plirune, et après avoir construit une ferme sur la colline de Bedlam, il s'y est lancé dans l'élevage de chevaux : le village n'a plus cessé de se développer...

L'année suivante, Tal Endhil avait déjà changé : le commerce des chevaux avait attiré un jeune apprenti-forgeron, Talbard, arrivé avec le père "Roulier" qui visitait l'endroit pour la première fois, accompagnant des Lewyllen rencontré plus au sud. Mérane n'était pas encore née, évidemment.
Le nouveau pont était en travaux et, pour protéger le village, on construisait la tour carrée qui deviendrait le donjon, une petite garnison impériale s'étant installée aux abords du chantier. Talbard a rencontré Serelle en travaillant au moulin que son père faisait bâtir : ils se sont plu très vite. Tout le monde était d'ailleurs d'avis de les marier, mais Daverom croit se souvenir que le père Plirune faisait des histoires à cause de la dote. Finalement, le mariage a été fixé pour l'automne, parce que la famille de Serelle attendait l'une ou l'autre rentrée d'argent pour financer le banquet.
Ç'allait être une grande fête, on attendait même des invités de Solerane (peut-être bien Jornil "Cuivré", puisque Plirune et lui étaient déjà associés dans la mine de fer)...

C'est la huitaine avant les noces, une nuit d'orage, que les brigands de "Vent-Noir" ont forcé la porte de Plirune : on l'a su par un garçon de ferme qui s'était échappé et avait couru au village prévenir les soldats. Les maraudeurs avaient entendu parler du banquet et voulait rafler tout ce qu'ils pouvaient avant les épousailles. Mais le père avait bien caché son magot, et même après qu'on aie tué ses employés, il refusait de leur dire où...
On a jamais bien su ce qui s'est passé ensuite, mais quand les patrouilleurs et quelques volontaires ont atteint la ferme le lendemain à l'aube, ils ont taillé en pièces la dizaine de brigands qui s'y étaient retranchés. Et puis ils ont trouvé les corps de deux enfants et de l'épouse, affreusement torturés.
Pendu par les poignets aux solives de sa salle à manger, un genou rompu et les dents brisées, Plirune était à peine vivant.
Serelle, la pauvre, avait été violée et brûlée au fer : elle en est restée folle, on l'a envoyée au couvent de Celanire où elle est morte quelques années plus tard en se jetant dans le lac, un autre soir d'orage.
La cadette de la famille, qui n'avait alors que quatre ou cinq ans, est apparemment partie dans le sud des Marches, confiée à une tante (probablement à Archerune, donc), et on ne l'a revue qu'une fois, pour l'enterrement de Serelle. Talbard, lui, a fini par épouser une fille de Celanire.

Plirune est resté seul.
Par la suite, il a embauché d'autres ouvriers, il a relancé ses commerces... mais il n'a jamais trouvé d'autre épouse : tout le village racontait qu'il avait laissé massacrer sa famille pour garder son magot.
Mais un soir qu'il avait beaucoup bu, après qu'un énième mariage arrangé au loin soit tombé à l'eau quand la famille de la promise a entendu cette terrible affaire, Plirune a titubé de l'Auberge du Cygne -nouvellement construite- jusqu'au perron de la chapelle. C'est là que Daverom l'a ramassé en larmes, et l'a ramené dans son presbytère pour la nuit. Entre ses sanglots, Plirune lui a révélé la vérité : il n'y avait pas de magot.
Entre les noces, les impôts qui venaient de tomber, l'argent qu'il prêtait et ses investissements, il ne lui restait alors que quelques lunes, qu'il avait vite donné aux brigands. Mais ceux-ci voulaient un trésor, et quand Plirune a compris qu'ils tueraient tout le monde en ne le trouvant pas, il les a fait lanterné aussi longtemps qu'il a pu, en espérant que les secours arrivent.

Frère Daverom a bien tenté de raconter cette histoire-là, mais peu de gens y ont prêté attention, et encore moins l'ont cru : Plirune n'a jamais rien confirmé, crachant à quiconque lui en parlait que l'argent valait mieux que les gens.
Depuis lors, sa famille à Archerune ne lui parle plus, le village le déteste et lui, l'avare boiteux, le lui fait constamment payer : avec chaque dette qu'il collecte, avec chaque once de fer qu'il vend et chaque sac de farine qu'il mout. Il s'est enfoncé dans son avarice, dans sa haine des Emishen et dans sa rancœur.

  1. le phénomène "Korme" date en fait de l'an 19, soit 5 ou 6 ans plus tard.