Lergoran de Garde-Lunes

De Marches du Nord
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Du haut de ses quinze printemps, Lergoran est le fils de Heredorn de Garde-Lunes, donc le petit cousin de Herle de Lorune, qu'il a rencontré pour la première fois à l'abbaye d'Hellerune où le templier était stationné pendant que l'adolescent y faisait des études d'héraldique et de stratégie.
Le guerrier grisonnant s'est pris d'affection pour le jeune homme esseulé, lui a un peu expliqué la vie, la religion et la bagarre... avant d'être lui-même affecté au régiment prétorien de Bagoran de Marale et de repartir vers la Marche des Lacs.

Lergoran, jeune et naïf, est désormais au service de Féodor de l'Escarpe. Malheureusement pour lui, il n'est ni indispensable, ni franchement malin. Dans une lettre, non codée, et approximativement datée de la Huitaine 6 (elle a été manifestement écrite en plusieurs fois - il y a 4 ou 5 feuillets de format différent, l'encre a parfois pâli ou pris la pluie...), Lergoran révèle nombre d'informations militaires et plutôt confidentielles. Vraisemblablement, le gamin ne se rend absolument pas compte qu'il commet une trahison en informant son grand cousin.



Dans cette lettre, donc, le nobliau explique d'un ton assez ampoulé (voire lyrique) à son "Bien-aimé cousin..." qu'il lui arrive un truc pas possible : il vient d'être "arraché" d'Hellerune par le puissant sire Féodor de l'Escarpe qui se cherchait apparemment un aide de camp un peu lettré, parlant trois mots de venteux, sachant lire (et dessiner) une carte et pas trop inapte à la stratégie. Lergoran est à la fois très honoré de servir un tel commandant, ravi de tout ce qu'il va ainsi pouvoir apprendre et complètement terrifié d'aller, pour la première fois, au combat.

Berinor répondait en effet aux demandes de renforts de plus en plus pressantes de son ami le Prévôt "Rhilder des Lacs", dont la cité est depuis des semaines harcelées par des rebelles mais qui n'avait pas trouvé trop d'écho auprès du Duc-Gouverneur. Le petit Lergoran s'est donc embarqué pour "un laborieux périple" à cheval vers Darverane (vues les routes qu'il a pris et ce qu'il raconte de ses galères, le petit Lergoran doit être un cavalier très médiocre parce que c'est du plat et la route est même en partie pavée) en compagnie de plus de 180 conscrits lisirians ("des Lisières"), 250 fantassins de Berinor (lanciers et archers), le bataillon de cavalerie lourde commandé par Féodor lui-même (100 cavaliers et 20 chars de guerre), des 300 "affreux soudards" du Bouquetin (un capitaine mercenaire d'Anguedale, premier capitaine du général Arund-le-Taureau, ses gars sont pas pire que tes camarades mais ça doit effectivement dépaysé Lergoran) et d'un groupe d'une vingtaine de Hotars (des mercenaires hornois qui servent comme éclaireur et ont beaucoup impressionné le jeune homme). Ça c'est du renfort ! L'armée (parce que là on totalise donc déjà pas loin de 800 hommes) a donc rejoint "la Cité des Lacs" (Darverane), qui d'après Lergoran est une des citadelle les mieux fortifiées de toutes les Marches et y a intégré les troupes locales : 450 mercenaires "encore plus rustres et païens" dont un bon tiers de cavaliers légers, 2 compagnies de conscrits (donc 200 hommes) et les trois compagnies de lanciers déjà arrivés de Corelghil, Melenire et Bragone (compte 3-400 gars). Le seigneur Rhilder leur a également confié 2 cogues (de lourds navires de transports) équipées de balistes qu'il a fait spécialement construire pour sécuriser le fleuve, garnie chacune de 30 archers et d'autant de mariniers. Il y a eu pas mal de remous à Darverane car Rhilder refusait de céder le commandement à Féodor, il a fallu que Berinor envoie un émissaire depuis Salviane et ça leur a fait perdre 4 jours.

Maintenant forte de plus de 1800 hommes, l'armée a commencé sa progression vers le nord. Il y a environs 20 jours, l'avant-garde composées des Hotars, de la cavalerie légère et d'une compagnie de lanciers, a été rapidement accrochée par des éclaireurs Kormes qui, contrairement à la légende, ont rapidement fuit sous le nombre. Sur l'insistance des mercenaires et de ses chevaliers, Féodor de l'Escarpe a envoyé un régiment les poursuivre et ils sont bien sûr tombés dans un piège : 4 fois plus de Kormes les attendaient en forêt et ont commencé à leur tailler des croupières jusqu'à ce que la cavalerie lourde et les fantassins envoyés à leur suite ne viennent les dégager (car Féodor n'est pas si con et avait envisagé le danger, on sent à sa lettre que Lergoran est un grand fan). La bataille a été assez saignante de part et d'autre, les Kormes se battant avec une fureur inouïe qui a coûté au moins 350 hommes aux impériaux, dont beaucoup de cavaliers gênés par les arbres. Le lendemain, les corps de tous les Kormes avaient disparu : avec les légendes qui courent sur l'immortalité des guerriers kormes, ça a jeté un sacré froid.

C'est en fin d'après midi que l'avant-garde déjà en partie diminuée a eu son premier affrontement avec des Oloden : ceux-ci ont commencé par provoquer les cavaliers mercenaires en duel, ce qui a bien failli les faire tous tuer dans la première demi-heure, mais d'autres venteux sont venus leur prêter main-forte et ça a tourné en une bataille désordonnée, les impériaux étant complètement pris au dépourvu par la stratégie adverse. Celle-ci consistait essentiellement à harceler les flancs des régiments pour s'éloigner et revenir, quoique parfois les Oloden chargeaient carrément dans le tas, ce qui obligeait les troupes remanes à courir sans cesse pour reformer les rangs, se couvrir sur un flanc puis l'autre dans la crainte que la prochaine attaque soit vraiment puissante... Les combats ont duré un jour et demi avant que les venteux n'abandonnent la partie devant l'afflux permanent de renforts envoyés par Féodor et les archers et lanciers qui commençaient à les contourner efficacement grâce aux navires.

Alors réduit à un gros millier, les troupes de Féodor ont néanmoins été rapidement rejointes par 400 conscrits gemmois ("de la Marche des Gemmes") de plus, qui auraient du être à Darverane mais avait pris un gros retard. La marche au nord a alors repris à un rythme cette fois volontairement lent : l'armée n'avançait qu'à une cadence qui lui permettent de se mettre à tout moment en formation défensive autour de ses archers, et chaque soir les fantassins s'exerçaient pendant une ou deux heures à repousser des charges de cavalerie légères avec les longs épieux de bois fabriqués dans la journée. Lergoran note que l'épieu est une arme "jetable" : uniquement composés de bois effilé et durcis au feu, l'armée se moque bien d'en briser des dizaines à l'exercice, chaque conscrit devant en tailler au moins deux par jour. Lors des bivouacs, les centaines d'épieux ainsi accumulés sont installés en une haie circulaire où l'armée se niche pour passer la nuit.

Il y a environ 10 jours, les éclaireurs ont signalé des troupes emishen de plus en plus nombreuses et bigarrées (il semblait y avoir un peu de tous les camps) provoquant sans cesse l'avant-garde depuis les sommets des collines ou abattant à l'arc les fourrageurs et les imprudents isolés. Féodor a alors ordonné une halte pour construire un vrai camp retranché en plaine et y attendre l'ennemi : "situé sur une petite butte où plusieurs centaines d'hommes sont vite en train de défricher un grand arc de cercle, collé à la rive, entouré d'un fossé encore incomplet de presque 2m de large pour 1,5m de profondeur dont le remblais est progressivement entassé en talus, avant d'être hérissés de pieux taillés à partir de tous les arbustes des environs, il abrite une forêt de piquets de tentes encore dénuées de toile. Entre le périmètre de construction, défendu par la cavalerie (de l'armée régulière) et l'infanterie lourde (mercenaire), de petits groupes entassent les broussailles fraîchement arrachées au sol sur des tas de bois sec pour former des meules de branchages qu'il suffira d'enflammer plus tard pour assurer un éclairage durable sur tout le glacis entourant le camp, qui se montent à une vitesse impressionnante" Les travaux n'étaient pas encore terminés qu'un émissaire emishen (Nevel Sholdanan) est arrivé au camp en expliquant qu'il bossait pour "le fameux Capitaine Durgaut, celui dont on dit qu'il a repoussé plus de 500 kormes avec seulement trois patrouilles de vétérans" (Lergoran voudrait bien que son cousin lui dise s'il est vrai que Durgaut est un fils naturel de l'Empereur et qu'il porte un heaume rehaussé de pointes barbelées comme les élus d'Herem car, s'il trouve l'histoire élégante, il doute un peu de sa véracité). Quand l'éclaireur indigène a commencé à décrire des troupes 3 fois plus nombreuses que prévues côté emishen, le sage Féodor a ordonné à 3 Hotars de l'accompagner lui, Lergoran de Lorune, parlementer avec l'ennemi et en apprendre plus sur ses forces exactes. Ton jeune cousin est encore plus grisé, honoré, curieux et inquiet que lorsqu'il a été choisi comme aide de camp, mais toi qui t'y connais tu peux en déduire que Féodor n'a pas hésité à "sacrifier" ainsi un gamin dont l'utilité sur le champ de bataille était très limitée (quand l'escorte est plus efficace que l'ambassadeur, c'est qu'on se fout un peu des négociations).

La lettre se termine sur un récit assez lamentable des rudesses de la vie sauvage et guerrière qui est désormais la sienne (24h à cheval dans une région vallonnée, où il s'arrête quand-même pour écrire) et du comportement de Nevel, "orgueilleux et querelleur comme souvent les races sauvages dont l'âme n'est agitée que par le vent" (que l'on peut traduire par "l'éclaireur gueule parce que le p'tit corniaud ralenti tout le monde").