6) "La Mine" : Différence entre versions

De Marches du Nord
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(épilogue : "Ah ben ils ont bonne mine...")
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= épilogue : "Ah ben ils ont bonne mine..." =
 
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Le matin s'est déjà levé sur la Vallée des Lacs en Palier lorsque, après réception du message, discussions variées, tentatives de lever plus de troupes et empaquetage rapide, une cohorte de 10 cavaliers (Templiers et éclaireurs lewyllen) et presque 30 fantassins (templiers, mercenaires, volontaires et... encore quelques éclaireurs lewyllen) franchit le pont au sud de Tal Endhil et prend la route vers la mine d'argent. Pour gagner en vitesse, les bardas sont réduits à un peu de nourriture et l'équipement de guerre, car nul n'ignore monter à l'assaut de la mine pour en briser le siège.
 
Le matin s'est déjà levé sur la Vallée des Lacs en Palier lorsque, après réception du message, discussions variées, tentatives de lever plus de troupes et empaquetage rapide, une cohorte de 10 cavaliers (Templiers et éclaireurs lewyllen) et presque 30 fantassins (templiers, mercenaires, volontaires et... encore quelques éclaireurs lewyllen) franchit le pont au sud de Tal Endhil et prend la route vers la mine d'argent. Pour gagner en vitesse, les bardas sont réduits à un peu de nourriture et l'équipement de guerre, car nul n'ignore monter à l'assaut de la mine pour en briser le siège.
Le Capitaine Liméric Durgaut conduit la colonne avec le maquignon venteux Lel'Liamil, le sergent Le Cornu trotte à leur droite et le jeune Eldan "le Moineau"*, récemment promu "estafette", à leur gauche. Immédiatement derrière eux, le chirurgien-barbier Brumond et Frère Daverom ont emprunté un âne pour les accompagner, jugeant qu'on aurait besoin de leurs soins.
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Le Capitaine Liméric Durgaut conduit la colonne avec le maquignon venteux Lel'Liamil, le sergent Le Cornu trotte à leur droite et le jeune Eldan "le Moineau", récemment promu "estafette", à leur gauche. Immédiatement derrière eux, le chirurgien-barbier Brumond et Frère Daverom ont emprunté un âne pour les accompagner, jugeant qu'on aurait besoin de leurs soins.
 
Quoiqu'il fasse de plus en plus doux dans la vallée depuis quelques semaines, au point que les pâturage se sont récemment couvert de fleurs jaunes et rouges à la grande joie des Emishen qui en font quasiment une fête, un vent à décorner les bœufs souffle depuis la veille et secoue constamment les sapins où les éclaireurs cavalent autour de la colonne : puisque une troupe de Kormes est dans le secteur, il n'est pas question de se laisser surprendre...
 
Quoiqu'il fasse de plus en plus doux dans la vallée depuis quelques semaines, au point que les pâturage se sont récemment couvert de fleurs jaunes et rouges à la grande joie des Emishen qui en font quasiment une fête, un vent à décorner les bœufs souffle depuis la veille et secoue constamment les sapins où les éclaireurs cavalent autour de la colonne : puisque une troupe de Kormes est dans le secteur, il n'est pas question de se laisser surprendre...
  
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Et il fait donc déjà nuit noire lorsque, à la lueur d'une torche, un éclaireur découvre deux corps sur la rive enneigée du torrent que longeait la troupe depuis une demi-heure, faute de pouvoir distinguer un chemin :
 
Et il fait donc déjà nuit noire lorsque, à la lueur d'une torche, un éclaireur découvre deux corps sur la rive enneigée du torrent que longeait la troupe depuis une demi-heure, faute de pouvoir distinguer un chemin :
 
Si le mercenaire Six-Pièces est encore en vie, quoique inconscient, à moitié noyé, gelé, une jambe brisée et une épaule démise par sa chute dans le ruisseau les mains liées dans le dos, Jarell Sacrement, amputé de deux doigts et démoli comme s'il avait été passé au pilon, n'est reconnu que par sa tenue et sa chainette de chevalier du temple. Il faut encore plusieurs minutes aux hommes de Durgaut pour confirmer que, malgré les apparences, le large pierrier couvert de neige où la colonne s'est arrêtée est en réalité le site de la mine.  
 
Si le mercenaire Six-Pièces est encore en vie, quoique inconscient, à moitié noyé, gelé, une jambe brisée et une épaule démise par sa chute dans le ruisseau les mains liées dans le dos, Jarell Sacrement, amputé de deux doigts et démoli comme s'il avait été passé au pilon, n'est reconnu que par sa tenue et sa chainette de chevalier du temple. Il faut encore plusieurs minutes aux hommes de Durgaut pour confirmer que, malgré les apparences, le large pierrier couvert de neige où la colonne s'est arrêtée est en réalité le site de la mine.  
« Mais... vous êtes sûrs ?  
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« Mais... vous êtes sûrs ?  
_On a trouvé des débris de l'enceinte et les briques d'un haut-fourneau, mon 'Pitaine. On est encore en train de dégager des cadavres de partout mais on manque de torches.  
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_On a trouvé des débris de l'enceinte et les briques d'un haut-fourneau, mon 'Pitaine. On est encore en train de dégager des cadavres de partout mais on manque de torches.  
_Il a du y avoir un glisement de terrain, Messire, explique Daverom : on dirait bien que tout un pan de la falaise s'est effondré d'un coup sur le fortin il y a moins de 24H...  
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_Il a du y avoir un glisement de terrain, Messire, explique Daverom : on dirait bien que tout un pan de la falaise s'est effondré d'un coup sur le fortin il y a moins de 24H...  
_Par les pères.  
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_Par les pères.  
_Un campement, on a trouvé un campement à 200m au sud de l'éboulement !  
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_Un campement, on a trouvé un campement à 200m au sud de l'éboulement !  
_Nos gars s'en sont sortis ?  
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_Nos gars s'en sont sortis ?  
_Heu.. non, mon Capitaine : on pense que c'était un campement korme mais il a été abandonné.
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_Heu.. non, mon Capitaine : on pense que c'était un campement korme mais il a été abandonné.
 
  _Bordel !  
 
  _Bordel !  
_Mon Capitaine, on y a trouvé Cylien Brûlé, Bouc et le chevalier Conrad de Mélanque, ils étaient... haem... suspendus à des branches basses et... écorchés. Et décapités. Mais on croit bien que c'est eux...»
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_Mon Capitaine, on y a trouvé Cylien Brûlé, Bouc et le chevalier Conrad de Mélanque, ils étaient... haem... suspendus à des branches basses et... écorchés. Et décapités. Mais on croit bien que c'est eux...»
  
 
Dans les heures qui suivent, les éclaireurs commencent à retrouver quelques chevaux inquiets mais vivants, les débris de la roulotte d'Adira-au-Géant (sur laquelle Totor pleure à grosses larmes) et d'un chariot lewyllen, les vestiges d'un fortin récent (sa charpente fraîchement découpés n'avait même pas eu le temps de prendre l'humidité), des carcasses d'autres chevaux, les corps massacrés d'au moins une dizaine de Kormes et presque autant de membres de l'expédition : des mineurs, deux lewyllen que seuls leurs insignes tribaux permettent d'identifier (dont un guerrier en armure d'écailles que Lel'Liamil ne parvient pas à reconnaître, quoiqu'il soit sans doute comme lui de l'Aile du Silond), le métis fehnri que les mercenaires surnommait "le Noiraud", trois templiers dont les blessures avaient été pansées peu avant qu'ils ne meurent ensevelis...
 
Dans les heures qui suivent, les éclaireurs commencent à retrouver quelques chevaux inquiets mais vivants, les débris de la roulotte d'Adira-au-Géant (sur laquelle Totor pleure à grosses larmes) et d'un chariot lewyllen, les vestiges d'un fortin récent (sa charpente fraîchement découpés n'avait même pas eu le temps de prendre l'humidité), des carcasses d'autres chevaux, les corps massacrés d'au moins une dizaine de Kormes et presque autant de membres de l'expédition : des mineurs, deux lewyllen que seuls leurs insignes tribaux permettent d'identifier (dont un guerrier en armure d'écailles que Lel'Liamil ne parvient pas à reconnaître, quoiqu'il soit sans doute comme lui de l'Aile du Silond), le métis fehnri que les mercenaires surnommait "le Noiraud", trois templiers dont les blessures avaient été pansées peu avant qu'ils ne meurent ensevelis...
  
 
Le Capitaine fait dresser le camp à courte distance en aval et, lorsque Six-Pièces reprend brièvement conscience, il parvient à expliquer par bribe que Mérane, les Muraille et plusieurs autres s'étaient retranché dans la mine lorsque la falaise s'est écroulée en emportant le campement fortifié avec elle : ainsi protégés dans la galerie, il est possible qu'ils aient survécu à l'avalanche. "Loué soit Herem" ajoute-t-il avant de s'évanouir à nouveau, à la grande surprise des autres mercenaires qui ne lui connaissaient guère de piété.
 
Le Capitaine fait dresser le camp à courte distance en aval et, lorsque Six-Pièces reprend brièvement conscience, il parvient à expliquer par bribe que Mérane, les Muraille et plusieurs autres s'étaient retranché dans la mine lorsque la falaise s'est écroulée en emportant le campement fortifié avec elle : ainsi protégés dans la galerie, il est possible qu'ils aient survécu à l'avalanche. "Loué soit Herem" ajoute-t-il avant de s'évanouir à nouveau, à la grande surprise des autres mercenaires qui ne lui connaissaient guère de piété.
À la lueur des flambeaux improvisés de pin et de résine, les recherches continuent toute la nuit jusqu'à ce que, peu avant l'aube, un Totor déchaîné attire l'attention de la troupe en déblayant frénétiquement à ras de la falaise, ouvrant peu à peu un puits instable dans l'épaisse couche de rocs et d'éclats de pierres qui remplit désormais la combe où devait se trouver le camp de mineurs.
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À la lueur des flambeaux improvisés de pin et de résine, les recherches continuent toute la nuit jusqu'à ce que, peu avant l'aube, un Totor déchaîné attire l'attention de la troupe en déblayant frénétiquement à ras de la falaise, ouvrant peu à peu un puits instable dans l'épaisse couche de rocs et d'éclats de pierres qui remplit désormais la combe où devait se trouver le camp de mineurs.
Et bientôt, une voix éraillée mais reconnaissable sort de ce fameux trou : « Brave Totor ! Continue ! Ça c'est le bon géant à son papa ! » Autour du géant, tout le monde fait (prudemment) la chaîne pour évacuer les rochers que le grand singe dégage derrière lui sans regarder, puis il plonge soudain son bras au fond du trou et, aux cris de « Mais aaaaarg ! Aïe arrête gros couillon, c'est pas assez large, aïe merde ! », déterre soudain un Adira couvert de poussière, de suie, de coupures sanglantes et aveuglé par le pâle éclat du petit matin.
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Et bientôt, une voix éraillée mais reconnaissable sort de ce fameux trou : « Brave Totor ! Continue ! Ça c'est le bon géant à son papa ! » Autour du géant, tout le monde fait (prudemment) la chaîne pour évacuer les rochers que le grand singe dégage derrière lui sans regarder, puis il plonge soudain son bras au fond du trou et, aux cris de « Mais aaaaarg ! Aïe arrête gros couillon, c'est pas assez large, aïe merde ! », déterre soudain un Adira couvert de poussière, de suie, de coupures sanglantes et aveuglé par le pâle éclat du petit matin.
 
Un à un, les fils Muraille et leur architecte de patriarche s'extirpent à leur tour par l'ouverture agrandie, bientôt suivis par Andréas qui aide Mérane, deux lewyllen dont l'éclaireur Sifenen Arlan ("Ombre d'un Oiseau") à qui Lel'Liamil avait confié la responsabilité de ses "palefreniers", un templier hâve et le bras en écharpe, deux autres plus ou moins éprouvés et blessés et, en tout, seulement 6 des 15 mineurs qui ont quitté Tal Endhil avec l'expédition, six jours auparavant.
 
Un à un, les fils Muraille et leur architecte de patriarche s'extirpent à leur tour par l'ouverture agrandie, bientôt suivis par Andréas qui aide Mérane, deux lewyllen dont l'éclaireur Sifenen Arlan ("Ombre d'un Oiseau") à qui Lel'Liamil avait confié la responsabilité de ses "palefreniers", un templier hâve et le bras en écharpe, deux autres plus ou moins éprouvés et blessés et, en tout, seulement 6 des 15 mineurs qui ont quitté Tal Endhil avec l'expédition, six jours auparavant.
Et à la consternation des sauveteurs, plusieurs des rescapés tombent à genoux autour d'Adira Pratesh et entonnent avec lui un chant religieux...
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Et à la consternation des sauveteurs, plusieurs des rescapés tombent à genoux autour d'Adira Pratesh et entonnent avec lui un chant religieux...

Version du 6 octobre 2013 à 18:34

La Mine :

Terrain minier 3.jpeg

A = Ateliers (n'en reste quasiment que les fondations) B = probablement une sorte de cuisine ou de boulangerie E = Entrepôt (quelques outils, paniers et amphores sévèrement brûlés) F = forge, seule la cheminée du haut-fourneau tient encore debout h = habitations des mineurs H = sans doute une maison commune H 1 = logement individuel, sans doute du contremaître M = entrée de la mine, autrefois couverte P = Poste de garde, doté d'un étage (pas trop abîmé) Le sentier vers l'est conduit au site d'abattage, la "route" vers le sud est celle par laquelle les PJ sont arrivés (elle rejoint Tal Endhil, au nord-ouest, après avoir en contourné les crêtes.

Première séance

Cinquième jour : la mine, une ruine

Il est plus de midi quand l'expédition s'éveille pour constater le charnier où elle s'est installée : l'endroit est encore jonché de corps congelés et à moitiés dévorés par les charognards, les ruines noircies de l'exploitation plus facile à abattre qu'à réparer et seuls la cheminée du haut-fourneau et la palissade tient encore à peu près debout. À cette altitude (~2500m), le vent glacial souffle continuellement entre les rares sapins (il fait environ -5°c, même dans l'après-midi, quand le soleil a doublé les crêtes et éclaire ce versant de la montagne) et le spectacle est loin de rendre son enthousiasme à l'expédition.


Au même moment, à Tal Endhil, le Capitaine Durgaut commence à trouver qu'après quatre jours sans nouvelles de la mine, il est temps de prendre des mesures : il sélectionne parmi les templiers le chevalier Jarell Sacrement et 9 éclaireurs/archers/cavaliers dégourdis pour les envoyer en quête du convoi avec quelques pigeons.

Pendant qu'à la mine on rassemble et on enterre les corps, les Muraille, les ouvriers et Totor se mettent à l’œuvre : renforcer l'enceinte, dégager les décombres, monter un campement digne de ce nom, transformer la cheminée en tour de guet et tirer des cordeaux pour une solide reconstruction. Examinant l'entrée éboulée de la galerie, Virgile de Narcejane et Hadrien Muraille concluent comme leurs compagnons avant eux que plus qu'éboulée, la mine a bien été bouchée avec acharnement (quoiqu'un manque de technique évident)... et même récemment rebouchée : en effet, certains des rocs que les trois éclaireurs avaient trouvé à quelques pas de l'éboulis lors de le leur première reconnaissance ont depuis été ajoutés au pierrier. Et parce que l'architecte commence à se demander tout haut pourquoi les Kormes se donneraient tant de peine pour fermer la mine, Andréas et Rohanan décident de le prendre à part pour lui expliquer ce qu'ils ont appris lors de leur première visite (sans lui révéler néanmoins les capacités particulières d'Andréas)... et comme Adira Pratesh réalise qu'on complote sans lui, il s'incruste dans la conversation (ça fera un rappel pour nos lecteurs) :

après la bataille de Tal Endhil, les Kormes se sont repliés sur la mine, qu'ils avaient attaquée (massacrant les mineurs) et incendiée quelques jours auparavant, amenant avec eux un gros machin très lourd qu'ils ont eu un mal de chien à introduire dans les galeries. Avec l'aide d'une espèce de sorcier inconnu, cet objet semble leur avoir permis de ressusciter plusieurs de leurs chefs jusqu'à ce que, le sorcier étant reparti une fois les opérations de résurrection en train, quelque chose parte salement en vrille à l'intérieur de la mine, que les Kormes ont évacué en désordre avant de l'ébouler, abandonnant l'artefact et sans doute plusieurs des leurs à l'intérieur.

Les PJ commencent à discuter de la nature du mystérieux accident qui a déclenché une telle panique chez des guerriers fanatiques, de ce qu'il conviendrait de faire de l'artefact s'ils le déterrent et de ce qu'ils risquent de trouver dans les galeries et finissent tous par s'accorder sur le fait que, s'il est vraiment aussi dangereux que ça, mieux vaudrait le détruire. Ils envisagent brièvement d'avertir les templiers (qui sans doute savent s'occuper de ce genre de choses) mais comme il faudrait alors leur expliquer des histoires de sorciers et de magie, craignent que ça finisse en bûcher et décident qu'il sera toujours temps de leur dire ("...ou pas ?") lorsque la mine sera rouverte. Entre deux tentatives plus ou moins heureuses pour séduire Mérane, la négociante (et membre de la Guilde) officiellement en charge de l'expédition, Rohanan tente une petite reconnaissance qui confirme que seuls quelques loups les surveillent à distance (ça risque de compliquer le bûcheronnage, quoiqu'il restait assez de troncs équarris à la mine pour les premiers travaux). Andréas vérifie par magie et confirme : il n'y a apparemment pas un ennemi à plusieurs km à la ronde. « Vous croyez qu'ils se sont lassés, qu'ils ont laissés tombés parce qu'on a atteint la mine ? _Notez que s'ils reviennent, on a maintenant une solide position fortifiée ! [en effet, les travaux des Muraille ont remonté l'enceinte à un confortable bonus défensif de +5, quoiqu'ils commencent à manquer de combattants pour en profiter] _'Sont p't-être redescendus chasser, vu qu'ils crevaient la dalle depuis qu'ils étaient à nos trousses : même pour les loups, y a pas grand-chose à bouffer dans le secteur. _Ou alors ils ont été chercher du renfort... » Et là, nos héros réalisent qu'ils ne sont pas, eux, tellement en position de faire de même : personne n'a penser à embarquer de pigeon au départ de Tal Endhil, un messager risquerait surtout d'être intercepté et massacré en chemin... Horen Rohanan s'adresse néanmoins à ses camarades Lewyllen pour envoyer un corbeau à la caravane la plus proche, au Cercle des Cascades, où l'oncle Ethelkaran est venu participé à l'Assemblée Tribale. Les Lewyllen, tribu de la Corneille ont fréquemment le pouvoir de communiquer avec les corvidés. Sauf que, comme Rohanan va se le faire expliquer, si son peuple préfère les corneilles aux corbeaux c'est que c'est derniers sont généralement malhonnêtes et que dès lors que Rohanan a "payé d'avance" en nourrissant le corbac avant qu'il ait rendu service, rien ne dit qu'il ira effectivement porter le message...

S'isolant dans une tente, Andréas prépare un des sorts de détection dont il a le secret et s'enfonce mentalement dans la mine à la recherche du fameux "trésor" mentionné par Langard. [Le sort n'est pas très difficile mais les joueurs ayant assez poissards depuis le début, Humphrey a boosté de son mieux et obtenu une grosse MR de 8 qui lui rapporte autant d'informations. Ce qui va être fun, c'est que la spécialité d'Andréas étant la "Transposition", son exploration mentale de la mine va être vécue "comme s'il y était"... et il va vite le regretter.] Il a cette fois une bien meilleure sensation de la "pulsation" déjà détectée lors de leur reconnaissance de l'avant veille : c'est une sorte de battement lent, presque une respiration émise par la veine d'argent elle-même et qui se diffuse à travers les galeries, jusqu'à un gros objet magique branché sur la veine qui, lui, se met à vibrer dès que l'attention d'Andréas se focalise dessus (il réagit à la magie). C'est une sorte de grand sarcophage en pierre veinée de ce fameux or-rouge que les rares archéologues associent avec la technologie "antique" : ostensiblement magique, ouvragé, il semble diffuser une sorte de chaleur à travers les galeries. C'est en portant cette fois son attention sur les-dites galeries qu'Andréas s'aperçoit d'une atmosphère "morbide", des choses à moitié endormies qui s'éveillent en sa présence, semble d'abord produire des « bruits » de mastication et des "grincements de dents"... avant que d'innombrables mâchoires se jettent sur le mage pour le dévorer ! Andréas hurle et rompt le sort immédiatement mais l'attaque de ces "choses" l'a profondément secoué et il tremble comme une feuille à la pensée de l'horreur affamée qui s'est maintenant éveillée à quelques pas du campement... [Le pauvre mage, qui n'avait absolument pas pensé à se "protéger" psychiquement, vient d'encaisser 3 pions de Trauma, des dommages psychologiques associés à une Réaction temporaire de "Terreur" dont il ne pourra se libérer que progressivement en exprimant sa peur (ou en l'affrontant, en consultant un psy, en étant efficacement rassuré... mais ces options là ne seront guère disponibles avant la fin du scénario.]

Lorsque Rohanan s'inquiète de son collègue, il trouve Andréas en plein délire apocalyptique : il ne faut plus du tout ouvrir la mine sinon une monstruosité sans nom va en sortir pour tous les bouffer ! L'éclaireur qui a promis son aide à Mérane pour mener à bien la réouverture de la mine est de fait assez emmerdé et tente de rassurer le chroniqueur en lui rappelant que, de son propre aveu, tout ce qu'il voit par magie peut être hautement métaphorique, mais en vain. En essayant de dessiner ce qu'il a vu pour convaincre le Lewyllen, Andréas bousille des pages entières de son précieux grimoire [pour éponger ses pions de Trauma, il exprime une réaction de Stress au maximum, ce qui implique un sacrifice de sa part : il vient de détruire un précieux point de Ressource et il ne lui en restera plus qu'un pour calligraphier ou dessiner ses sorts] mais parvient à produire une image qui lui semble assez exacte : Rohanan frissonne vaguement en regardant le croquis d'une sorte de grosse main noirâtre dont les doigts se terminent par des bouches dentues et béantes, mais lorsque Hadrien Muraille vient voir ce qui se passe et tombe sur le dessin, il en est tout retourné [la qualité de l’œuvre est suffisante pour lui coller un pion de Trauma à lui aussi]. Il tâche de n'en rien laisser paraître, de rassurer à son tour le jeune écrivain dont il ignore toujours en grande partie les capacités (« ce n'était sans doute qu'un rêve, on a tous très mal dormi depuis quelques jours... ») et lui rappelle l'importance économique et politique du projet : « Notre œuvre civilisatrice ne peut pas se laisser arrêter par des superstitions ! » La nuit est assez agitée pour tous : les sentinelles sur le qui-vive, Hadrien et Andréas traumatisés qui s'agitent sous leurs tentes, Rohanan qui commence à désespérer d'entraîner Mérane sous la sienne et, pour arranger le tour, Totor qui pourrit le sommeil d'Adira en gémissant des mélopées funèbres sous la lune (les géants font ça, parfois, spécialement à l'approche de la pleine lune qui, incidemment, marquera le début de l'Assemblée Tribale au Cercle des Cascades).


[À Tal Endhil, le Capitaine reçoit un pigeon porteur du message « Avons trouvé traces d'un grand campement reman à 4 lieues de la mine, plusieurs tombes fraîches, signes de combat et un grand pont tout neuf sur le torrent. Nombreuses pistes de cavaliers et de loups. Continuons avec prudence. » qui lui fait dire "Mais cet homme est une perle. Faut que je note quelque part si je peux pas m'organiser pour qu'il reste quelques temps, celui-là. Peut-être que Bagoran pourrait avoir un accident ?".

Sixième jour : le travail c'est la santée éternelle

Au matin, pressés d'en finir et puisque les Kormes n'ont pas repointés leurs nez, presque tous les hommes valides s'attèlent au dégagement du puits de mine : avec l'aide du géant (et l'assistance discrète de Langard, qui fait de temps en temps rouler des pierres au bas de l'éboulement par magie), le travail avance plutôt vite et l'enthousiasme gagne bientôt tout le campement. C'est alors qu'Andréas, rongé d'angoisse, commence à réaliser que les mineurs, les Muraille, les Lewyllen, Totor, Adira et mêmes quelques mercenaires et templiers ont sorti des vivres et ne s'arrêtent plus de déblayer que pour dévorer bruyamment avant de retourner au travail avec un acharnement maniaque... En milieu de matinée, l'éboulement extérieur est complètement dégagé, on commence à déblayer le tunnel lui-même (obstrué sur une dizaine de mètres) et les vivres pour plusieurs jours ont été engloutis. Andréas tente en vain d'attirer l'attention de ses compagnons sur l'étrangeté de la chose et, persuadé qu'ils sont possédés, s'acharne à convaincre d'abord Rohanan (qui lui-même évacue rageusement les blocs de pierre) puis Hadrien. Lorsque ce dernier ordonne une pause et que les terrassiers continuent de déblayer gaiement, il admet enfin que l'enthousiasme général n'est pas naturel et commence à son tour à craindre ce qui pourrait bien finir par sortir de la mine. Andréas finit par "réveiller" Rohanan d'une mandale en travers la mâchoire, mais plus l'architecte, l'éclaireur et le chroniqueur tentent de freiner les travaux (et échouent), plus la panique les gagne [et les réactions fusent]. Une petite troupe de cavaliers Elloran et Lewyllen menés par Aenid Lamdan arrivent alors au campement : avertis par le corbeau de la veille (comme quoi, des fois, les corbacs sont honnêtes), ils sont venus s'enquérir des Dirsen. S'ensuit une conversation surréaliste («Et ils sont possédés et ils creusent tous comme des dingues !! _Hé oui, Dirsen, ton peuple est fou. Mais c'est pas ce que vouliez, qu'ils creusent ? _Mais si mais non, mais là, en plus, ils bâfrent tous comme 4 ! _Ha ben oui, les travaux de terrassement, ça creuse... _Mais merde c'est pas drôle ! On vous dit qu'ils sont possédés ! _Écoutez, on vous a averti sur tous les tons que tout ce qui sort du sol est maléfique par nature, vous écoutez jamais rien, vous êtes obsédés par des cailloux brillants qui vous font abandonner toute morale et c'est comme ça depuis des éons, alors si vous n'êtes pas directement en danger, nous on va pas vous déranger plus longtemps, on a une assemblée tribale à préparer...") et les cavaliers repartent en emmenant Virgile "Mange-Caillou", qui souhaitait parler au conseil du clan avant l'ouverture des débats. Hadrien, complètement flippé, a beau poursuivre les cavaliers en les suppliant de les aider, ceux-ci ne veulent rien avoir à faire avec ce qu'il considère comme l'habituelle folie des Dirsen. Andréas et Rohanan récupèrent l'architecte en larmes et décident de s'y prendre autrement : puisqu'il semble que plus leurs compagnons mangent et que plus ils mangent plus ils creusent, ils décident de faire main basse sur la bouffe... et manquent de déclencher une bagarre : plus le coup de folie dure, plus les "possédés" semblent devenir agressifs dès lorsqu'on veut les empêcher de manger ou de dégager le puits de mine. Plus inquiétant : Totor le géant a profité d'une inattention d'Adira (qui creusait un peu et festoyait gaiement) pour s'envoyer un plein tonnelet de viande séchée... et si on interdit généralement la viande aux géants d'élevage, c'est qu'elle semble réveiller leurs instincts sauvages. Malgré sa propre tentation gourmande, Adira prend conscience du danger, tente de priver Totor de sa barbaque et le géant lui montre les dents, avant de retourner creuser. « Il faudrait un soporifique, remarque Andréas, mais je doute d'avoir la dose nécessaire pour anesthésier un géant...» Alors, la mort dans l'âme, Adira révèle qu'il sait où trouver une grande quantité d'herbe-nuage et, dégageant un de ses précieux sacs du fond d'un chariot de matériel, le donne à manger à Totor qui, d'abord surpris, dévore ensuite à belle dents... et fini bientôt assis sur un rocher, contemplant avec un ravissement halluciné les motifs d'un joli caillou. Le test étant concluant, Mérane (que Rohanan a réussi à ramener à la raison) et les PJ, désormais seuls à garder la tête froide à force de se surveiller les uns les autres (et qui doivent régulièrement renvoyer les sentinelles à leur poste, puisqu'elle se barrent régulièrement pour manger ou creuser), décident de mêler de l'herbe-nuage au reste de la nourriture entassée sur des tréteaux par les "possédés" et, en milieu d'après-midi, la galerie maintenant dégagée sur plusieurs mètres de profondeur est l'objet d'une activité d'autant plus réduite que Totor ronfle bruyamment pendant que nombre des joyeux mineurs maintenant drogués errent en parlant tout seul, ricanent en petits groupes à propos d'un rien, boivent au ruisseau ou font la sieste n'importe où. Mais soudain, un des mercenaires qui faisait le guet à l'entrée sud donne l'alerte : une troupe de cavaliers grimpent le sentier au grand galop !

Sixième jour -suite- des renforts d'emmerdements

Au grand soulagement des rares défenseurs, les cavaliers qui arrivent à bride abattue sont manifestement des "impériaux" lourdement armés sur de petits chevaux nordiques : cheveux courts, chevaux sellés, cottes de mailles, bliauts verts ou marrons... À l'approche du portail, le premier d'entre eux se dresse dans ses étriers pour hurler « Ouvrez-les portes !» et s'engouffre au grand galop dès que le ventail s'entrouvre, immédiatement suivis par ses 8 compagnons plus ou moins abîmés, dont l'un est attaché vautré sur sa selle, plusieurs flèches dans le corps. La trentaine bien sonné, crotté jusqu'à la ceinture et légèrement blessé au bras sous son bouclier fendu, le chef saute à terre et s'annonce comme le chevalier du temple Jarell Sacrement, cherchant des yeux qui peut bien être le responsable de ce campem... de l'invraisemblable bordel qui s'étale sous ses yeux. Après un instant d'ahurissement, il annonce brièvement qu'une cinquantaine de Kormes sont à leurs trousses, qu'ils n'ont guère plus de deux ou trois heures sur l'avant-garde ennemie, qu'il a un blessé grave (Andréas l'examine et corrige sobrement : « Non, c'est un mort...») et que le Capitaine Durgaut les a envoyé s'enquérir du sort de l'expédition mais qu'ils sont tombés sur la colonne ennemie arrivant du vallon et qu'il y a laissé un... enfin deux hommes. « Et par les Pères, qu'est-ce qui se passe ici ? » Andréas, Adrien et Rohanan tentent de lui expliquer qu'ils soupçonnent la mine d'être "hantée" et que leurs compagnons ont été pris de folie depuis le matin, Sacrement accuse le coup en haussant un sourcil circonspect et serre les dents en voyant arriver le chevalier Conrad de Mélanque qui le salue fraîchement : « Qu'est-ce que c'est que ces tenues, Frère Jarell ? _Figurez-vous que quand on est en sous-nombre en territoire ennemi, c'est plus discret que le rouge et or, Frère Conrad. _Hmph... Nous avions la situation bien en main et vous nous amenez des rebelles, donc ? _J'ai des ordres, oui, mais si on vous dérange on peut aussi repartir, hein... _Allons, Messeigneurs, je vous en prie...» Abasourdis qu'une femme et un sauvage osent les interrompre, les deux templiers arrêtent de se bouffer le nez le temps que Rohanan et Mérane leur expliquent la situation, bientôt rejoint par Hadrien, Andréas, Adira et quelques mercenaires curieux de voir les templiers s'engueuler. Sacrement a un peu de mal à avaler cette histoire de possession, surtout que le tumulte de son arrivée et la gravité des nouvelles semblent avoir "réveillé" la majorité des présents (il reste trois types qui creusent) mais lorsque Conrad de Mélanque, lassé d'écouter son homologue "de basse extraction" (1), retourne se joindre aux travaux d'excavation qui reprennent peu à peu, Jarell est bien obligé d'admettre qu'il se passe quelque chose d'anormal (un noble qui bosse, ça, c'est une preuve de possession démoniaque). Andréas, Hadrien et Adira le mettent d'ailleurs en garde contre la nourriture et lui explique ce qu'ils pensent avoir compris du phénomène, lui indique la probable présence d'un "artefact maudit" derrière l'éboulement (s'attirant un regard méfiant) et lui demandent si les templiers ont quelques recours en la matière : malheureusement, le médecin et exorciste du groupe fait partie des deux morts et quoique Sacrement puisse fournir un exemplaire du Livre des Âges (la "bible" du Culte des Pères), il avoue son incompétence dans le domaine (à la déception générale).

1) Ceux des PJ qui ont quelque érudition (et connaissances religieuses ou livresques) identifient en effet assez vite que si un type a le titre de "Chevalier du Temple" sans avoir de particule et un nom "de famille" comme Sacrement, c'est qu'il est vraisemblablement un pupille du Culte des Pères, autrement dit : un enfant trouvé.

Sixième jour : combat nocturne

Manifestement disciplinés, les "nouveaux" templiers font panser leurs plaies et rejoignent les postes de guet en se contentant d'un peu d'eau fraîche, pendant que les PJ, Mérane et Sacrement mettent au point une stratégie : avec l'aide de Totor, ils barricadent la porte principale en y empilant des chariots et du matériel, on fixe des madriers derrière la poterne ouest, les Muraille s'attèlent à la fabrication de trébuchets sommaires , on taille quelques épieux, on démonte les tentes les plus proches de la palissade pour éviter qu'une simple torche suffisent à les incendier, on poste des guetteurs aux deux portes, au sommet du haut-fourneau (mais on l'utilisait déjà comme mirador depuis la vieille) et sur les toits grossièrement réparés des bâtiments est, les plus bas et les plus fragiles. Malgré l'insistance de ses camardes qui s'interrogent sur la possibilité de se replier dans la mine en cas d'assaut, Andréas (toujours terrifié) refuse de s'y projeter à nouveau pour dresser un plan des galeries. Le plus difficile reste clairement de maintenir les sentinelles à leurs postes alors que, toutes les cinq minutes, le premier imbécile qui se déconcentre ou grignote une pomme (Adira, notamment) se retrouve sans bien s'en rendre compte à creuser avec la majorité des mineurs et des palefreniers. (S'interrogeant sur le fait qu'ils ne soient pas tous affectés de la même manière, les PJ supposent que la Fatigue, la résistance mentale -car de hauts scores de Volonté semblent partiellement protéger Andréas et Rohanan- et la conscience du danger modifient leur sensibilité, mais vérifient clairement que l'emprise "démoniaque" empire plus l'on mange et plus l'on creuse.) Le crépuscule descend déjà sur le vallon lorsque Rohanan, de garde en haut du fourneau, repère les premiers cavaliers Kormes faisant halte derrière un bouquet de sapins, a le bon réflexe de donner discrètement l'alerte et, si l'on renonce vite à mobiliser les "terrassiers" obnubilés et vindicatifs, une petite douzaine de combattants s'apprêtent à les recevoir (les hommes de Sacrement, Rohanan, les Muraille, Mérane armée d'une pioche malgré sa peur et quelques mercenaires "lucides"). Si Andréas cherche une cachette au milieu du campement, Adira jette fourbement quelques morceaux de viande à Totor qui, ne comprenant pas bien ce qui se passe, est resté à parfaire sa barricade de cailloux et de brindilles ("Mais qu'il est con ce bestiau !"). Une dizaine de Kormes foncent à cheval vers la porte ouest, lancent des grappins et arrachent d'un seul coup le montant, mais le ruisseau, le pont et la barricade de madriers tombés gênent la charge des cavaliers : alors que les templiers les attendent lancent ou épieux en main, les Kormes tentent un par un de franchir l'obstacle et, un par un, les premiers audacieux sont tués, blessés ou démontés à coups de flèches par Horen Rohanan (très en forme) et rapidement achevés. Au portail sud, le premier Korme à sauter de cheval jusqu'en haut de la palissade est accueilli par un géant surpris et mâchonnant dont le rugissement outré suffit à faire basculer l'assaillant en arrière ("Bravo ! Ça c'est un bon géant !") mais, dès qu'il a reçu un coup de lance, Totor se roule en boule en gémissant et trois ennemis franchissent l'enceinte pendant que deux mercenaires et un templier (pour la première fois côte à côte) tiennent de leur mieux le poste de guet soumis au tir des archers à cheval. D'autres archers ont d'ailleurs pris position sur les toits des bâtiments voisins et commencent à arroser sans distinction mineurs et défenseurs, en particulier Antonio Muraille qui encaisse un trait lorsque le patriarche ordonne à sa famille d'aller les déloger ; parce que les toitures de fortune cèdent soudain sous le poids des assaillants, les Murailles parviennent néanmoins à traîner le blessé à couvert dans la plus proche masure où deux Kormes se débâtent dans le chaume et les solives brisées. Courant en zig-zags, Andréas s'élance sur leurs talons... À l'ouest, les cavaliers ayant cessé de charger après avoir perdu trois ou quatre compagnons, Sacrement lance une charge à l'épieu pour débander les hésitants et, voyant deux ennemis venir à lui par le sud, Rohanan abandonne l'arc pour ses armes de prédilection : la lance courte et le bouclier. En criant des insultes et des défis, il coupe leur trajectoire pour protéger Mérane  : la charge du premier ennemi s'aplatit sur le pavois du Lewyllen qui l'embroche d'un coup sec, la pointe traversant dans les deux sens la poitrine du Korme qui s'effondre aussitôt agité de soubresauts sanglants ; le second adversaire est plus circonspect mais Rohanan le laisse mouliner de l'épée à deux mains et, chaque fois que le Korme tente de frapper, Rohanan pare, le repousse du bouclier et s'enfonce un peu plus dans sa garde et, lorsque l'ennemi finit par perdre pied, il l'empale à son tour, coinçant son fer entre les vertèbres de son adversaire qui se débat un instant, puis l'étripe d'une brusque traction devant Mérane terrifiée (et là, subitement, les autres joueurs comprennent pourquoi les "palefreniers" Lewyllen traitent Horen Rohanan avec une prudente révérence...). Dans la hutte effondrée, l'un des deux guerriers "Défunts" s'est déjà relevé pour accueillir le clan Muraille  : esquivant un coup de masse de l'architecte, le premier Korme riposte d'un grand coup de glaive et, si Hadrien n'avait alors trébuché, le coup l'aurait probablement mis hors de combat. Le second rebelle échappe à l'attaque conjointe des "fils" Muraille d'un vif roulé-boulé et, d'un grand coup de taille, déchire profondément la cuisse du plus jeune, Vivien, qui s'écroule en hurlant de douleur (les fistons commencent à être très entamés). Le premier allait se jeter sur Hadrien lorsque Andréas surgit par la porte et lui entaille le bras d'un coup de dague : surpris, le Korme ne parvient pas à éviter le grand coupe de masse de l'architecte qui l'étale pour le compte. Acculé, l'autre se débat comme un fauve face aux apprentis et en aurait blessé un troisième si Andréas n'avait détourné l'attaque in extremis et, avant qu'il n'ait pu s'en prendre au chroniqueur, Hadrien balance son marteau à deux mains dans le thorax du Korme, fracassant les côtes comme du petit bois : leur dernier adversaire s'affaisse, ses pieds raclant la terre battue et une mousse rosâtre perlant à ses lèvres, indicatrice d'un poumon perforé. Les fils l'achèvent brutalement, déchargeant leur peur et leur haine sur l'adversaire vaincu. Puis chacun reprend son souffle et Hadrien jette un œil au dehors, où le combat fait rage et alors qu'Andréas s'agenouille pour panser les blessures de ses compagnons, le Korme assommé se relève en titubant : de toutes ses forces, le mage lui plante sa dague dans la poitrine et bascule avec lui dans le chaume, plongeant encore sa lame dans le cadavre à plusieurs reprises jusqu'à ce que sa rage s'éteigne. À l'extérieur, l'affrontement a en réalité basculé dès que les premiers mineurs sont morts sous les flèches : les terrassiers "possédés" se sont alors rués sur les Kormes en hurlant comme des damnés et, les deux camps attaquant sans se soucier de leur défense, les cadavres des rebelles et des impériaux s'entassent rapidement le long de la pente bourbeuse du campement. Quatre guerriers chauves qui s'étaient élancés vers la mine sont balayés par la marée furieuse qui en dévale (au premier rang de laquelle Adira, armé d'une pioche qu'il ne sait pas manier et poussé par sa manie de "Jouer avec le Feu", est illico assommé par un ennemi et piétiné par ses alliés), les défait au prix de plusieurs blessés graves, les renverse et s'acharne furieusement sur les corps. Mêmes les impériaux blessés semblent plus préoccupés de démembrer les vaincus que de ménager leurs plaies et le spectacle révulse les témoins lucides, dont Andras et les Muraille qui hésitent à quitter leur masure et les hommes de Sacrement qui, au prix de quelques blessés, ont repoussé les cavaliers restant à la porte ouest. Alors que les derniers ennemis se replient à bride abattue, Rohanan finit par ceinturer un de ses cousins lewyllen qui, aveuglé par la rage, défonçait à coups de pioche le cadavre d'un Korme au point d'entamer le sol gelé et, à force de tirer les hommes un par un hors de la curée, les templiers et les PJ parviennent à ramener un semblant de calme pour faire le compte des pertes : la moitié des mineurs, un lewyllen, 5 templiers et une grosse quinzaine de Kormes viennent de trouver la mort en quelques instants d'une boucherie sauvage.

Deuxième séance

sixième jour : après l'effort, encore des efforts

La nuit est tombée sur la mine et, leur avant-garde repoussée, les Kormes ont monté tout autour du site un siège digne de ce nom : de grands feux brûlent pour éclairer les deux seuls chemins vers l'extérieur, on devine des guetteurs entre les rares sapins et, par instant, un cheval hennit à quelques distances vers le sud-est. Derrière leur enceinte, les deux portes solidement barricadées, les toits des bâtiments cette fois sérieusement surveillés et tous les guetteurs valides (c'est à dire ni possédés ni gravement blessés) surveillant anxieusement l'ennemi, Andréas a rafistolé tous ceux qui pouvaient encore l'être et examine maintenant les options à leur disposition avec Jarell Sacrement, Mérane, les mercenaires Six-Pièces et le Noiraud (depuis le combat, Cylien Brûlé et Bouc sont manquant, apparemment partis à la poursuite des Kormes qui se repliaient et jamais revenus), Hadrien Muraille, Horen Rohanan et Adira Pratesh : les templiers ont envoyé un pigeon vers Tal Endhil juste avant la nuit noire (de façon à ce qu'il ne soit pas abattu par un archer korme, même si le volatile se sera certainement arrêté pour la nuit à peu de distance) et espère maintenant que, peu après l'aube, le Capitaine Durgaut recevra leur anxieuse demande de renforts. À marche forcée, une troupe envoyée du village pourrait arriver dans les 24h... si les assiégés tiennent jusque là. Car en plus des Kormes à l'extérieur et des quelques cinglés qui creusent encore, nos héros ont réalisé il y a peu que, s'ils parvenaient à empêcher les derniers "possédés" d'accéder à la mine pendant un moment, ils continuaient d'entendre les bruits d'un déblaiement par l'intérieur des galeries : la créature affamée qui y est enfermée finira fatalement par sortir. Malgré leurs blessures, les Muraille se sont attelés eux-mêmes à quelques travaux défensifs, puisqu'ils ne leur reste guère d'ouvriers : en plus du trébuchet toujours inutilisé, ils ont ajouté un assommoir à la sortie du puits de mine et des chevaux de frises en guise de chicane, de façon à ce que si une quelconque horreur surgissait des profondeurs de la montagne, elle doivent se démêler des obstacles avant de menacer le camp. Les cadavres de la fin d'après-midi ont été rassemblés au nord-est du camp, pour peu que la "faim" guide la créature chthonienne (au sens propre, pour une fois) vers eux. Qu'est-ce que nos héros pourraient bien tenter d'autre ? « On pourrait s'enfuir par la montagne : avec les cordes, les pitons et le géant, il doit être possible d'atteindre le chemin de crête qui mène au Cercle des Cascades. _Non, il faudrait abandonner les blessés... Mais la mine elle-même pourrait faire un excellent "dernier bastion" : si on s'y réfugie, on pourra certainement tenir jusqu'à l'arrivée des renforts. _Sauf qu'elle est hantée, donc. _Hantée, hantée... Y a un truc bizarre qui veut en sortir, bon : s'il y arrive, il sera donc "dehors" et nous, on pourra aller "dedans". _J'ai bien peur qu'il ne soit lié à l'artefact et je ne sais pas s'il peut s'en éloigner. _Ah parce que vous êtes un spécialiste, vous ? _Non mais je suis un... chroniqueur heu... j'ai beaucoup voyagé et beaucoup lu... _On pourrait tenter une sortie avec l'aide des...heu... talents d'éclaireur d'Andréas, frapper les Kormes dans leur campement et tâcher d'abattre leurs chefs ! _Chroniqueur, médecin, éclaireur... Y encore beaucoup d'autres choses que vous savez faire, vous ? _Ahem. Et... si on... négociait ? _Négocier avec les rebelles ? Je me demande bien qui pourrait être assez dingue pour aller parlementer avec ces païens qui... _Adira !? _Quoi, qu'est-ce que j'ai fait encore ? _Vous parlez leur langue et vous avez la réputation d'un fin négociateur, Maître Pratesh ! Si quelqu'un peut aller leur parler, c'est bien vous ! _Oh ? Dîtes... mmmh... moui, 'ttendez voir, peut-être bien... »


[Adira a été désigné "émissaire" par les autres joueurs un jour que Kobal était en retard pour se connecter : en rejoignant la Table Virtuelle, il a donc découvert cette "intéressante" décision et, effectivement, réalisé qu'il pouvait en tirer profit...

Et, quelques minutes plus tard, couvert depuis la palissade par l'arc de Rohanan, Adira Pratesh glisse (presque) souplement à bas de l'enceinte et, trébuchant dans l'obscurité, s'avance vers le plus proche feu, installé sur le chemin sud, en levant haut les mains et en annonçant à plein poumons en Langue des vents : « Hoooohééé ! C'est le P'tiiiiit Noiiiiir (1) ! Je viens parlementeeeeer ! ». À la relative déception de ses camarades (qui se demandaient quand-même un peu s'il allait être sommairement abattu avant d'avoir dit "bonsoir"), plusieurs guerriers aux crânes rasés sortent de l'ombre pour l'entraîner vers leur campement, situé quelques centaines de mètres plus bas derrière un escarpement hérissés de maigres sapins : plusieurs dizaines de chevaux y sont parqués, quelques tentes dressées et, autour d'un grand feu où rôtit une espèce de lièvre, Etayn-la-Louve et plusieurs guerriers mal à l'aise semblent se faire sermonner par un Reman (!) barbu à la quarantaine avancée (qui correspond à la description donnée par Languard du "sorcier en noir" venu installer le sarcophage). Il s'interrompt en voyant arriver Adira et lui fait signe de s'assoir avec eux sur les troncs... et c'est seulement alors que le fehnri réalise que ce qu'il avait pris pour des carcasses suspendues aux arbres sont en fait les deux mercenaires disparus plus tôt, Cylien Brûlé et Bouc, suspendus la tête en bas, écorchés de la taille aux épaules et gémissant à peine sous la croûte de sang séché qui leur couvre le visage. Adira serre les dents et réussit à ne rien laisser paraître de son angoisse en s'installant à côté d'un Korme musculeux. 1) "Eshil'arkon" est le surnom d'Adira en Langue des Vents, ce qui signifie "le petit noir" ou "le petit pourri", les deux traductions se valent. Les Elloran de Tal Endhil l'appellent également "Mesh-Mesh", ce qui signifie à peu près "À moi ! C'est à moi !" Calme et même étrangement affable, le Barbu fait taire Etayn d'un geste lorsqu'elle tente de l'avertir de la malhonnêteté atavique du fehnri (ce qui donne lieu à quelques échanges amusants sur la base de "Rho l'autre ! C'est elle qui a essayé de m'arnaquer la dernière fois ! _Je ne te dois rien, suppôt de l'Empire !") et propose à manger au marchand avant de lui demander ce qu'il veut : avec une hallucinante maladresse, Maître Pratesh se laisse alors tirer les vers du nez en tentant d'expliquer la situation (l'artefact défectueux, l'horrible démon qui a déjà possédé la plupart des Impériaux et menace tout le secteur si on ouvre la mine, le nombre de défenseurs valides et même l'heure d'arrivée prévue des renforts... "pour le lendemain à l'aube"), ce qui a au moins pour effet d'endormir la méfiance du sorcier (qui sort un luth et commence à l'accorder tout en discutant, les deux suppliciés agonisant à 3m de là). Des échanges entre les Kormes et leur chef inattendu, Adira comprend vite que le sorcier tient Etayn pour responsable de la situation (et qu'en retour elle déteste le sorcier), qu'il ignorait l'histoire du démon et ne sait trop dire comment ça a pu se produire (il acquiesce néanmoins à la théorie d'Andréas selon laquelle la fuite d'énergie représenté par l'artefact resté "sous tension" depuis des semaines a pu permettre à un parasite immatériel de prendre corps dans la mine) et semble, en fin de compte, assez irrité d'avoir du se déplacer pour corriger les insuffisances du petit personnel : chaque fois que le sorcier fait une remarque méprisante sur les Kormes, Adira sent le colossal guerrier assis à ses côtés se crisper d’inquiétude. Après un court instant de réflexion passé à gratter joliment les cordes de son luth ("Il va m'offrir des chamallows pour aller avec le feu de camp et la guitare ?"), le Sorcier propose un marché tout simple au négociant : si les Remans peuvent extraire le sarcophage de la mine et le leur remettre avant l'aurore, lui et ses guerriers s'en iront en laissant les Dirsen exploiter leur mine ; sinon, au lever du soleil, ils passeront à l'attaque et massacreront tout le monde. Mais alors qu'on allait le raccompagner vers la mine, le fehnri explique soudain que, en admettant qu'il soit encore en vie pour cela, il pourrait offrir un important chargement d'armes aux Kormes d'ici quelques semaines  : complètement pris au dépourvu et manifestement très intéressé, le Barbu au Luth accepte l'offre et le prix (substantiel) de Maître Pratesh, et rendez-vous est pris pour la prochaine pleine lune à Écume 5 (chez les Olodens, donc) afin d'échanger des armes contre une petite fortune en herbe-nuage. « Mais si tu ne tiens pas parole, Petit Noir, n'aies aucun doute sur le fait que je te retrouverais, que je te torturerais et que je ne te tuerais que lorsque tu me supplieras de le faire. _Gulp. _Je suis ravi qu'on se comprenne. Tu veux récupérer les deux sanguinolents ? _Les deux... ah... heu...non. _Alors ils ne servent plus à personne. » Et sur un signe du sorcier, le musculeux guerrier se lève, saisit une grande hache et décapite les deux prisonniers sans autre forme de procès. En arrivant en vue de la palissade, Adira Pratesh court presque, pressé d'échapper à la nuit et à cet effrayant sorcier ; il va maintenant devoir s'arranger avec ses compagnons...

sixième jour (toujours) : la nuit la plus longue

Et, il faut le dire, les camarades d'Adira, et les templiers en particulier, prennent l'ultimatum avec un enthousiasme assez... "tiède" : « C'est ça que vous appelez "négocier" ?! _Et pourquoi demain matin, merde ?!? _Il faut dégager l'entrée et se réfugier dans la mine ! _Avec tous les gars blessés, on y passerait la nuit ! _Et comment sait-on qu'ils tiendront parole ? _Vous auriez au moins pu compter leurs forces ! _Mais il faisait tout noir...» Hardien Muraille, au bord des nerfs depuis le début de la soirée, laisse alors éclater sa rage contre l'innocent trébuchet qu'il a construit plus tôt et démantèle l'engin à coup de masse pour passer ses nerfs. Andréas, Rohanan et Mérane réussissent néanmoins à calmer les esprits : en mettant les choses au pire, Adira leur a gagné une nuit pour se préparer et, dans tous les cas, il n'est pas question de laisser les Kormes repartir avec l'artefact. Par ailleurs, les Muraille ont continué d'avancer sur leur chevaux de frises et leur assommoir pendant que les autres se reposaient et il leur reste presque 6 heures de nuit pour se requinquer et mettre un plan au point, leurs options étant à peu près les mêmes qu'avant : tenir le siège ou rependre l'offensive... que ce soit vers l'extérieur ou vers les entrailles de la mine. Car Andréas, qui commence pour sa part à retrouver le contrôle de ses nerfs, a peut-être bien trouvé une solution et employé les dernières pages vierges de son grimoire pour y esquisser et décrire une puissante "Chimère Maligne" à laquelle il a donné les traits d'Herem, l'un des 8 "Premiers" du culte des Pères.


Si la "Chimère" est principalement l'art magique de l'illusion, une chimère "maligne" est une hallucination dotée d'assez d'autonomie pour se nourrir des émotions qu'elle suscite, donc de se perpétuer et même de croître... Par le dessin et la calligraphie, principales "arcanes" par lesquelles il canalise et prépare ses sorts, Andréas est en l'occurrence en train de mettre au point un "Guerrier Chimérique", c'est à dire l'illusion sensible, animée et agressive d'un terrible combattant, assez puissante pour causer des dommages certes "imaginaires" mais qui la nourrissent (en plus d'être évidemment insensible aux armes matérielles : la seule différence avec l'invocation d'un démon, c'est finalement que le mage peut paramétrer lui-même toutes les capacités de sa création...). Le sort est par contre si difficile et requiert tellement d'énergie que le bonus généré par la préparation et le sacrifice de sa ressource "Grimoire" sera loin d'être suffisant, et notre mage va avoir besoin de puiser autant d'énergie que possible d'une source "extérieure" et c'est là que l'aspect religieux offre une opportunité : en effet, les "mentalistes" comme Andréas peuvent tirer de l'énergie d'un sentiment profond et partagé par tout un groupe, il possède même un rituel rien que pour ça...

« Prions, mes frères. » balance Andréas sans prévenir, son grimoire sous le bras. « Quoi ?! _Il a raison, intervient alors Adira Pratesh à la stupeur générale : en ces heures noires, nous devrions supplier les Pères qu'ils nous donnent la victoire. Rassemblons-nous tous et prions.» Évidemment, les Templiers seraient a priori favorable à l'idée mais leur enthousiasme pâtit sévèrement de ce que la proposition vienne d'un escroc fehnri (c'est à dire selon leur credo un sous-homme né de Fehen, la sorcière rebelle ayant trahi les Pères) et notoirement incroyant. Mais Maître Pratesh est vaguement au courant qu'Andréas prépare quelque et a espionné assez de conversations depuis le début de cette expédition pour avoir compris que le chroniqueur était probablement un sorcier, il choisit donc de soutenir le meilleur plan disponible et, arrachant le Livre des Âges des mains d'un templier et grimpe sur un tonnelet pour dire la messe, Andréas et les fils Muraille (poussés par leur patriarche) étant les premiers à s'agenouiller devant lui, bientôt rejoints par Jarell Sacrement et tous les templiers qui ne sont pas de garde. Agitant le livre saint comme une botte de carottes en promo, Adira part complètement en freestyle télévangélique et sa ferveur est telle que bientôt tout le campement est agenouillé devant le colporteur qui entonne un cantique passionné, Rohanan convaincant même ses compagnons Lewyllen de se joindre à la cérémonie, puisqu'un peu de chant et de communion n'a jamais fait de mal à personne avant une grande bataille. Tous chantent les yeux fermés par leur pieuse ardeur, Totor mugit les basses et Andréas trace dans l'air les premier signes nécessaires au rituel qui lui permet de puiser une large quantité d'Essence magique dans ce grand élan de foi !

Les psaumes ne s'arrêtent même pas lorsqu'une des sentinelles vient signaler que des Kormes approchent, mais Rohanan saisit son arc pour aller voir en intimant aux autres de continuer, grimpe au poste de guet et, scrutant la nuit, distingue bientôt un quatuor de guerriers peints encadrant un petit brun barbu qui, à peut-être 50 ou 60m du portail, semble danser sur place en tendant les bras vers la mine. Du haut du rempart de bois, l'éclaireur jette un œil vers Andréas, qui sent depuis un instant une présence malveillante à la limite de ses perceptions (pour l'instant concentrées sur le tissage de la plus puissante et la plus importante Chimère de toute sa vie), et une douleur sourde grandir dans sa poitrine. Sans bien savoir ce qui est en train de se passer, Horen Rohanan comprend en tous cas que le sorcier ennemi tente d'interrompre leur rituel et, ni une ni deux, décoche une flèche qui vole dans l'obscurité et atteint la cible dans l'épaule : comme si de rien n'était, le Sorcier continue d'incanter et Andréas doit redoubler de concentration pour ne pas perdre le contrôle de son sort alors qu'une douleur aigüe lui perce la poitrine. Deux des Kormes ripostent mais ne parviennent qu'à planter leurs flèches dans le parapet devant Rohanan, qui bande à nouveau son arc, vise soigneusement par dessus le garde qui levait un bouclier pour défendre son chef... et place un second trait en plein dans la poitrine du barbu, qui au lieu de s'effondrer ou de se tordre de douleur pousse un puissant « MERDE ! » et, arrachant les deux flèches de sa poitrine comme s'il ne ressentait aucune douleur, bouscule son escorte et s'élance vers l'enceinte en courant. Rohanan lui aussi furieux largue son arc, enjambe le parapet où les flèches Kormes continuent de pleuvoir, se laisse glisser au pied de la palissade, dégaine son nerhil et fonce à son tour vers le sorcier, que son escorte tente maintenant de rattraper en échangeant des flèches avec les défenseurs. Les deux furieux sont bientôt les seuls à ne pas regarder en l'air car l'escorte de guerriers peints, les 2 sentinelles derrière Rohanan, les fidèles comme les templiers autour d'Adira et même Andréas lui-même regardent l'étrange lumière dorée qui vient de s'allumer quelques mètres au-dessus de la messe des assiégés. D'immenses ailes brillantes s'en déploient et l'on distingue bientôt la haute silhouette caparaçonnée d'Herem, Second Fils des Étoiles, Premier Seigneur des Batailles, Saint-Patron des Templiers et divinité tutélaire des Hornois (rien que). Tout à fait semblable aux enluminures qui lui sont consacrées, le dieu est un colosse de 3m en armure d'or, des flammèches s'échappent de la visière de son heaume couronné de l'étoile première à huit branches barbelées, les plumes de ses ailes sont des lames étincelantes et il brandit une épée enflammée dont la lame est longue comme un homme : pendant qu'Hadrien est figé dans une expression de stupeur révérencieuse, Adira en tombe de son tonnelet, recule à quatre pattes et s'affale face contre terre en implorant la clémence du Premier. Comme un seul homme, Jarell, Conrad de Mélanque et les autres templiers ont dégainés leurs lames pour les planter en terre et s'incliner en signe d'allégeance Volant sur place d'un lent mouvement de ses ailes métalliques, le dieu se tourne maintenant vers le portail sud, au pied duquel Rohanan vient de réaliser que quatre guerriers chargent à la suite du sorcier et que ça va chauffer pour son matricule... lorsque la vision de l'ange des batailles franchissant le portail d'un coup d'aile en brandissant son épée incandescente stoppe net les 5 ennemis et incite le Lewyllen à jeter par dessus son épaule un œil au monstre volant et lumineux : « Oh putain... » a-t-il le temps de lâcher avant de se jeter au sol parce que la divinité fond sur le sorcier en abattant sa lame. Le Barbu résiste de son mieux, sans doute conscient d'avoir à faire à la magie plutôt qu'au divin, mais s'écroule sous la deuxième attaque, recroquevillé en position fœtale au bord du chemin givré. Les Kormes, d'abord tétanisés, prennent soudain leurs jambes à leur cou en direction du camp, mais les moins rapides sont bientôt rattrapés et "massacrés" sans pitié.

Rohanan se relève et, quoiqu'un peu sous le choc du bombardement divin, décide de saisir l'opportunité que représente un chef ennemi inconscient : il saisit le sorcier sous les aisselles et commence à le traîner de son mieux vers le portail que les templiers et une poignée de mineurs ont réussi à dégager et à ouvrir pour s'élancer à l'assaut sur les talons de leur dieu. Mais à peine ont-ils croisé Rohanan que son fardeau reprend conscience et commence à se débattre : l'éclaireur refuse de lâcher prise et continue à courir lorsque le sorcier le saisit lui aussi à bras le corps, frappant le jeune homme d'une douleur fulgurante
le sorcier vient de profiter de l'occasion pour "drainer" le jeune homme d'une partie de son Énergie vitale, causant de graves dommages pour se régénérer lui-même et lancer un second sort, grandement avantagé par l'absence de paramètre "Distance"...
Rohanan ne cède toujours pas, continue de courir en espérant qu'on viendra à son aide et, soudain, la prise du sorcier lui broie les côtes et lui brise les vertèbres : le jeune homme s'écroule d'un seul coup et le sorcier roule vers le torrent...

À l'intérieur du camp, la ferveur a cédé la place à la confusion et à un début d'inquiétude, maintenant que la plupart des guerriers se sont égayés à la suite du Seigneur des Batailles (qui atteint bientôt le bord de sa zone d'effet et doit renoncer à poursuivre les Kormes qui s'enfuient à cheval de tous côtés, se contentant d'arracher les pions d'Énergie nécessaire à sa survie aux retardataires terrifiés que les templiers chargent sans pitié). Andréas, à bout de souffle et en nage suite à l'effort fourni, met plusieurs minutes à réaliser que Rohanan n'est pas revenu et qu'il se passe quelque chose au portail, où Mérane et les Muraille se sont rassemblés et l'appelle à l'aide : attrapant sa trousse de remèdes, Andréas accourt pour trouver le corps sans vie de son ami étalé dans la neige. Les "palefreniers" lewyllen les rejoignent arcs aux poings et Hadrien Muraille scrute les environs à la recherche du sorcier ennemi, mais le barbu semble avoir disparu. Adira, qui tentait de calmer Totor complètement terrifié par l'apparition (il s'est roulé en boule derrière une tente et gémit doucement, refusant de révéler sa grosse tête enfouie dans ses puissants bras), se décide enfin à aller voir ce qui se passe au portail pour découvrir les 4 lewyllen portant le corps brisé de leur camarade, et fond en larmes dans les bras d'Arlan, trempant la tunique de l'éclaireur de ses sanglots nerveux.

Troisième séance

une odeur de chien mouillé


Atteignant enfin le couvert des sapins à un demi-kilomètres au sud de la mine, accompagnée par une poignée de loups inquiets et encore couverte de la peau de bête enchantée qui lui permet de passer pour l'un d'eux aux yeux des humains comme à ceux des esprits, Etayn-Deux-fois-Défunte s'appuie à un tronc pour reprendre son souffle, lâchant enfin le bras du sorcier, trempé comme un soupe et fulminant encore de sa défaite, qu'elle tracte dans la neige depuis plusieurs minutes. Le Barbu s'affale à ses côtés et cherche son souffle.

« Belle attaque, croasse-t-elle en langue des Vents. Excellente coordination. _Le petit bâtard que tu as laissé vivre était en plein rituel, même toi tu as senti la puissance qui s'en dégageait et il fallait agir ! _Il fallait envoyer deux archer par le nord et le clouer sur place ! Si tu m'avais laissé faire... _Ça suffit ! J'en ai plein le cul de devoir te rappeler à qui Lashdan a laissé le commandement de la vallée et plein le cul de tes commentaires ! La créature va bientôt devoir se dissiper ou s'en prendre aux Dirsen, et il faut qu'on soit prêts à attaquer lorsque ça se produira. Avec toutes ces conneries ils vont finir par se terrer dans la mine, mettre la main sur le sarcophage et alors là, vraiment, je ne vois plus comment ou pourra les dégager de là avant l'arrivée des renforts ! _Ils ne sont même pas encore partie du Lac Troisième, ces renforts. _Qu'en sais-tu ? _J'ai posté des guetteurs en allant te chercher. Tu n'es pas le seul à être capable de tactique... _Et bien j'espère que tes clébards ne se trompent pas parce qu'on a encore une mine pleine de témoins à nettoyer et un sarcophage a récupérer avant de pouvoir rejoindre le Roi, alors qu'on a déjà quatre jours de retard.

Bas le rappel de tes hommes, je traite leurs blessures et on y retourne. J'aurais la peau de ce petit bâtard...»

septième jour : pourquoi faire compliqué quand on peut se suicider?

Au camp déserté par ses combattants, on mettait le corps de Rohanan de côté dans l'idée de lui donner des funérailles emishen plus tard lorsque Hadrien Muraille s'avise que, à l'intérieur de la mine, le monstre continue de creuser pour sortir et qu'il faut prendre des mesures : les PJ décident donc de se remettre à déblayer le peu qu'il reste d'éboulement pour que le Guerrier Chimérique puisse, à son retour, entrer là-dedans et faire sa fête à la créature dévorante. Les fils Muraille ont tôt fait de percer enfin un trou dans le tas de pierres qui exhale alors un remugle tiède et putride. Le trou est rapidement agrandit et, pendant que les Muraille discutent de l'opportunité d'ouvrir complètement, Adira saisit une lanterne, une pioche et décide d'entrer, faisant foin des avertissements suppliants de Totor qui vient de tenter à plusieurs reprises d'empêcher son maître d'approcher de la galerie. Le petit fehnri rampe par la mince ouverture en poussant sa lampe devant lui et s'enfonce dans les galeries boueuses (car un filet d'eu s'y déverse) qui, il faut bien le dire, puent le charnier. Il découvre bientôt, dans un tunnel adjacent, une botte dépassant d'un tas de gravas et hurle à ses compagnons qu'il a trouvé un cadavre. Gênés à l'idée de laisser Adira-le-Lâche s'engager dans la mine alors qu'ils restent à flipper à l'extérieur, les Muraille se résolvent à y aller aussi et, après avoir envoyé le jeune Vivien Muraille (clopinant à cause de ses blessures) chercher une lanterne supplémentaire, ils agrandissent encore un peu l'ouverture et entrent à leur tour, imités par Andréas qui ne voulait pas rester tout seul. Le médecin-mage-chroniqueur examine la botte, prolongeant apparemment un squelette à moitié enseveli (dans un amas de cailloux et de charbon de terre) et contenant encore les restes d'un pied et un tibia entièrement nettoyés de toute chair : ah. Des cris indistincts semblent leur parvenir de l'extérieur et nos héros appellent en réponse lorsque, moins de dix mètre en avant des autres, Adira (qui observait avec plaisir la poussière d'argent incrustée dans les parois) a bientôt l'impression inquiétante d'avoir vu une silhouette fuyant la lumière de sa lampe à huile : « Y a quelqu'un ! » couine-t-il avant de reculer précipitamment vers le groupe. Andréas, déjà à bout de tension, s'enfuit alors vers l'entrée et trébuche sur une pierre, entrainant un étaie dans sa chute et provoquant un nouvel éboulement qui referme l'ouverture. Damned ! Puisqu'il ne peut plus sortir par lui-même, et bien qu'il ait l'impression d'entendre la rumeur d'un combat au dehors, Andréas rejoint bientôt ses compagnons qui s'enfoncent de plus en plus dans les galerie à la poursuite d'un pas traînant qu'Adira entend reculer hors d'atteinte de la lumière chaque fois que lui-même progresse. Les côtes flottantes d'une cage thoracique, elle-aussi nettoyée à blanc et enfoncée dans la boue, craquent d'ailleurs sous ses pas ("On dirait qu'on marche sur des gâteaux secs !") et, malgré le morbide de la situation, nos héros décident d'allonger le pas pour acculer le fuyard...

Lorsque le groupe s'arrête à un embranchement, Andréas perçoit soudain une présence derrière lui mais n'a pas le temps de dégainer sa dague avant que deux bras décharnés se referment sur lui et que son assaillant le morde profondément à l'épaule, arrachant goulument un morceau de chair ! Le chroniqueur hurle mais, au même moment, trois autres Kormes décharnés, ressuscités par l'artefact et aveuglés par la faim se jettent sur eux de tous côtés !
Ils viennent de tomber dans une embuscade tendue par des créatures qui totalisent ensemble un score de Ruse inférieur à la moitié du plus bête d'entre eux : on les applaudit bien fort.

À défaut de courage, Adira possède assez d'impulsivité pour charger la plus proche goule en brandissant une pioche... que l'autre lui arrache aisément des mains avant de la lui retourner dans les côtes ! Les fils Muraille se jettent comme un seul homme sur une autre goule en attaquant de leurs pelles et de leurs pioches, mais ne parviennent qu'à le repousser. Derrière eux, Hadrien colle un coup de marteau au morfale qui dévorait l'épaule d'Andréas, libérant celui-ci... et laissant le passage à un quatrième adversaire pour se ruer sur l'architecte, qui l'esquive aisément mais n'arrive pas à placer un coup de masse, dans l'obscurité des tunnels que perce seulement la lumière des lampes tombées à terre et qui roulent sous les pas des combattants. Un nouvel assaut, une nouvelle esquive et Hadrien parvient à caler un grand coup de marteau dans le thorax de la goule qui vole sous le choc et heurte la paroi de pierre avant de glisser à terre : sans lui laisser le temps de se relever, le Reman lui assène sa masse sur le crâne et l'étend pour le compte. Dans une mêlée confuse, la fratrie Muraille parvient finalement à placer plusieurs coups de pelle dans un bras et la mâchoire de leur adversaire, qui s'affaisse en grognant, agité de soubresauts et tentant pourtant encore de saisir le plus proche mollet. Voyant sa fin arriver à la pointe d'une pioche brandie par un monstre, Adira saisit la lampe à huile et la fracasse sur le crâne chauve, où l'huile se répand et s'enflamme immédiatement : le monstre recule, a le mauvais réflexe de prendre sa tête incendiée dans ses mains (qui s'enflamment à leur tour) et, maintenant transformé en torche vivante et complètement aveugle, attaque au jugé le Fehnri et les fils Muraille venu le secourir. De part et d'autre, les attaques sont timides ou trop mal ajustées et, quoique des éclats de roche, des flammèches et des touffes de fourrure jaillissent dans tous les sens (les épais vêtements encaissant l'essentiel des rares dommages infligés aux fistons comme au colporteur), les humains dansent autour de la goule brûlante sans réussir à l'abattre, Adira roulant au sol pour récupérer sa pioche. Andréas a pu dégainer sa dague et l'enfonce dans le ventre de la créature qui revenait à la charge : au lieu de reculer, celle-ci s'embroche plus avant sur la lame pour tenter de refermer ses doigts crochus (car les phalangines ont été mises à nues à force de gratter la pierre pour sortir) sur la gorge du chroniqueur et c'est à nouveau Hadrien qui intervient pour la repousser, permettant à Andréas de dégager son fer pour poignarder l'ennemi en pleine poitrine, la basculant en arrière et lui collant encore plusieurs coups de dague pour faire bonne mesure. Derrière eux, les frangins atteignent finalement la torche humaine au genou, permettant à Adira de lui mettre un coup de pioche dans le dos : le dernier monstre tombe au sol, où ses cinq adversaires s'acharnent bientôt à le démembrer rageusement, pendant que le chroniqueur et le patriarche achèvent leurs vaincus à coups de masse et de dague jusqu'à ce qu'ils soient réduits en une pulpe sanglante. Image 1) Éboulement 2) Parcours de nos explorateurs à la poursuite du "pas trainant" 3) Attaque des goules 4) Sarcophage

Septième jour - de pire en pire

Nos victorieux héros entendent alors des cris plus proches et les raclements d'un déblaiement furieux : submergés par l'attaque surprise des Kormes au moment même où le Guerrier Chimérique se dissipait après avoir attaqué Totor (qui s'est enfuit à travers la montagne), abattu un mineur et avoir été repoussé par Jarell Sacrement brandissant son épée bénie , les survivants tentent de se réfugier dans la mine pendant que les derniers templiers couvrent leur fuite dans la faible clarté de l'aurore qui pointe à l'extérieur. Avec l'aide des PJ, Mérane, 2 lewyllen, 6 mineurs et 3 templiers parviennent à se glisser à l'intérieur avant qu'une volée de flèches n'abattent le dernier de la file et blesse les fils Muraille qui rebouchaient derrière les réfugiés. Andréas et Hadrien guident les arrivants vers la galerie sud (qu'ils ont déjà à peu près explorée), trient les blessés par ordre de gravité, pansent quelques plaies, fabriquent quelques torches puis, après avoir interdit à quiconque de les suivre dans le tunnel nord « dont l'étayage instable menace de s'écrouler à tout moment », rejoignent Adira qui y continuait son exploration. Après plusieurs culs-de-sac (dont le front de taille où la veine d'argent affleurant brille joliment à la lumière de la dernière lampe à huile), ils atteignent un tunnel en légère déclivité où s'accumule l'eau ruisselant du plafond et, alors qu'un bourdonnement grandissant assourdit Andréas sans affecter ses compagnons, finissent par découvrir le sarcophage tant convoité : c'est un énorme cercueil de pierre absolument lisse, veiné de coulées d'or rouge formant des symboles antiques et dont le couvercle basculé semble contenir l'essentiel du "manuel d'utilisation"... Malheureusement, aucun de nos archéologues amateurs ne sait réellement déchiffrer les inscriptions et on les appelle bientôt de l'entrée : les Kormes veulent négocier ! Hadrien Muraille y retourne dans l'idée de gagner du temps, que ses deux camarades doivent mettre à profit pour réussir à contrôler l'artefact et, de préférence, tenter de déclencher par magie l'assommoir qu'ils espèrent être toujours prêt à fonctionner à l'entrée de la galerie principale : s'ils pouvaient par ce biais isoler le Barbu dans le tunnel, ils auraient alors une bonne occasion de le tuer sans s'exposer aux tirs de ses archers... C'est en effet le sorcier barbu qui mène les négociations, et tente d'abord de convaincre l'architecte de lui envoyer plutôt Maître Adira Pratesh (qu'il croit à tort être plus sensible à la tentation d'un deal truqué), mais Hadrien lui tient la dragée haute : quand le sorcier affirme que s'ils lui amènent l'artefact il partira avec ses hommes sans plus s'attarder (faisant semblant de croire encore à l'arrivée prochaine des renforts impériaux), Maître Muraille lui rétorque qu'il ne pourra forcer le passage car, ainsi retranchés dans les galeries, ils peuvent tenir un siège avec la nourriture et les armes qu'ils ont emportées (ce qui est loin d'être vrai, mais l'architecte ment avec d'autant plus de conviction que, ayant fait préparer des sacs de provisions justement dans le cas où ce genre de repli deviendrait nécessaire, il compte évidemment sur le fait que ses consignes aient été respectées, le pauvre).

Au fond de la mine, Andréas se résout à poser carrément les mains sur l'artefact en surchauffe, qui lui envoie alors une violente décharge de pure magie... que par un splendide effort de volonté le mage parvient à canaliser et à absorber pour régénérer une partie de ses forces, durement éprouvées depuis quelques temps [il récupère ainsi 2 pions de Blessures et toute sa Fatigue]. Ragaillardi par l'expérience et faisant appel aux souvenirs des leçons dispensées par son mentor, Ormond Odran, Andréas conjecture que, comme la plupart des artefacts premiers qu'il a rencontré, le sarcophage possède une sorte d'esprit basique, comme un système d'exploitation qu'il pourrait contacter par Mentalisme... et pour cela il pense même pouvoir tirer directement de l'Essence magique du trop-plein de l'artefact ! A plusieurs reprises, il va donc sacrifier des pions en fatigue pour réussir de rapides sorts de Projection mentale afin d'analyser le fonctionnement de l'objet, puis des sorts de soins sur lui-même pour récupérer l'ensemble de ses facultés avant de tenter quelque chose vis à vis de l'assommoir... Évidemment, toutes ces manipulations magiques sont invisibles aux yeux du Fehnri qui commence à s'emmerder et, puisque le Barbu insiste toujours pour lui parler, Hadrien et Adira échangent leurs places. N'ayant aucune intention de se laisser entraîner à une vraie négociation où il n'est pas sûr d'avoir le dessus (lui aussi est crevé et blessé), le roué marchand va se contenter de faire parler le sorcier ennemi en enchaînant sarcasme, provocation et franches insultes, découvrant au passage qu'il n'est plus dupe de l'heure d'arrivée des renforts mais qu'il semble très pressé de ficher le camp pour autant... L'ennemi tempête, menace d'exécuter les templiers et mercenaires qu'il prétend tenir en otages (et puisque Adira refuse de le croire, fait même trancher deux doigts à Sacrement pour les jeter au fehnri par l'ouverture dans le pierrier). Jusqu'à ce que, à force de l'aiguillonner exprès, le marchand finisse par faire perdre contenance au sorcier et, dans un geste de colère malvenu, étrangle son interlocuteur par magie (dans un style très "Darth Vador", quoique moins spectaculaire puisque sans lévitation, et donc invisible de l'extérieur). Comprenant néanmoins qu'il est en train de ruiner ses chances de se faire ouvrir le passage par des pourparlers, le sorcier colérique fini par relâcher sa prise et, tout en ruminant sa frustration, va faire un tour pour se calmer en shootant dans les gravas pendant que le petit Fehnri tente de retrouver son souffle.

Pendant ce temps-là, Andréas et Hadrien ont abouti à un nouveau plan : s'il ne possède aucun talent magique capable de déclencher l'assommoir derrière le sorcier mais puisqu'il est maintenant en pleine possession de ses moyens, le jeune mage va tenter de contacter Languard où qu'il soit pour demander à l'ergomancien de revenir et de déclencher le piège contre leur ennemi commun. Andréas puise un maximum d'Essence dans le sarcophage pour dépasser la difficulté qu'implique un contact mental vers un mage modérément favorable à une distance inconnue et, avec un peu de chance, parvient à localiser et à atteindre l'esprit du vieux fou... Mais il s'aperçoit bientôt qu'il y a un problème : quoiqu'il ne soit pas très loin, Languard est en fait mort depuis la veille (d'une flèche dans le dos, tirée par un Korme chanceux) et son fantôme ne reste attaché sur le monde matériel que par la proximité de son propre artefact, la fameuse boule d'or rouge dont il tire assez d'énergie pour ne pas s'être encore dissout dans le monde onirique, mais pas suffisamment pour pouvoir jeter un sort. Qu'à cela ne tienne, le lien établi par Andréas semble assez fort pour que, malgré ses faibles aptitudes dans ce domaine, le jeune mage puisse tenter de lui transférer de l'Essence en provenance du sarcophage, afin que Languard puisse activer la boule et piéger le sorcier barbu. Laborieusement, Andréas lui transmet les dernières bribes d'énergie de l'artefact (dont il a épuisé les réserves à force d'y puiser pour soutenir ses propres sorts, régénérer sans cesse sa fatigue, etc. ; l'objet toujours branché sur une importante source extérieure peut évidemment se recharger, mais Andréas a vite compris que cela prendrait plusieurs heures) et le mage-fantôme tente d'abord de localiser l'assommoir... Pour annoncer d'un air dépité que les Kormes l'ont apparemment démonté depuis longtemps ('sont pas débiles, non plus : ils vont pas passer et repasser sous un piège bien visible à l'extérieur de la mine sans penser à le désamorcer). Alors que le sorcier revient d'un pas décidé vers Adira, Hadrien presse Andréas de supplier Languard de tenter quelque chose pour se venger du chef ennemi, n'importe quoi : un éboulement, par exemple, un simple effondrement de la galerie instable... Convaincu par les arguments vengeurs des deux vivants, le spectre accepte de se sacrifier en investissant toute l'énergie qu'il reste dans son focus pour tenter de provoquer un éboulement.

Un long craquement sec retentit alors à travers toute la mine, les tunnels se mettent à trembler et soudain un puissant courant d'air souffle une épaisse fumée par l'ouverture dans la barricade des PJ, celle-ci s'effondre en partie sous la secousse et des rochers de plus en plus gros se détachent du plafond pour tomber dans la galerie d'entrée. Lorsque le calme revient dans la mine, les PJ se précipitent vers la sortie pour découvrir qu'elle est désormais obstruée par un glissement de terrain autrement plus important que tout ce qu'ils peuvent espérer dégager avec leurs maigres outils et une équipe de blessés. « Pas de panique, déclare Hadrien : le capitaine Durgaut est en route pour nous secourir, nous pouvons lui faire confiance ! »

épilogue : "Ah ben ils ont bonne mine..."

Le matin s'est déjà levé sur la Vallée des Lacs en Palier lorsque, après réception du message, discussions variées, tentatives de lever plus de troupes et empaquetage rapide, une cohorte de 10 cavaliers (Templiers et éclaireurs lewyllen) et presque 30 fantassins (templiers, mercenaires, volontaires et... encore quelques éclaireurs lewyllen) franchit le pont au sud de Tal Endhil et prend la route vers la mine d'argent. Pour gagner en vitesse, les bardas sont réduits à un peu de nourriture et l'équipement de guerre, car nul n'ignore monter à l'assaut de la mine pour en briser le siège. Le Capitaine Liméric Durgaut conduit la colonne avec le maquignon venteux Lel'Liamil, le sergent Le Cornu trotte à leur droite et le jeune Eldan "le Moineau", récemment promu "estafette", à leur gauche. Immédiatement derrière eux, le chirurgien-barbier Brumond et Frère Daverom ont emprunté un âne pour les accompagner, jugeant qu'on aurait besoin de leurs soins. Quoiqu'il fasse de plus en plus doux dans la vallée depuis quelques semaines, au point que les pâturage se sont récemment couvert de fleurs jaunes et rouges à la grande joie des Emishen qui en font quasiment une fête, un vent à décorner les bœufs souffle depuis la veille et secoue constamment les sapins où les éclaireurs cavalent autour de la colonne : puisque une troupe de Kormes est dans le secteur, il n'est pas question de se laisser surprendre...

Toute la journée, la colonne grimpe sur le mauvais chemin en lacets, fréquemment réduit à une corniche vertigineuse, et l'hiver semble revenir avec l'altitude : la douceur des plaines fleuries disparaît, des plaques de neige de plus en plus nombreuses et épaisses se rejoignent pour former un tapis blanc uni en fin d'après-midi, sous le vent vif devenu glacé. Au loin, on entend le hurlement d'un loup. Le soir est presque tombé lorsqu'un éclaireur mercenaire déboule sur le chemin pour faire signe d'arrêter la colonne :

« On a trouvé le pont, mon 'Pitaine.
_Et ?
_Les venteux pis nous on tâche de contourner par les falaises, j'ai envoyé un gars sondez les piliers. 
_Pardon ? Le pont a encore été détruit ?!? 
_Heu... non mais... ça sent le piège.  
_Précisez.
_Ben avant, d'après les venteux, y 'avait un p'tit pont en rondins sur le torrent, 'voyez. Pis là c'est devenu... heu... c'est large quoi. Pis c'est tout net, tout lisse, avec une voûte tout' ronde, chef, et même des... 'spèces d'barrières sur les côtés. 
_Des gardes-corps ?
_'Sont sculptés, chef. 
_Laissez-moi récapituler : vous pensez que c'est un piège parce que le pont est... 
_Trop beau pour être vrai, mon 'Pitaine ! »

Il est pourtant vrai, et franchi peu après, la plupart des soldats observant l'ouvrage avec méfiance et circonspection, tant ce large pont au tablier plus lisse que le parquet de l'Auberge du Cygne est incongru en pleine nature sauvage, posé sur un sentier pourri et franchissant un ruisseau de moins de 2m de large dans la lumière rousse du soleil couchant. Le Capitaine lui-même n'y engage son cheval qu'avec une profonde impression de surréalisme et demande :

« Frère Daverom ? Vous qui vous intéressez à l’architecture, qu'est-ce que ça vous inspire ? 
_Une cathédrale, messire ! 
_Pardon ? 
_Heu... Je me disais que si Maître Muraille est prêt à bâtir ce genre d'ouvrage d'art à des lieues du moindre village pour trois mulets et deux chariots mensuels, je pourrais lui demander de bâtir une cathédrale à la place de mon temple au toit de chaume...» répond le vieux prêtre en rougissant de son péché d'orgueil.

Mais ce grand moment d'esthétique est aussitôt interrompu par l'alerte des éclaireurs : « Un géant ! Un géant sauvage vient droit sur nous ! ». L'avant-garde s'organise aussitôt autour de ses chefs pour parer à la charge du monstre furieux... qui trottine vers eux en gémissant et en agitant ses énormes bras dans un geste qui ressemble beaucoup plus à un appel qu'à une menace. Reconnu et bientôt rassuré par Lel'Liamil lui-même (qui le connait et a quelque habitude de cette sorte de bétail), Totor mugit de plus belle et désigne les crêtes avec obstination. Un examen rapide révèle d'ailleurs que le gros singe velu souffre de multiples blessures et plusieurs flèches s'accrochent encore à sa fourrure : pas question de camper maintenant, il faut foncer. La suite de la route est faite presque au pas de charge, dans une hauteur de neige qui double soudain après un lacet : la colonne vient de s'enfoncer dans la coulée récente d'une avalanche.

Et il fait donc déjà nuit noire lorsque, à la lueur d'une torche, un éclaireur découvre deux corps sur la rive enneigée du torrent que longeait la troupe depuis une demi-heure, faute de pouvoir distinguer un chemin : Si le mercenaire Six-Pièces est encore en vie, quoique inconscient, à moitié noyé, gelé, une jambe brisée et une épaule démise par sa chute dans le ruisseau les mains liées dans le dos, Jarell Sacrement, amputé de deux doigts et démoli comme s'il avait été passé au pilon, n'est reconnu que par sa tenue et sa chainette de chevalier du temple. Il faut encore plusieurs minutes aux hommes de Durgaut pour confirmer que, malgré les apparences, le large pierrier couvert de neige où la colonne s'est arrêtée est en réalité le site de la mine.

« Mais... vous êtes sûrs ? 
_On a trouvé des débris de l'enceinte et les briques d'un haut-fourneau, mon 'Pitaine. On est encore en train de dégager des cadavres de partout mais on manque de torches. 
_Il a du y avoir un glisement de terrain, Messire, explique Daverom : on dirait bien que tout un pan de la falaise s'est effondré d'un coup sur le fortin il y a moins de 24H... 
_Par les pères. 
_Un campement, on a trouvé un campement à 200m au sud de l'éboulement ! 
_Nos gars s'en sont sortis ? 
_Heu.. non, mon Capitaine : on pense que c'était un campement korme mais il a été abandonné.
_Bordel ! 
_Mon Capitaine, on y a trouvé Cylien Brûlé, Bouc et le chevalier Conrad de Mélanque, ils étaient... haem... suspendus à des branches basses et... écorchés. Et décapités. Mais on croit bien que c'est eux...»

Dans les heures qui suivent, les éclaireurs commencent à retrouver quelques chevaux inquiets mais vivants, les débris de la roulotte d'Adira-au-Géant (sur laquelle Totor pleure à grosses larmes) et d'un chariot lewyllen, les vestiges d'un fortin récent (sa charpente fraîchement découpés n'avait même pas eu le temps de prendre l'humidité), des carcasses d'autres chevaux, les corps massacrés d'au moins une dizaine de Kormes et presque autant de membres de l'expédition : des mineurs, deux lewyllen que seuls leurs insignes tribaux permettent d'identifier (dont un guerrier en armure d'écailles que Lel'Liamil ne parvient pas à reconnaître, quoiqu'il soit sans doute comme lui de l'Aile du Silond), le métis fehnri que les mercenaires surnommait "le Noiraud", trois templiers dont les blessures avaient été pansées peu avant qu'ils ne meurent ensevelis...

Le Capitaine fait dresser le camp à courte distance en aval et, lorsque Six-Pièces reprend brièvement conscience, il parvient à expliquer par bribe que Mérane, les Muraille et plusieurs autres s'étaient retranché dans la mine lorsque la falaise s'est écroulée en emportant le campement fortifié avec elle : ainsi protégés dans la galerie, il est possible qu'ils aient survécu à l'avalanche. "Loué soit Herem" ajoute-t-il avant de s'évanouir à nouveau, à la grande surprise des autres mercenaires qui ne lui connaissaient guère de piété.

À la lueur des flambeaux improvisés de pin et de résine, les recherches continuent toute la nuit jusqu'à ce que, peu avant l'aube, un Totor déchaîné attire l'attention de la troupe en déblayant frénétiquement à ras de la falaise, ouvrant peu à peu un puits instable dans l'épaisse couche de rocs et d'éclats de pierres qui remplit désormais la combe où devait se trouver le camp de mineurs.
Et bientôt, une voix éraillée mais reconnaissable sort de ce fameux trou : « Brave Totor ! Continue ! Ça c'est le bon géant à son papa ! » Autour du géant, tout le monde fait (prudemment) la chaîne pour évacuer les rochers que le grand singe dégage derrière lui sans regarder, puis il plonge soudain son bras au fond du trou et, aux cris de « Mais aaaaarg ! Aïe arrête gros couillon, c'est pas assez large, aïe merde ! », déterre soudain un Adira couvert de poussière, de suie, de coupures sanglantes et aveuglé par le pâle éclat du petit matin.

Un à un, les fils Muraille et leur architecte de patriarche s'extirpent à leur tour par l'ouverture agrandie, bientôt suivis par Andréas qui aide Mérane, deux lewyllen dont l'éclaireur Sifenen Arlan ("Ombre d'un Oiseau") à qui Lel'Liamil avait confié la responsabilité de ses "palefreniers", un templier hâve et le bras en écharpe, deux autres plus ou moins éprouvés et blessés et, en tout, seulement 6 des 15 mineurs qui ont quitté Tal Endhil avec l'expédition, six jours auparavant.

Et à la consternation des sauveteurs, plusieurs des rescapés tombent à genoux autour d'Adira Pratesh et entonnent avec lui un chant religieux...