1) "La Bataille de Tal Endhil"

De Marches du Nord
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Prologue

Aux premiers jours du printemps, lorsque la neige et la glace qui immobilisent toute la région 5 mois par an commence enfin à fondre, l'état-major impérial envoi vers les communautés isolées des caravanes composées de troupes fraîches escortant des chariots où s'entassent les produits de première nécessité, souvent accompagnés d'intrépides marchands indépendants venus vendre à prix d'or tout ce dont manquent les colons. Parmi ces "caravanes printanières" qui ré-ouvrent au passage les routes crevassées et boueuses du Nord, l'une des plus prisées est celle vers Tal Endhil, une lointaine colonie fortifiée dans la région des grands lacs. En effet, possédant une auberge presque confortable et la seule taverne "conviviale" à des 10aines de lieues à la ronde (alcool, musique, jeu et filles accortes), situé au carrefour d'une importante mine d'argent, d'exploitations agricoles variées et du réseau fluviale s'étirant des montagnes jusqu'à la mer, Tal Endhil rassemble au début de chaque printemps une sorte de grande foire internationale du commerce, de la magouille politique et de l'espionnage...

Cette année, la caravane comporte 3 "patrouilles" de 10 mercenaires (des vétérans qui relèveront à l'arrivée la petite garnison hivernale de la colonie) escortant 6 équipages marchands (totalisant une 20aine de négociants, muletiers, conducteurs d'attelage, serviteurs et apprentis, des chariots bien pleins et des mules rétives) où se distingue la silhouette caractéristique de deux "géants". Parmi tout ce beau monde crapahutant laborieusement parmi les forêts vallonnées en cours de dégel, se distingue quelques personnages remarquables :

  • le marchand fehnri Adira Pratesh qui a su se mettre dans les petits papiers de l'état-major, et profite ainsi de la protection du convoi pour venir tôt au Marché de Printemps. Sa roulotte pleine à craquer tirée par un géant, "Totor", est connue dans toute la région.
  • son cousin de la ville, Vighnu Pratesh, est officiellement son garde du corps et fait la route pour la première fois. Quelques bisbilles à Duriane l'ont décidé à se mettre au vert et, ça tombe bien, Adira est sur un coup fumant mais qui pourrait être dangereux...
  • le Capitaine Liméric Durgaut qui vient d'être affecté pour un an à Tal Endhil. Si sa mission se résume initialement à défendre l'endroit au mieux et assurer que minerai d'argent et chevaux dressés soient régulièrement envoyés à l'état-major, ses subordonnés ont jugé utile de le prévenir que le lieutenant Armeld, qui tenait la place avant lui, est mort bizarrement il y a quelques semaines.
  • le sergent Esic le Cornu, second du précédent, a assemblé autour de lui une patrouille mercenaire disparate mais efficace, dont :
  • l'éclaireur autochtone Nevel Sholdanan qui, par ses talents de pisteur et d'archer comme par sa loyauté à ses compagnons d'armes, a su se gagner une réputation de fiabilité rarement accessible à ceux de ses semblables qui choisissent de travailler pour l'occupant.
  • Bahardabras "le Hornois", redoutable "Lame d'Airain", l'élite guerrière du royaume déchu de Horne, dont les rares survivants servent de troupes de "contre-guerilla" dans l'Armée du Nord. Issu d'une culture violente et moralement rigide, musculeux et équipé d'un armement très supérieur à ce qui se fait dans l'Empire, il fait peur à tout le monde.

(Note : Mérane "Roulier" et Eldan "le Moineau" étaient aussi présents mais, à ce stade de la campagne, seulement comme PNJ.)

Première Séquence : "Sur la route"

Il y a maintenant huit jours que le convoi a quitté la forteresse de Bragone, point de passage obligé entre l'Empire et le Pays des Vents. Vite arrivés au bout de la grande route de pierres bâtie par les anciens, les caravaniers peinent depuis sur une mauvaise piste qui semble uniquement faite de cailloux glissants et de boue glaciale, serpentant entre les collines partiellement enneigées et les sombres forêts de conifères. En dehors du solide sergent et du marchand fehnri (qui, ayant délégué la conduite à son cousin, paresse dans sa roulotte en recomptant ses stocks), le froid et la marche ont épuisé même l'éclaireur emishen, Nevel, qui part sans cesse en reconnaissance sur son petit cheval, prêtant attention au moindre signe de danger. Mais c'est sans doute le nouveau capitaine qui souffre le plus des conditions et peine en queue de convoi.

Scène 1

Une lourde pluie s'abat sur la fin d'après-midi et le ciel est si sombre qu'on envisage d'allumer des lanternes. Alors que la caravane a ralenti pour attendre le rapport de Nevel, parti reconnaître la zone rocheuse -fort propice aux embuscades- qui les attends après le virage, le Hornois qui en a plein les pattes décide de s'assoir un instant pour astiquer ses armes, qui n'aiment pas le gel [c'est une de ses Réactions]. Il n'a que le temps de les déballer, le dos à la forêt, qu'une méchant flèche lui transperce l'omoplate ! Blessé mais très énervé, il donne l'alerte et part en courant sous les arbres pour déclencher les représailles [une Réaction "Violence", histoire de récupérer quelques points avant la baston]. Le sergent prend immédiatement les choses en main : évaluant la situation tactique d'un seul coup d'œil (c'est sa spécialité), il repère deux dizaines d'archers progressant chacune d'un côté de la route, un peu en avant du cortège, et comprend que l'embuscade s'est déclenchée trop tôt (on les attendait un peu plus loin, sans doute aux rochers, mais les Kormes ont souvent la "Haine des Hornois" et l'un d'eux n'a pas su résister...). Il donne alors immédiatement l'ordre de se foncer se mettre à couvert dans la forêt, côté ouest [gros succès de commandement, ses hommes réagissent au quart de tour et bénéficieront désormais d'un bonus de deux pions tant qu'ils suivront ses ordres, ça vaut notamment pour Nevel -à peine arrivé- et Bahardabras -puisqu'il exécute les mêmes ordres et qu'il y a désormais une 10aine d'hommes qui suivent son exemple].
Pendant que le capitaine ordonne à l'arrière-garde de filer dans les bois pour accrocher au contact les archers sur leur flanc droit (à l'est), une première volée de flèches frappe l'avant de la colonne et, malgré la distance, 6 des mercenaires du sergent Le Cornu sont immédiatement mis hors de combat.

Le capitaine Durgaut remonte alors le convoi au pas de charge en ordonnant aux marchands de se planquer sous leurs chariots et se prend au passage une flèche de la deuxième volée, fauchant 2 autres soldats sur le flanc gauche.
Mais en arrière, deux autres projectiles ont frappé un jeune géant que deux frères emmenaient pour le vendre à Tal Endhil : la bête secoue ses chaînes, envoie valdinguer ses propriétaires et s'enfuit dans la forêt en gémissant (les géants d'élevage sont spécialement peureux). Alors que Nevel vient de sauter de cheval et riposte à l'arc tout en scrutant les ombres qui se déplacent d'arbre en arbre, le sergent prend soudain conscience que les hommes à qui il ordonnait de manœuvrer sont déjà à terre et agonisants. Après un instant de désespoir pour ses jeunes gens qu'il avait formé lui-même [jolie mise en scène de sa Réaction "Vieille Garde"], il rejoint le Hornois, suivi par le capitaine.

A l'arrière du convoi, planqué sous la roulotte, le cousin Vijnu observe le combat et essaye en vain de convaincre Adira, qui n'a pas bien pris la mesure des évènements, de rester à l'abri. Mais une fois son brave géant Totor calmé et à couvert, le marchand s'arme d'une grande poêle à frire et entreprend de rattraper l'autre géant, celui qui s'est enfuit par l'est [Réaction "Jouer avec le Feu"]. Un projectile le frôle d'ailleurs, tintant sur l'ustensile : "T'inquiète, j'peux parer les flèches !" déclare-t-il avant de s'élancer.
Rageant de voir son inconséquent cousin disparaître parmi les arbres et bien conscient que leur escorte est en train de se faire trucider sur les pentes ouest, il profite de la faible visibilité pour se glisser à son tour entre les sapins...

De son côté, Nevel a pris le temps de "Sentir les Vents" (dans une région où ils soufflent constamment, les archers autochtones apprennent vite à en tenir compte*), déduit le meilleur endroit pour tirer sur la colonne (ou crier des ordres) et repère ainsi le chef des rebelles, dirigeant ses hommes depuis un bouquet d'arbres au nord-ouest [manœuvre tactique pour s'approprier les "conditions" du Duel : l'éclaireur gagne quelques pions de bonus en "prenant" le vent pour lui, qu'il pourra utiliser en attaque comme en défense]. Malgré les traits qui continuent de siffler autour de lui, il s'avance vers le Korme, se place dans l'axe du vent et tire une flèche entre les troncs pour le débusquer [une petite manœuvre pour détruire la protection adverse], mais rate sa cible, pourtant à découvert désormais. Le chef ennemi riposte à son tour, mais les bourrasques sont en faveur de l'éclaireur qui évite plusieurs tirs.

Grâce à la qualité de son armure, le Hornois encaisse plusieurs coups sans dommages, maintenant que les adversaires ont échangé leurs arcs contre de courts falcata. Quelques pas derrière lui, le jeune capitaine cogne sur un autre rebelle, mais Le Cornu est en difficulté : déjà blessé par une flèche, un Korme musclé de partout vient en plus de lui planter sa lame dans le flanc. Mais c'est sans compter sans la ténacité du vieux sergent qui s'accroche à l'arme adverse [Manœuvre qui immobilise une partie de la mise du gros musclé]. A force d'acharnement (et de points d'Histoire), le vétéran pourtant à genoux et gravement blessé, maintient sa prise, tout en enfonçant sa propre épée, pouce par pouce, dans les tripes de son adversaire.
Mais le plus grand danger vient d'un autre korme qui, lance en main, fonce vers le sergent pour aider son compagnon. Sauf qu'il pousse soudain un cri de souffrance, lorsqu'une large plaie s'ouvre dans son dos. Se retournant vivement pour se défendre, le lancier surpris ne voit que des ombres... mais commence à se sentir tout drôle. Bien que misant tout sur la défense et scrutant la forêt en vain, il sent que ses jambes se dérobent sous lui et commencent à s'inquiéter vraiment.
[De la même manière que Nevel a conquis les vents, Vighnu a gagné des pions de camouflage/obscurité, immédiatement misé sur une énorme défense et se ballade maintenant à l'insu de tous en distribuant des coups de dague empoisonnée (les poisons sont sa principale Ressource), manœuvrant à chaque fois pour disparaître avant que sa cible ne riposte...]

Pendant ce temps dans la forêt, Adira Pratesh a renoncé à galoper derrière le gros couillon qui court à toute vitesse et se retrouve tout seul parmi les ombres. Lorsqu'il entend des bruits de combat et des cris de douleurs vers le nord, il commence à réaliser qu'il risque à chaque instant de tomber sur une brute korme et qu'il n'est pas certain de pouvoir s'en défaire à coups de poêle... Il choisit donc de se faire discret et, progressant parmi les buissons, découvre bientôt le groupe de mercenaires victorieux (prenant les archers à revers, ils ont massacré l'ennemi sans aucune perte), leurs armes rougies du sang des archers, qui redescendent maintenant prêter main forte à leurs officiers : "J'peux venir avec vous ?" demande Adira, peu rassuré.

Ayant défait son opposant et puisque les kormes semblent se replier, le vaillant officier Durgaut se rue vers son héroïque second et, après avoir achevé le musculeux nordique déjà à moitié empalé, il se penche sur le sergent sans prêter attention à un lancier Korme qui agonise dans les buissons la bave aux lèvres. Esic le Cornu est dans un "État Critique" et n'étant pas médecin, le capitaine ne sait pas quoi faire. [Le sergent a donc dépassé sa Limite Vitale, pourtant considérable, et devrait désormais réussir un jet contre son score de Blessure (13 !) à chaque scène pour ne pas perdre son dernier jeton et mourir... en ne misant qu'un seul pion, cela signifie qu'à moins d'enchaîner les doubles 6, il est foutu. Comme en plus, le joueur doit partir, ce serait le bon moment de laisser partir dignement ce perso mais...]

Refusant de perdre son héroïque aide de camp, notre brave officier va tout miser sur un énorme jet de Commandement : "Sergent, je vous interdit de mourir !!! Vous m'entendez ?! Je vous interdit de crever sur le bord de la route alors que les hommes ont besoin de vous !"

Alors que la plupart des archers survivants se replient au delà des crêtes boisées, Nevel entend bientôt la cavalcade (portée par les Vents) d'une dizaine de chevaux fonçant vers eux depuis le nord, distinguant quelques flammes à travers le rideau de pluie. Le plan des kormes ayant tourné court, ceux qui attendaient aux rochers ont sauté sur leurs montures et foncent vers les chariots avec des lances incendiaires.
L'éclaireur appelle ses camarades et vise soigneusement la première silhouette qui émerge de la pluie, décoche et abat le cheval qui s'effondre sur la route, son cavalier est violemment projeté dans les buissons et sa lance enflammée est noyée dans la boue.
Le Hornois, qui démembrait son adversaire vaincu pour se passer les nerfs [Réaction "Violence", encore], dévale alors la pente en dégainant son "Étoile d'Airain"**, avisant un second cavalier qui, après avoir éviter le cheval abattu en travers de la route, vient de planter sa lance enflammée dans le chariot de tête : le fourgon s'enflamme comme un fétu de paille malgré la pluie. Bahardabras lance son arme étrange à toute volée et démonte le korme qui s'effondre dans la boue du chemin.
Le cavalier suivant réussi à incendier le second chariot avant de prendre une flèche dans le bras, tirée par Nevel, et Vijnu jailli soudain d'un arbre pour se jeter sur le quatrième : il parvient à peine à s'agripper derrière le cavalier que celui-ci lui colle un grand coup de coude qui envoie bouler l'assassin [tous les dommages de l'attaque sont placés en Choc et, comme ils excèdent son score de Physique, suffisent à "déséquilibrer" le fehnri : les joueurs ont alors bien retenu la leçon et emploieront désormais la technique à leur avantage].
Nevel décoche plusieurs flèches (en vain) et Bahardabras tente à son tour d'arrêter l'incendiaire, qui lui jette sa lance, aisément esquivée (au moins une qui n'incendiera rien).
Le capitaine qui rejoignait la caravane réalise que si les vivres à destination de Tal Endhil devait être détruites, la colonie serait condamnée à la famine d'ici la prochaine récolte (à l'automne), ses greniers étant généralement vides au printemps. Durgaut jette un rapide coup d'œil au chariot de matériel militaire pour vérifier qu'il n'est pas touché (il contient, à l'insu de tous, une véritable fortune pour couvrir la solde de la garnison d'hiver depuis 6 mois et celle des troupes fraiches jusqu'aux moissons), rassemble les vainqueurs du flanc droit et entreprend d'éteindre les incendies, avant que le convoi ne devienne un fiasco total. Bien que les Kormes utilisent manifestement une sorte de poix (?!), les mercenaires saisissent des pelles et commencent à jeter neige et boue sur les flammes [opposition de groupe contre un feu Ech*1, assez vite "vaincu"].
D'autre cavaliers continuent de charger malgré les défenseurs (plus qu'à moitié occupés à éteindre les flammes). Durbaut tente en vain d'en démonter deux et esquive leurs ripostes, mais les Kormes boutent le feu à deux autres chariots, paniquant les mules qui portent le grain pour Tal Endhil : rompant leurs longes, elles s'enfuient à leur tour dans la forêt et ne seront pas rattrapées. Le Hornois, qui a désormais un compte à régler avec l'un des Kormes, se juche sur un chariot encore fumant en brandissant son épée et en criant des imprécations. Arrivé au bout du convoi, son adversaire a fait volte-face, laissant la plupart des autres cavaliers s'éloigner au galop vers le sud, et dégainant son épée charge tout le long de la caravane : le choc avec le Hornois est terrible, celui-ci est éjecté du chariot et sonné par l'atterrissage...mais le Korme, décapité, s'écroule quelques mètres plus loin [voilà ce qui se passe quand deux bourrins ayant la même Priorité mettent tout en attaque].

Le dernier cavalier, seul en queue de colonne mais une flèche dans le bras, a tiré son épée et s'avance vers la roulotte des Pratesh, effrayant le pauvre Totor qui se couvre la tête en mugissant. Voyant cela (et se méprenant sur les intentions du Korme, qui s'intéresse en fait au chargement), Adira se glisse derrière la monture, brandit sa poêle à frire et en frappe de toute ses forces la croupe de l'animal, à l'instant même où le cavalier mettait pied à terre.
Le guerrier est jeté à terre, sonné par le brusque cabrer du cheval et son départ au galop, et le marchand se jette sur lui... mais même dans sa situation, le Korme parvient aisément à parer les coups de poêle, à se relever et à grièvement blesser le pauvre marchand [dont la Limite Vitale est très basse], qui s'écroule illico en saignant abondamment et en appelant à l'aide.
Heureusement, le Hornois accourt en hurlant et le rebelle renonce à achever le fehnri pour se préparer à encaisser la charge d'un Bahardabras déchaîné : les deux guerriers font sonner le fer, rendant coup pour coup jusqu'à ce que, soudain, le Korme s'écroule sous le sabre de Vighnu.

Scène 2

Sans plus de commentaires (malgré les remontrances du Hornois qui voulait finir son duel), il tire un sac de la roulotte, s'agenouille auprès de son cousin et entreprend de le soigner, très efficacement d'ailleurs. «Mais... vous êtes médecin ?!» interroge le capitaine arrivé en hâte, «J'ai quatre soldats blessés et un sergent qui agonisent là-bas, et vous n'avez rien dit ?!!».
Vijnu, nullement ému, envisage brièvement de négocier ses talents mais un seul regard réprobateur de son cousin à peine rafistoler lui suffit pour comprendre que -très exceptionnellement- l'heure n'est pas aux affaires. Il rafistole rapidement les 4 mercenaires mais constate vite qu'il ne peut rien pour le sergent, plus qu'à moitié éventré et maintenant dans le coma... Mais s'il tient jusqu'à Tal Endhil, qu'on peut espérer rallier en moins de deux jours à marche forcée, il y a là-bas un chirurgien-barbier et de quoi opérer plus efficacement : avec l'aide de Vijnu et de ses remèdes exotiques, Le Cornu a encore une chance...
Dans tous les cas, il n'est pas question de traîner : la région n'est manifestement pas sûre, les voyageurs très affaiblis et une seconde attaque leur serait certainement fatale.

Alors que la nuit tombe, le compte des pertes est rapidement fait : 3 civils (un muletier, un marchand, un apprenti) et 14 mercenaires sont morts, 6 autres personnes sont sérieusement blessées, un chariot a été entièrement détruit par l'incendie, trois autres sérieusement endommagés, le jeune géant et 4 des 8 mules ont pris la fuite et environs un tiers des marchandises a brûlé ou été gâté par les efforts des pompiers amateurs... Au moins une quinzaine d'ennemis ont par contre pris la tangente à cheval, dont leur chef, et rien ne dit qu'ils ne reviendront pas.
Le convoi est rapidement ré-organisé, les morts entassés dans une carriole, les Fehnri ramassent quelques armes pour compléter leur inventaire, le Hornois récupère son Étoile plantée à travers la bouche du cavalier, on allume des torches et lorsque Nevel revient de sa reconnaissance en annonçant que l'ennemi a filé depuis longtemps et que la route est dégagée, la caravane repart.

Scène 3

Malgré l'épuisement et les blessures, le convoi avance sans répit : se relayant pour conduire les attelages, les Pratesh prêtant Totor chaque fois qu'un chariot s'embourbe ou peine à franchir une colline, mangeant et dormant en marche dans les véhicules bringuebalant sur la route, le capitaine encourageant tout le monde et même le fier Hornois poussant lorsque c'est nécessaire, les caravaniers forcent l'allure pendant deux jours et deux nuits...
[Techniquement, c'est une Course en aveugle : Mithrandir/Durgaut fait des jets pour toute la colonne, fonçant de son mieux sur une Distance connue, mais sans savoir du tout si le sergent tiendra ni si les Kormes vont revenir entretemps. Le capitaine mise donc à fond, dépense notamment un point d'Histoire et fini par consommer toute la Distance...]
Le second jour, alors que le soleil disparaît déjà derrière les hautes montagnes, la caravane épuisée atteint enfin le village lacustre de Tal Endhil, dont le portail de bois s'ouvre grand devant eux : la colonie toute entière semblant s'être rassemblée pour les accueillir, des inconnus d'au moins trois peuples les pressent de questions, assistent les blessés et barricadent la porte derrière eux.
Un sergent mercenaire vient alors à la rencontre du capitaine et lui explique que, depuis deux jours, le village est assiégé !

Bilan

Fin de la séquence, tout le monde récolte 1 point d'Histoire, plus un pour le capitaine qui a réussi à gérer la bataille, sauver les provisions, garder Le Cornu en vie et à amener tous les survivants à bon port.

Deuxième Séquence : "Bienvenue à Tal Endhil"

Alors que la nuit tombe sur le village et que les autres caravaniers s'écroulent à "l'Auberge du Cygne", dont la grande salle est pleine de curieux, de chefs en grande discussion et de résidents inquiets, Vijnu et le capitaine ont encore du pain sur la planche...

Scène 1

L'assassin-médecin et le chirurgien-barbier nettoient rapidement une table à l'auberge, y installent le sergent agonisant et rassemblent le matériel essentiel. Sous les yeux du public horrifié et fasciné, l'opération commence. [Vijnu étant en réalité le plus compétent, c'est lui qui fera le jet principal, son collègue se cantonnant au jet de Préparation (installer tout le nécessaire pour avoir des bonus) et à un jet de soutien (Diff/2, mais Bonus/2). Au final, le Fehnri totalisant un bonus de +5 parvient à vaincre l'énorme Difficulté des soins et sauve le sergent.]

Une fois recousu mais toujours inconscient, Le Cornu est installé dans une chambre et les deux toubibs se font offrir des chopines : la renommée du brave sergent est telle que, en le sauvant, les PJ viennent de sérieusement redorer leur blason.

Scène 2

Pendant que ses hommes prennent enfin le temps de se délasser, le capitaine, lui, n'a pas encore eu la chance de s'assoir : le sergent Boren, qui dirige la garnison locale depuis le décès du lieutenant Armeld, a énormément de chose à lui expliquer... et un donjon à lui montrer : en arrivant au pied de la petite tour carrée de 4 étages (deux en pierres, 2 en bois dépassant des murailles), il constate que tout le dernier niveau est une ruine calcinée, ainsi que la partie du rempart surplombant la porte nord, accolée à la tour. La "porte" elle-même est d'ailleurs pour l'instant barricadée de pierres et de tonneau, les battants ayant partiellement brûlés.

«C'est les Kormes, mon capitaine : il y a deux jours, juste avant l'aube, ils ont attaqué la porte avec des flèches enflammées et un bélier. On les a repoussé avec l'aide des colons(*), mais j'ai perdu 9 soldats.

-Merde ! Combien il en reste ?

-Six, mon 'pitaine.

-Vous n'avez que six hommes pour garder toute l'enceinte ??!!

-Heu... non, y a les trappeurs "venteux" qui s'sont portés volontaires, ça fait une 20aine d'archers en plus, mais... heu... on sait point si qu'on peut leur faire confiance, mon 'pitaine. Certains sont sûrement de mèche avec les Kormes.

-Bon, je vais me pencher là-dessus. Vous, il faut me réparer cette porte de toute urgence ! Vous avez le bois nécessaire ? C'est déjà miraculeux que l'ennemi n'ait rien tenté depuis deux jours...

-Heu... mon 'pitaine, 'faut qu'je vous explique : pour le bois, à la fin de l'hiver, on est un peu court, voyez... Alors après l'attaque, on a envoyé des gars en couper dans la forêt avec une petite escorte de venteux, passqu'on s'est dit que les rebelles 'z' attaqueraient pas leurs frères, mais ils ont été attaqués quand-même. Y a quat' venteux qui sont morts et les autres i' sont rentrés sans l'bois...

-(soupir) Et mon prédécesseur, il est mort comment ?

-Accident d'abattage, mon 'pitaine : écrasé par un arbre, y a près de trois semaines.

-Quoi ?! Mais pourquoi il jouait les bûcherons, ce con ?

-Ah ça, mon 'pitaine, j'avoue qu'on sait point : i' est parti tout seul dans la forêt avec une hache en disant qu'il avait un truc à faire, pi' comme on l'voyait point revenir, j'ai mandé deux gars pour l'chercher et i'l'ont trouvé aplati sous un arbre. Alors j'ai envoyé un pigeon à l'état-major, pi' on vous attendait.

-Et vous, ça vous paraît pas un peu louche sur les bords ?

-Dame oui, mon 'pitaine, mais j'vois point ce qu'on pouvait faire à part que de l'enterrer. Heu, mon 'pitaine, y a des gens qui arrivent, fallait qu'j'vous cause de ça aussi...»

[Cette Scène de "repos" (aucun jet à faire), malgré les mauvaises nouvelles, permet au 'pitaine Durbaut de récupérer un peu d'Énergie : ça tombe, bien, il va en avoir besoin.]

(*)Presque un tiers de l'Armée du Nord est composée de Rémans aspirant à la propriété et qui reçoivent un lopin de terre au Pays des Vents après avoir combattu cinq ans. Comme ils disent eux-mêmes : "Battez-vous cinq ans pour l'avoir et toute votre vie pour le garder". Mais de fait, il y a dans chaque famille de colons au moins un type avec 5 années d'expérience militaire.

Scène 3

Autour d'eux, une petite foule d'habitants se sont rassemblés pour entendre les décisions du nouveau chef, mais plusieurs personnes semblent vouloir faire plus qu'entendre.

Une jolie quadragénaire à l'air franchement furieux, accompagnée d'un grand costaud avec une arbalète (une merveille technologique comme les impériaux en voient rarement !), se présente avec froideur comme étant Ranyella, cheffe des bateliers Kerdans. (Les Kerdans sont un peuple de marins originaires d'un archipel sans grandes ressources naturelles, et qui commercent donc à travers tout le monde connu pour approvisionner leur mère-patrie. Dans la région, ils établissent de petits comptoirs sur la côte puis remontent les fleuves en convois pour échanger leurs nombreuses marchandises exotiques contre les productions locales. Si les Rémans (comme les Hornois) sont férocement patriarcaux, Kerdans et Emishen sont égalitaires : lorsque les misogynes doivent négocier avec une femme, c'est souvent compliqué... Mais notre brave capitaine, issu d'un milieu marchand et très bourgeois, est plutôt large d'esprit et connaît à peu près les coutumes internationales, ce qui va souvent lui servir tout autant que son talent "Décourager les polémiques" (il n'a pas été affecté à Tal Endhil par hasard).

Et si Ranyella est furieuse, c'est parce que le sergent Boren a mis au cachot l'Érudit Ordano -le membre le plus éminent de la communauté kerdane. Sommé de s'expliquer, le sergent mercenaire raconte que, après l'attaque des kormes, il a voulu armer la population, que les kerdans ont amené un plein stock d'armes mais qu'ils en demandaient une somme que personne n'a en poche, à Tal Endhil. Les colons se sont énervés, il y a eu des menaces et de la bagarre des deux côtés, les Kerdans ont sauté dans leurs barques pour partir et Boren a pris leur Érudit en otage pour les forcer à rester. Maintenant, les Kerdans (dont les barges, amarrées aux maisons sur pilotis des Emishen, formaient par ailleurs l'enceinte "lacustre" du village) se sont ancrés au milieu du lac et refusent de négocier tant que leur Érudit est au cachot.

«Merde ! Et les autres là, vous êtes qui ?

_Moi je suis le chef des trappeurs emishen et mes hommes partiront si vous ne libérez pas l'Érudit.

_Nous on r'présente les colons pi' on réclament des armes pour nous défendre.

_Et moi je suis Maître Gaster, représentant des marchands de Tal Endhil, et je vous ferais remarquer que votre sergent Boren a envahi une auberge, réquisitionné des vivres et du matériel qui ne lui appartiennent pas, et que tout ça n'est pas gratuit... »

L'officier Liméric Durbaut, avec une bataille et deux jours de marche forcée dans les pattes, prend le temps de respirer et, soutenu par Nevel et le Hornois (qui l'un tente de calmer le jeu et l'autre joue l'intimidation), entame les négociations par la libération immédiate de l'Érudit.

[C'est un Duel oratoire en groupe, impliquant 3 camps : les militaires, les Kerdans et leur amis Emishen, les marchands. Les colons, eux, comptent comme une Position à conquérir, de même que la menace qui pèse sur le village... Des pions que le capitaine va s'approprier d'entrée de jeu, profitant du prestige que lui confère le sauvetage d'Esic le Cornu auprès des locaux (la Réputation du sergent a tout simplement été transférée au capitaine). Ayant aussi gagné des pions avec la libération d'Ordano et la proposition de payer les armes kerdanes (quoiqu'à moitié prix), il arrive à prendre la tête du Duel... et se désengage immédiatement.]

Après une âpre négociation et un peu de calcul mental, le capitaine pioche dans le trésor que lui a confié l'état-major pour acheter les armes kerdanes et les distribuer aux colons (hop, une 15aine de fantassins en plus), arrangeant au passage ses affaires avec les chasseurs emishen (évitant donc de perdre les 20 archers) et ses relations avec les marchands, à qui il parvient à faire admettre qu'un petit manque à gagner vaut mieux que le pillage de leurs marchandises par les kormes, la perte définitive du marché local et sans doute de leurs vies au passage. Alors oui, si une fois le village sauvé certains ont encore la mesquinerie de présenter une facture, l'Empire sera ravi de faire les comptes avec eux. Mais en attendant, tous ont vivement intérêt à participer à l'effort de guerre.

«Sur ce, Mesdames et Messieurs, j'arrive de 10 jours de marche depuis la forteresse de Bragone, j'ai été blessé dans une bataille qui m'a coûté la moitié de mes hommes, il se fait tard et j'ai un siège à gérer : il FAUT que je me pose.»

Scène 4

Les deux Fehnri ont gagné le quartier lacustre et se sont glissés discrètement de passerelles en pontons, parmi les huttes emishen, pour atteindre le véritable but de leur visite à Tal Endhil : "la Taverne Penchée".

Lieu de plaisirs monnayables et de rencontres interlopes qui s'enfonce chaque année un peu plus dans le lac (comme une bonne partie des plateformes du quartier), son nom lui vient bien sûr de son inclinaison notable et du léger roulis qui s'y fait sentir. Ce soir-là, la salle bondée grince de toutes ses planches sans trop déranger les joueurs de dés et les buveurs, mais Adira n'est pas là pour s'amuser. Vijnu -qui surveille les clients et les issues la main sur la poignée de son sabre- ignore encore quel est exactement le "gros coup" que prépare son cousin et c'est avec surprise qu'il le suit à une table où 4 Emishen patibulaires ont gardé leurs couvre-chefs... (Si le Peuple du Vent porte systématiquement les cheveux très longs, les rebelles Kormes des deux sexes se rasent le crâne : les joueurs ont donc vite compris qu'un Emishen qui porte un capuchon est au minimum "suspect".)

Parmi eux, une jeune femme au regard dur fait signe à Adira de s'assoir : «Bonsoir, Homme du Sud. As-tu apporté ce que j'attends ?

_Oui, oui, mais pas sans mal : on a fait une mauvaise rencontre...

_Personne n'a touché à ta roulotte. Nous pouvons donc procéder à l'échange. (Vijnu réalise à ce moment-là que son incorrigible cousin ravitaille Etayn-la-Louve, cheffe rebelle de la région des lacs, et donc les gens mêmes qui ont failli les massacrer l'avant-veille : l'assassin lâche un gros soupir.)

_Certainement, certainement mais... c'est assez volumineux. Et il faudrait être discrets.

_Si tu veux... (Étrangement, les quatre Kormes font en effet peu d'efforts de discrétion : la perspective de bientôt raser le village ?) Deux pirogues t'attendront sur la berge près de la muraille sud. Dans une heure.

_Houlà, c'est à dire que faudrait pas que ça se remarque et qu'il y a plein de monde autour des chariots, là. Laissez-moi un peu de temps pour éloigner ma roulotte et...

_Dans une heure, Homme du Sud. Vas, maintenant.»

Scène 5

Le brave capitaine a juste eu le temps d'une brève collation à l'Auberge du Cygne («J'mets ça sur votre ardoise...») qu'il avise Aenid Lamdan, chef des trappeurs emishen, et lui demande un entretien privé. Comme cet établissement aussi est plein à craquer, ils sortent dans la rue, suivi par le Hornois qui développe, doucement, un léger intérêt respectueux pour son nouvel officier. Liméric Durbaut veut en apprendre plus sur cet homme si proche des bateliers kerdans et qui lui prête généreusement ses archers, espérant au passage recueillir quelques informations sur "l'accident d'abattage" du lieutenant. Le type n'est guère causant, mais le Réman comprend vite que si les trappeurs ne représentent qu'une petite fraction de la communauté "venteuse" qui habite les pilotis, les volontaires n'ont en réalité pas de hiérarchie : ils sont sur les remparts parce qu'ils pensent que c'est important (les trappeurs sont plus que les autres liés aux marchands et aux colons). Aenid Lamdan lui-même gère les relations avec l'occupant parce qu'il parle la langue et qu'il faut bien que quelqu'un s'y colle, c'est tout. Il ne faut d'ailleurs pas espérer mobiliser le reste des Emishen de Tal Endhil : ils sont persuadés que les Kormes ne leur feront pas de mal s'ils ne se mêlent pas des combats.

Quant à la mort du lieutenant Armeld, le forestier n'a qu'une chose à en dire : le type magouillait avec presque tout le monde et recevait toutes sortes de pots-de-vins. L'une de ses mauvaises fréquentations lui aura sans doute attiré des ennuis...

Ils en sont à peu près là lorsque le Hornois [qui a placé des pions en Vigilance] entend le bruit de fouet d'un arc qui se détend : Bahardabras se jette alors devant le capitaine [substituant sa mise de Défense et son bonus d'armure à ceux de son officier] et une longue flèche se plante dans les protections de son bras gauche, perçant le métal et le cuir presque jusqu'à la peau [Tir réussi mais Dommages exactement égaux à la Protection : c'est pas passé loin...].

Le Hornois repère alors l'archer sur un toit proche, peinturluré de noir, rouge et blanc à la manière caractéristique des Kormes, et donne l'alerte. Lorsque des mercenaires accourent, l'archer bondit prestement de toit en toit jusqu'aux remparts, saute jusqu'au sol (3m de haut) et disparaît dans la nuit.

Le capitaine a plongé avec le trappeur et s'est étalé dans la boue, maculant les vêtements qu'il tente -héroïquement- de maintenir propres malgré tout ce qui lui est arrivé depuis 10 jours (Réaction "Corriger sa tenue"). Durbaut se relève fou de rage : cette fois, c'en est trop. Les embuscades, les morts, les mensonges, les magouilles des uns et la mauvaise volonté des autres ont sérieusement porté sur ses nerfs fatigués et quelqu'un doit payer. [Le 'pitaine vient donc de péter sa Limite de Tension et déclenche sa Réaction "Fonceur" au maximum (5), c'est à dire au niveau "dangereux pour soi et pour les autres".] Il part en courant vers le rempart, grimpe l'échelle comme un possédé, saute du chemin de ronde n'importe comment (vlan : 3 points de Choc) et court sus à son agresseur, tout seul, dans la forêt, la nuit, alors que les Kormes rôdent partout autour du village...

Même Bahardabras, dont la première impulsion était de suivre son chef, réalise que c'est à peu près suicidaire. Après avoir arraché la flèche de son armure (constatant qu'elle est empoisonnée) et l'avoir jetée dédaigneusement, il se tourne alors vers les archers "venteux" en demandant des volontaires pour l'accompagner dehors. Aenid Lamdan est moins que motivé et ses collègues n'ont pas plus l'air de se décider, mais quatre Emishen en armes, deux hommes et deux femmes, s'approchent du Hornois et proposent leur aide. Celui-ci hésite sérieusement à accepter l'assistance de guerrières (il est carrément misogyne, même selon les critères patriarcaux de l'Empire), mais l'un des deux hommes, un grand blond barbu, souligne qu'il n'y a pas de temps à perdre s'il veut sauver son capitaine. Tous les 5 sortent alors du village et s'élancent sur la piste de Durbaut, Bahardabras marmonnant des imprécations dans sa langue...

Scène 6

Liméric Durgaut, dégrisé par la course nocturne dans la forêt glaciale, a soudain pris conscience de sa situation et lui aussi marmonne (que son marchand de père avait bien raison : il est trop impétueux pour faire un négociant).

L'assassin a disparu depuis un moment et, quoique sur ses gardes, le capitaine est surtout préoccupé de retrouver la direction du village... Mais lorsqu'il repère une ombre à l'autre bout de la clairière où il s'était arrêter pour reprendre son souffle, il plonge par réflexe (souillant à nouveau la houppelande qu'il venait de rajuster pour récupérer encore un peu de Tension) et évite de nouveau une flèche, qui se fiche dans un sapin à une coudée de sa tête.

Planqué derrière un tronc, il a le temps de remarquer l'étrangeté du projectile : très longue, avec une pointe effilée en acier brillant (malgré une espèce de vernis marron), c'est certainement du matériel fehnri... Une autre claque d'ailleurs dans les branches basses pendant qu'il progresse à croupetons l'épée à la main, cherchant à repérer le tireur.

Au bout de quelques instants, il le voit d'ailleurs s'avancer dans la clairière, le falcata à la main et réalise alors que, malgré le froid, c'est une femme torse-nu et au crâne rasée, couvertes de ses peintures de guerre. Vaguement émoustillé, il sort à découvert, prêt à combattre mais envisageant de négocier si possible, quand des bruits de course se rapprochent par le sud...

Scène 7

Malgré ses capacités athlétiques hors-normes, le Hornois a bien du mal à soutenir la cadence des emishen et commence à les trouver franchement "bizarres" : non seulement la jolie brune qui les guide semble capable de suivre la piste en courant dans le noir (!), mais les "venteux" ne font pratiquement pas de bruit et ont la fâcheuse tendance à disparaître dès qu'on les perd de vue une seconde. Il les rejoint enfin, haletant, lorsqu'ils font halte autour de l'éclaireuse qui, apparemment rien qu'en humant la brise, a repérer quelque chose :

«Ton capitaine est en danger, traduit le grand blond. Il faut se dépêcher.

_Parce qu'on trainait, là ?!

_Nous pouvons sauver ton chef, mais tu dois accepter que l'archer s'en aille librement.

_Hors de question : si je le vois, je le chope.

_Alors nous n'irons pas plus loin et ton ami mourra.

_Grrrrrrrrrmmbl...

_Il dit qu'il est d'accord.» traduit le grand blond à ses camarades.

Les emishen joignent alors leurs mains, murmurent tous ensemble dans leur langue et s'élance alors vers le nord à une vitesse complètement surnaturelle, qui laisse le Hornois loin derrière. «Sorcellerie...» grogne-t-il.

Déjà dans l'Empire, "la magie n'existe pas, d'ailleurs elle est interdite" et les prêtres du Culte des Pères (religion d'état) envoient de temps en temps un sorcier-hérétique au bûcher. Mais pour les Hornois, la sorcellerie est carrément la source de tous les maux sur terre, la chute de leur royaume sacré en premier lieu. La situation a donc tout pour lui déplaire..

Scène 8

Bien qu'ils aient loué une grange près de la porte sud dès leur arrivée, les cousins Pratesh en ont ressorti la roulotte et Totor-le-charriot-élévateur pour les amener presque discrètement là où le mur d'enceinte s'avance dans le lac. Vijnu, ses couteaux de jets consciencieusement enduit de poison, reste plus haut sur les pentes, où commence le quartier marchand fait de tentes et de petites bicoques temporaires, pour surveiller qu'on ne vienne pas interrompre cette livraison très spéciale dans l'ombre des huttes sur pilotis.

Il réalise d'ailleurs que c'est le principal point faible de l'enceinte de Tal Endhil : difficile à voir depuis la petite tour qui garde la porte sud comme de la moitié "terrestre" du village, envahi de joncs (gelés), donnant directement sur les campement des négociants et protégé du lac par les seules barges des Kerdans (qui sont encore en train de les installer, en commençant par le nord, la voie lacustre est donc libre pour encore un moment).

Avec seulement quelques petits bruits d'eau, deux longues pirogues émergent des joncs et de la brume qui couvrent le lac jusque entre les pilotis. Etayn est là avec cinq de ses guerriers, mais personne ne descend des embarcations. Les Pratesh, un peu inquiets, espèrent seulement que les Kormes ne tenteront rien contre eux pour ne pas mettre leur opération en péril (car si la garde ou les Kerdans s'en mêlent, tout le monde va avoir de gros ennuis).

Presque sans échanger un mot avec ses dangereux "clients", Adira commence à sortir de sa roulette des armes et des armures que Totor, peu gêné par l'eau froide, transporte au fur et à mesure jusqu'aux bateaux où les Kormes les entassent entrent les bancs étroits, confiant en échange des ballots de cuir cousu au géant, qui les dépose au retour près de la roulotte, où Adira en vérifie le contenu en se frottant les mains.

L'opération ne prend que quelques minutes et lorsque Vijnu, rongé de curiosité, s'approche pour jeter un œil aux précieux paquets, il les découvre remplis d'herbes-nuages, un puissant hallucinogène utilisé par les chamans emishen, mais qui se revendra pour une véritable fortune une fois introduit clandestinement dans l'Empire. Car le commerce de cette drogue y est en effet interdit sous peine de mort, les emishens eux-mêmes voyant d'un très mauvais œil cet usage de leurs plantes sacrées...

L'échange terminé, les pirogues repartent tout aussi silencieusement... suivis par le brave Totor, qui s'avance dans le lac en portant les sacs d'herbes ! « Mais, qu'est-ce tu fous, gros crétin, s'écrie Adira ?! Rapporte ça tout de suite, par la Grande Mère !» Mais le géant, de l'eau jusque à la taille, continue de suivre la pirogue à l'arrière de laquelle Etayn l'attire par de petits gestes d'invite... (Nevel leur avait pourtant signalé qu'on la dit capable de commander aux animaux.)

Entrant dans l'eau à son tour en l'appelant à pleins poumons [Jet de Dressage, augmenté de ses points de "Ressource : Géant Dressé"], le marchand parvient finalement à ramener la grosse bête jusqu'à la rive... mais ses cris ont attiré l'attention d'un "venteux" qui les observe depuis les abords de la grange. Lorsque des bateliers kerdans s'approchent à leur tour en empoignant leurs lourdes pagaies ferrées (les pales en sont bordées de lames, ce qui est aussi pratique pour ouvrir le chemin dans les marais que pour taillader des adversaires), croyant à une attaque des Kormes, les Fehnri font prestement disparaître la marchandise de contrebande et Adira improvise une histoire de géant malavisé ayant commencé à pousser la roulotte vers le lac quand on lui demandait de la ranger dans la grange. Les pauvres bêtes étant considérées comme d'une ânerie légendaire par la plupart des peuples qui ne les côtoient guère (les Emishen, eux, savent bien qu'ils ont juste de petits problèmes d'attention), l'explication semble satisfaire tout le monde... sauf le trappeur qui a été témoin de la transaction et que Vijnu aperçoit à quelques distances, en train de chuchoter à l'oreille d'Aenid Lamdan, qui jette alors à l'assassin un regard qui promets des emmerdes...

Scène 9

Quand les "venteux" en armes jaillissent de la forêt, ils découvrent le Capitaine Durbaut et la tueuse korme qui se tournent autour l'arme à la main, cherchant une ouverture. L'éclaireuse brune crie quelque chose que le capitaine, polyglotte, suppose être le prénom de la guerrière peinte ("Mona Ma'od", "Lune Voilée") et un ordre qu'on pourrait traduire par "Arrête ça tout de suite ou tu vas t'en mordre les doigts". Celle-ci s'écarte du capitaine avec mauvaise grâce, l'éclaireuse la prend par le bras et lui murmure quelques mots d'un ton sévère, après quoi "Lune Voilée" s'enfuit dans la nuit au moment où Bahardabras, presque à bout de souffle, déboule à son tour dans la clairière. Il va pour la poursuivre quand la brunette lui intime l'ordre de s'arrêter en vieux hornois, la surprise (ou une quelconque sorcellerie ?) suffisant à figer le mercenaire sur place.

« Mais... qu'est-ce que c'est que ce bordel ? demande le capitaine.

_Je suis Nasheda Liman, Alen Lemid des Elloran », lui réponds la jeune femme en guise d'explication. Ce que l'officier réman réussi à traduire comme "Maître(sse) d'Armes" des Éperviers-Pêcheurs (?), une espèce de rapaces commune dans la région qu'il suppose être le totem de la tribu du lac. « Je voulais vous parler en privé... avant que vous décidiez d'aller vous perdre en forêt.

_Heu oui bon... Pourquoi vous l'avez laisser partir, l'autre ? Vous avez pas remarqué qu'elle est dangereuse ?

_Très. Mais elle est déjà morte* et vouloir t'abattre n'est pas un crime assez grave pour que je lui prenne son âme.

_Pardon ?!

_Et comment se fait-il qu'elle parle hornois ? ajoute Bahardabras.

_J'en ai connu un. Il faut rentrer, maintenant : Mona Ma'od va bientôt revenir et elle ne sera pas seule, cette fois...»

Sur le chemin du retour, effectué au pas de gymnastique pendant que les trois guerriers "venteux" assure l'arrière-garde, Nasheda Liman ("celle qui part sans un mot") explique qu'elle est en charge de la "garde" des quelques 200 Elloran de Tal Endhil (les Emishen distingue les troupes "de défense", qui sont affectées aux communautés, des guerriers qui vont provoquer ceux des autres clans). Parmi ceux-là, près de 80 prendrait les armes si elle l'ordonnait, mais elle ne le fera qu'à deux conditions : d'abord si elle considère les siens comme menacés (ce qui est discutable, mais entre les 4 trappeurs tués en escortant les bûcherons et le fait qu'elle-même viennent de prendre la défense du capitaine, les relations entre les Elloran et les Défunts d'Etayn-la-Louve ne seront plus "diplomatiques" très longtemps), ensuite si elle prend effectivement le commandement de toutes les troupes du village (seul moyen de s'assurer que "Hamedhagad", apparemment les lois de la guerre emishen, soient respectées). Nashe' le consulterait certainement et il resterait en charge des combattants impériaux, mais il ne faut pas se leurrer : si Durbaut veut qu'elle engage ses guerriers dans la défense du village, il faut qu'il lui cède la direction des opérations.

Le capitaine explique d'entrée de jeu que s'il n'est personnellement pas contre le principe (dès lors que l'immense majorité des troupes de Tal Endhil serait des hommes à elle, pourquoi pas), mais il craint que faire accepter aux rémans de combattre avec des femmes soit déjà difficile et sait pertinemment que leur imposer une générale est impossible.

Ils conviennent donc tous deux, à la grande honte du Hornois, que les Elloran seront officiellement sous l'autorité du capitaine, mais qu'ils prépareront secrètement les stratégies ensemble en s'arrangeant pour que, le plus possible, les rémans soient employés "en attaque", pour des opérations hors du village.

La plus urgente devra d'ailleurs être lancée à l'aube, dès que les mercenaires seront reposées : les Kormes d'Etayn viennent de recevoir une importante livraison d'armes de la part de contrebandiers fehnri (d'où les flèches), qu'ils vont sans doute distribuer aux autres clans Kormes rassemblés en amont du lac. Dès que les armes auront été répartis, plusieurs centaines de guerriers fonderont sur Tal Endhil...

Scène 10

Pendant ce temps, au village, les rameurs Kerdans ont "fermement invité" Adira Pratesh sur l'une de leurs barges, où l'Érudit Ordano a deux mots à lui dire. En Effet, celui-ci voudrait engager les services particuliers de son cousin Vijnu...

« Aaaaaah mais... oui, pourquoi pas. Je dois vous prévenir que ce ne sera pas donné -les vrais spécialistes sont toujours chers- mais c'est tout à fait possible. Je n'aurais pas cru que vous êtiez du genre à employer un...

_Médecin.

_Oh ?! Oui, hem, un médecin, exactement.

_Car j'aurais besoin d'identifier le poison utilisé sur ceci, explique-t-il en sortant de son étroit bureau la pointe de la flèche jetée devant l'auberge par le Hornois. Je suppose que votre cousin s'y connaît en poisons, ajoute-t-il avec un air de parfaite innocence.

_Absolument, oui, comme tous les médecins fehnri. Et en paiement ?

_Nous verrons cela directement avec lui...»

Une fois la flèche en sa possession, Vijnu identifie aisément le "vernis marron" comme étant du venin de "darayah", une espèce d'araignée spécialement teigneuse des jungles de Fehn. Ce type de poison aurait sans doute tué le capitaine en quelques heures d'une agonie atroce, mais il est difficile à extraire et se conserve très mal. Pour être efficace, celui-ci n'a pas pu être préparé plus d'une demi-journée à l'avance : il y a donc dans les environs un empoisonneur fehnri plutôt doué, avec une araignée "darayah" vivante ! Vue les températures locales, Vijnu est d'ailleurs curieux de savoir comment fait son collègue...

En échange, lui-même voudrait un autre renseignement : d'où vient la poix qu'utilise les Kormes ? On l'oriente alors vers un alchimiste kerdan qui, quoique très occupé à préparer des mixtures bizarres (des teintures), lui explique que non il n'a rien vendu de tel à quiconque (merci pour la confiance) et que pour ce qu'il en sait, cela ressemble à une préparation pour le moins "artisanale" à base d'huile de naphte (principalement disponible auprès des marchands fehnri de Duriane, la plus proche grande ville -deux semaines de marche plus au sud- d'où les cousins Pratesh et le capitaine sont originaires) et d'une sorte de tourbe qu'on trouve en quantité dans les marais sur la rive nord du lac.

Scène 11

Revenu à l'auberge où son cousin leur a réservé une chambre (rien que pour eux deux : on nage dans le luxe), il tombe sur le capitaine, le Hornois et une jolie brune, penchés sur une carte incroyablement détaillée de la région (cadeau de l'Erudit Kerdan). Ils échangent leurs découvertes "les moins compromettantes" de la soirée et conviennent de partir une heure avant l'aurore pour surprendre les Kormes dans leur camp des marais (si les éclaireurs d'Aenid Lamdan ont dit vrai), avant qu'ils n'aient pu distribuer les armes fehnri au clan...

« Des Fenhri rémans qui vendent des armes aux rebelles ? Non ?! Alors ça c'est vraiment perfide...» conclue-t-il avec conviction.

Fin de la deuxième séquence, le Hornois, le Capitaine et l'Assassin gagnent un point d'Histoire pour leurs aventures respectives.

Séquence 3 : "La meilleure défense..."

Il fait encore nuit sur Tal Endhil que les trappeurs elloran et les bateliers kerdans sont déjà au travail : à la lueur des lanternes, ils clouent des branchages et des joncs sur trois longues barques kerdanes pour leur conférer un camouflage minimal. En plus des rameurs, 10 hommes peuvent monter dans chaque embarcation, et la Pilote Ranyella, qui surveille les travaux, prie les Premiers que cela suffise. Depuis les remparts où elle vérifiait une fois de plus les positions de ses guerriers, Nasheda Liman observe la forêt en demandant au Vent quand attaqueront les Défunts.

Scène 1

Juste avant l'aurore, le capitaine Liméric Durgaut a rassemblé son escadron sur la berge, devant les barques camouflées, et récapitule l'opération à ses hommes : le Hornois Bahardabras et l'éclaireur Nevel, Vijnu l'assassin fehnri, le sergent Boren et ses 6 derniers hommes, les 10 autres mercenaires rescapés de la caravane et une dizaine de trappeurs elloran (dont Aenid Lamdan) pour compléter les rangs de ce groupe d'assaut. Une fois l'armement vérifié, ils embarquent en silence dans les esquifs, qui quittent bientôt la berge pour s'enfoncer dans le brouillard qui monte du lac. Pagayant doucement, les bateaux suivent la rive nord jusqu'aux marécages où, d'après les éclaireurs, se trouvent le campement des Kormes.

Parvenus discrètement jusqu'à une bande de terre à peu près ferme, la première barque dépose le groupe de tête : pendant que leurs compagnons ont bandé leurs arcs pour les couvrir si nécessaire, Durgaut, Bahardabras, Nevel et Vijnu s'avancent alors avec d'infinies précautions, guettant un bruit suspect ou l'apparition de silhouettes humaines dans la brume.

C'est l'Emishen qui repère alors des pirogues cachées dans les roseaux et 5 hommes modérément vigilants dispersés sur et autour d'elles. L'assassin, qui compte les prendre à revers, se glisse entre les sentinelles, constatant qu'il n'y a vraiment que deux gardes qui fassent un peu attention (deux autres se restaurent et le dernier dort carrément dans une pirogue), transmet par gestes l'information à Nevel (qui la relaie aux autres) et se met en quête du fameux campement... en vain. Il ne peut quand-même pas y avoir que cinq types ? Les armes auraient-elles déjà été distribuées ? C'est en revenant vers les pirogues pour jeter un œil à leur contenu qu'on lui tapote soudain l'épaule.

Scène 2

Médusé, Vijnu découvre un petit fehnri rondouillard un pas derrière lui, qui murmure l'air vaguement contrarié : « Dis donc, p'tit gars, pourquoi tu viens me péter mon coup, là ?

_M... moi ?

_T'es le cousin de cet enfoiré de Pratesh, non ? Tu vois bien qu'il y a assez de demande pour deux fournisseurs, pourquoi tu t'en prends à la clientèle, comme ça ? J'suis Malvolio, au fait. » Reconnaissant le nom d'un contrebandier de Duriane, l'assassin serre la main qu'on lui tend, à la fois rassuré de croiser un "collègue" et inquiet qu'il puisse un jour signaler sa présence à leurs "amis communs".

Il tente de s'expliquer à voix basse : « On savait pas que vous étiez encore là, désolé. Mais, dis-moi, tu y tiens beaucoup à ces clients ?

_Ça se discute... Je te cache pas qu'ils payent souvent en nature et qu'après c'est tout un bordel pour en tirer de la bonne monnaie. Et puis là ils viennent de me laisser le quart de la commande sur les bras, alors bon...»

Une jeune fehnri émerge alors de la brume, salut brièvement l'assassin et chuchote à Malvolio : « Tonton, y a les mercenaires qui s'avancent vers les Kormes. On prévient les clients ou pas ?

_Attends Minha, on cause affaires, là. Dis-donc, cousin Pratesh, toi qu'es avec les impériaux : ils payent comment ?

_En pièces d'or.

_Oh. Et... ils achètent des flèches ? Des bonnes flèches fehnri, 'ttention, pas de la camelote. Parce que j'en ai trois boisseaux sur les bras, là : ce serait con de repartir avec.

_Magne-toi Tonton, y a leur Venteux et le grand cinglé d'airain qui vont faire un carton, là.

_Écoute, Malvolio, on est pressés, faisons simple : ton affaire avec les Kormes a tourné minable, moi je t'en amène une nouvelle, qu'est-ce que tu en dis ? Là, tout de suite ?

_Humm... Minha, dis aux garçons d'aider les impériaux à décaniller les Chauves : on change de clientèle.»

Alors, soudain, Bahardabras et Nevel qui étaient prêts à frapper et le capitaine qui faisait signe de débarquer au reste de son groupe voient jaillir de la brume plein de petits fehnri qui, sans prévenir, s'attaquent aux Kormes. Pour ne pas être en reste, les mercenaires se joignent à la curée et les 5 ennemis, surpris et en sous-nombre, sont rapidement massacrés.

Scène 3

Alors que le jour se lève à peine, teintant le brouillard d'une légère lueur, un courageux pigeon quitte Tal Endhil, porteur du message de Durbaut pour la forteresse de Bragone.

Rassemblés autour des pirogues, le Capitaine et son escadron négocie avec Malvolio et ses 7 compagnons (dont deux femmes), comprenant au passage que ce n'est certainement pas leur premier coup dans la région, bien qu'ils affirment candidement le contraire.

Durbaut n'a que faire de leurs flèches (il en reste des centaines alors que les fehnri ne proposent qu'une poignée d'arcs capables de les décocher), mais apprend ainsi que les Kormes sont maintenant en possession de plusieurs amphores d'huile de naphte (pour faire de la poix, évidemment), de lances, d'arcs et de flèches fehnri, ainsi que d'un stock d'armes et d'armures qui ne faisaient pas partie de la livraison de Malvolio et qu'Etayn a été chercher directement à Tal Endhil la veille au soir (elle les réserve à ses propres hommes, en charge de la première vague d'assaut contre le village).* Les Défunts ont emporté tout ça il y a quelques heures dans trois chariots surchargés, soit un de moins que prévu**, ce qui les a obligé à abandonner une partie de la livraison mais va surtout les ralentir sévèrement s'ils doivent rejoindre les rives du "lac supérieur" par des sentiers boueux...

«Et ces chariots, on peut encore les ratrapper ?

_On peut les pister à pied, intervient Nevel, mais je recommanderai pas d'aller se balader à 30 en plein territoire korme...

_Mais pourquoi ne pas livrer directement au Deuxième Lac ("And Endhil") avec vos pirogues ?

_A cause des rapides, mon gars : comme contrebandiers, on est super fortiches, mais on remonte pas encore les cascades avec des embarcations chargées, même avec ces petites merveilles. Note que vous êtes mignons quand-même, avec vos barques en buissons, là...

_(soupir) Et à vide, elles passeraient les rapides, vos merveilles ?

_Ben, à vide, c'est surtout qu'on peut les porter pour monter par les berges...

_Discrètement ?

_Dis-donc, mon gars, tu parles au type qui vient de ravitailler une armée sous le nez des Venteux, des Kerdans et de tous tes potes sensés surveiller la frontière. "Chez Malvolio, on livre tout n'importe où" !

_Et à n'importe qui, apparemment.

_Rhooo, faut bien vivre, hein. Mais qu'est-ce que vous voulez y faire, à ce lac ? Tu sais qu'y a des centaines de Chauves installés là-haut ?!

_Oui mais pas tous dans le même campement, si ?

_Heu...non, ils sont pas encore copains à ce point là. 'Sont un peu répartis sur les rives, quoi.

_Et le campement d'Etayn, il est où ? A quoi ça ressemble ?

_Attends, on va regarder la carte, j'en ai une vachement bien (et Malvolio produit en effet une carte luxueusement détaillée...).

_Laisse-moi deviner : tu l'as acheté aux kerdans ? (nouveau soupir)

_Soit pas rabat-joie, puisque ça t'es utile. Donc : ta Louve, elle campe là, sur la rive sud, sur une sorte de presqu’île qui s'avance dans les marais. 'Z'ont du s'installer y a déjà un moment, passqu'i'z'ont des huttes et tout... Forcément, y avait plus trop de place quand les autres sont arrivés, alors i'z'ont planté leurs tentes plutôt sur la rive nord, à peu près en face, dans la forêt.

_Parfait : on embarque une vingtaine de mes hommes dans vos 4 pirogues, et on y va tout de suite ! Je vous embauche tous les huit, tout de suite, et je paye en or impérial.(***)

_Houlà ! Tout doux mon gars ! Je fais pas dans l'assaut guerrier, moi !

_Exact, "mon gars" : ça c'est notre boulot. Toi, tu nous déposes discrètement sur la presqu'île et, nous, on annule leur "première vague" contre Tal Endhil... »

(*)le capitaine jette alors un regard noir au cousin Vijnu en lui promettant de tirer ça au clair une fois rentré. Étrangement, Aenid Lamdan ne saisi pas l'occasion de dénoncer les Pratesh, ce qui ne rassure qu'à moitié l'assassin...

(**)les Kormes manquent de presque tout ce que la forêt ne peut pas fournir, et Etayn espéraient que ses hommes puissent voler des chariots lors de l'attaque de la caravane. Mais ça ne s'est pas vraiment passé comme prévu et son lieutenant -dont l'objectif premier était d'empêcher le ravitaillement- a choisi l'option incendiaire...

(***)en l'occurrence, après une âpre négociation, 1 pièce d'or par jour pour l'ensemble de la bande. A ce tarif là, et vue la quantité de dettes impériales contractées dans tous les sens (dont la solde des mercenaires survivants), dans une semaine, les contrebandiers auront sécher le budget de notre pauvre capitaine. C'est dégueulasse mais sa seule chance de s'en tirer, c'est que d'autres mercenaires trépassent...

Scène 4

Le reste des troupes est sans doute déjà rentré au bercail et le brouillard commence à se disperser quand le petit commando atteint les rapides après une petite heure d'une navigation aussi rapide que discrète : les contrebandiers fehnri et leur longues barques tressées n'ont apparemment rien à envier aux bateliers kerdans.

Une fois débarqués le capitaine, Nevel, Vijnu, Bahardabras, Aenid Lamdan et ses meilleurs archers (dont une chasseuse nommée Maliam' Lepen, "Arc Chantant"), Vanned Rey ("Regarde-au-Loin", le grand blond barbu qui "traduisait" lors de l'escapade nocturne du capitaine), le sergent Boren et quelques fantassins qui ont fait leurs preuves (au premier rang desquels deux vrais durs à cuire : Cylien "Brûlé", un réman qui porte les cicatrices d'une méchante ordalie, et le Noiraud, un des rescapés de la caravane dont le teint mat indique des ascendances fehnri), Malvolio et sa bande s'arnachent deux à deux à leurs pirogues et commencent à gravir les pentes rocheuses qui encadrent le large torrent glacial reliant les deux lacs.

L'escalade n'est facile pour personne mais, en une petite demi-heure, les guerriers ré-embarquent et s'avancent dans les marécages du lac supérieur à longs coups de pagaies.


Malgré l'énervante insistance des passeurs à tenter de renégocier leurs gages à chaque embûche ("Houlà, y a des Kormes sur le lac, c'était pas dans le forfait, ça, mon gars... _Au prix que je paye, même les monstres marins sont dans le forfait !" ; "Oh dis-donc : des patrouilles qui s'approchent ! Il serait p't-être possible de les contourner si tu consentais un p'tit bonus... _Malvolio, t'es sans doute «fortiche» mais tu m'emmerdes.") , nos intrépides guerriers aperçoivent enfin une sorte de longue colline boisée dépassant de l'étendue des roseaux.

Nevel observe les pirogues kormes -qui ont l'air de tronc grossièrement taillés en comparaison des fines embarcations fehnri- et comprend que les chariots ont du arriver sur la rive nord, et que les hommes de la Louve sont en train de rapatrier leur nouveau matériel vers la presqu'île. Pour l'instant, au moins, ça les occupe...

Scène 5

Toujours à la faveur du brouillard, qui semble s'accrocher dans les marais alors qu'il s'est presque entièrement lever sur le lac voisin, le commando prend pied sur la péninsule où les éclaireurs distinguent vite des guetteurs, nettement plus nombreux et attentifs que les derniers qu'ils aient rencontrés.

« Malvolio, chuchote le capitaine, attendez-nous là et tenez-vous prêts à ramer, on revient tout de suite... »

[Tant que le commando reste bien groupé, on continue de le gérer comme une seule entité dont le score de discrétion est celui du moins doué de l'équipe augmenté d'un bonus pour le brouillard et le fait que les Kormes ne les attendent vraiment pas à cet endroit. Face aux "impériaux", les Défunts forment également un groupe unique et le premier assaut contre les sentinelles est résolu en quelques jets à trois paramètres : Attaque (+surprise), Défense et Discrétion. Ce dernier aspect foire un peu, mais un autre point d'Histoire du capitaine suffit à corriger le ratage... il faut dire qu'entre son niveau "Héros" et sa "Vocation", il en a nettement plus que tout le monde.]

Les sentinelles efficacement et discrètement nettoyées une par une, la troupe progresse parmi les sapins, gravissant la pente jusqu'à une éclaircie dans les bois. Entendant alors des voix, tout le monde s'arrête, à couvert derrières les arbres : assis sur des troncs au pied d'un grand pin planté presque au sommet de la colline, dans une zone largement dégagée, deux hommes et une femme sont en grande discussion autour d'un petit feu de camp, à l'écart des longues cabanes dont ont aperçoit les toits de branchages, sur l'autre versant de la butte.

Bien qu'elle soit à une centaine de pas et que seul Vijnu l'ait jamais rencontrée de près, le comportement du trio ne laisse guère de doute : c'est bien Etayn-la-Louve qui discute avec deux de ses lieutenants, en traçant des schémas dans la terre froide. L'un des deux hommes est d'ailleurs une grande gigue d'archer que Nevel croit reconnaître comme le type qui dirigeait l'embuscade contre la caravane. Tous trois portent des armures de cuir et de fer, une poignée de guerriers se tiennent en sentinelles à distance respectueuse de leurs chefs et au moins une trentaine d'autres s'activent du côté des huttes, autour des pirogues d'où l'on décharge des vivres et des armes. Pour couronner le tout, les mercenaires repèrent une haute silhouette assise dans les bois à quelques distance : un géant ! Beaucoup plus massif que ce brave Totor, l'énorme primate est surtout d'une robe différente qui indique clairement son origine sauvage. Si la cheffe korme peut le diriger comme elle l'a fait de son cousin domestique, elle possède là une bête capable d'abattre les portes de Tal Endhil en quelques instants...

Il y a pas mal de mouvement sur les flancs de la colline, le grand singe commence à donner des signes d'agitation et le commando doit se décider à agir, avant de se faire repérer par le premier type qui aura envie de pisser ou la relève des guetteurs. Vijnu enduit donc consciencieusement de poison une des flèches de Nevel, qui devra ensuite se rapprocher du trio jusqu'à une distance de tir raisonnable. Dès qu'il aura tiré, le reste des fantassins fondera sur les sentinelles pour donner à l'archer le temps de se replier, abattant les lieutenants si c'est possible, pendant que les archers tenteront d'abattre le géant.

L'éclaireur progresse donc en rampant sur le tapis d'aiguilles de pin et, arrivé au dernier couvert, à peut-être une 50 aine de mètres de sa cible, se redresse sur un genou pour viser soigneusement... La conversation s'arrête soudain, Etayn tourne d'un seul coup les yeux vers lui et l'archer lâche son trait, qui lui transperce la gorge, un pouce au dessus du col renforcé. [Malgré la distance, Kobal -qui joue Nevel depuis le début de la séquence- a placé 6 pions en Localisation mais n'a rien gardé en Discrétion (d'où le repérage automatique de la Louve, qui a toujours quelques pions en Vigilance). Les dés lui offrent une Marge de Réussite assez moyenne, mais augmentée de 6, elle atteint un "Point Vital" qui double les dommages et suffisent à causer une Blessure "critique" : c'est plus vraiment la peine de compter le poison...]

Alors que leur cheffe s'écroule en s'étouffant sur un flot de sang, les deux lieutenants bondissent : si celui qui a pris le temps de donner l'alerte récolte une flèche dans la cuisse [dès qu'il doit encocher et tirer dans le même tour, Nevel y laisse presque la moitié de sa Mise de tir], l'autre se jette derrière le grand pin. Le géant pousse un rugissement qui résonne dans toute la vallée et déboule en couchant les arbres sur son passage, mais les archers d'Aenid Lamdan sont prêts et la course du monstre est stoppée par une volée de flèches. La charge des fantassins percute les sentinelles, en abattant la plupart, et une seconde volée de flèches blesse très sérieusement le géant qui s'écroule en mugissant.

[Un groupe Ech*2 -toujours géré par le joueur dont le perso donne les ordres à l'unité- vient de bousiller un monstre Ech*2 en deux Tours : faut pas faire chier le "commando Durgaut" !]

Mais une grande clameur monte alors du côté des huttes et des dizaines d'hommes-peint gravissent bientôt la colline au pas de charge : il est temps de déguerpir !

Scène 6

Dévalant la pente en courant à perdre haleine, le commando rejoint la berge et saute dans les pirogues que les contrebandiers ont déjà mises à l'eau, une horde de Kormes fous de rage à ses trousses. « Dîtes-donc, en cas de poursuite, y a un p'tit supplé..

_RAAAAAAAAAAAAAME, PUTAIN !!! »

A longs coups de pagaies, les fehnri s'extraient vite des roseaux pour gagner les eaux libres du lac, des flèches et des javelots frappant l'eau dans leur sillage. Mais une trompe retenti, propageant l'alerte à tous les clans. Déjà, les guerriers de la Louve ont mis leur propres embarcations à flots et la poursuite s'engage.

[Encore une fois, un seul joueur va jeter les dés pour tout le groupe. Les rameurs fehnri commencent le Duel avec une Mise de 8, 2 pions de Bonus pour la qualité de leurs pirogues et encore autant comme Avance sur les Kormes qui, nettement plus nombreux à ramer mais dans des barques grossières, commencent à 10. L'attaque représente la vitesse, la défense sert à éviter les éventuels obstacles du parcours et on a bien sûr le droit de Manœuvrer, en Attaque pour jouer sur les trajectoires ou en Défense pour entraîner les poursuivants sur un terrain dangereux, il y a parfois des Positions à conquérir... mais un lac offre nettement moins d'options tactique et les joueurs se content au départ de tout mettre en Attaque. Si l'Avance arrive à 0, tout le monde sera au contact et un Combat s'engagera en parallèle de la Poursuite, qui prend fin lorsque la Mise des poursuivis atteint 0 (rattrapés et stoppés) ou que l'Avance dépasse un certains score (les poursuivants se font semer)...]

Partout sur les berges, des cornes font écho à la première et des Kormes mettent à l'eau des embarcations. Les contrebandiers pagayent furieusement et prennent encore un peu d'avance avant que les Défunts aient atteint leur vitesse de pointe [les PJ ont trois pions d'Avance à la fin du premier Tour]. Les voilà déjà à la limite du lac et, le courant aidant, les esquifs s'engagent à toute allure sur la rivière [égalité au second Tour, mais tout le monde gagne un point de Vitesse]... qui commence à faire entendre un sourd grondement, un peu en aval.

« Malvolio ?!? La cascade ! Comment on va faire pour la cascade ??

_Ça mon gars, d'habitude on essaye d'y penser avant !!»

Quand la rivière devient torrent, les contrebandiers ralentissent et négocient prudemment les premiers rapides [4 pions en Vitesse, tout le reste en Défense, ce qui suffit à éviter un obstacle à 10], contrairement aux Kormes qui foncent et gagnent du terrain, quitte à ce qu'une des pirogues heurtent les rochers [l'Avance tombe à 1 pion mais Défense ratée...].

Le courant s'accélère et les rochers se multiplient, mais les fehnri préfèrent risquer la noyade que d'être rattrapés et recommencent à ramer fiévreusement [Attaque 6, Défense 5... sauf que cette fois l'obstacle est à 14] : c'est plus de la navigation, c'est carrément du rafting ! Les pirogues tanguent, cognent et ricochent, nos héros sont sérieusement secoués et le Noiraud tombe d'ailleurs à l'eau en arrivant au bas de la cascade [3 points de Dommages réduisent nettement leur Mise, mais la structure souple des pirogue fehnri compte comme une Protection de 2pts pour les passagers... j'aurais d'ailleurs pu demander un jet de réflexes à tout le monde pour voir qui chavirait, mais je n'y pas pensé sur l'instant].

Les barques kormes, plus longues, plus rigides et plus lourdes tombent par contre plus qu'elles ne descendent le courant, et plusieurs se fracassent dans les rapides, jetant les hommes peints dans le torrent furieux où ils rebondissent sur les pierres.

Le Noiraud est repêché en urgence [petit jet en marge du Duel, mais qui aurait coûté la vie au mercenaire et des points de Mise à l'équipe s'il avait raté] et les contrebandiers repartent de plus belle et prennent rapidement du champ une fois dans les eaux plus calmes du vaste lac inférieur [tout en Attaque pour tout le monde, mais les rapides ont coûté cher à la Mise des poursuivants et les PJ montent leur Avance à 4 pions].

Les Défunts s'acharnent encore un moment mais les fehnri s'éloignent toujours plus et, alors que les toits de Tal Endhil commencent à se détacher sous le soleil d'hiver, les Kormes abandonnent finalement la poursuite... à la grande joie des personnages principaux ! [Attaque à fond pour tout le monde, mais l'Avance ayant dépassé 6, la limite que je mets habituellement pour éviter que ça dure des plombes, j'ai considéré que les joueurs crevés -il était plus de 5h du mat'- avaient bien mérité leur victoire]

« Fiouuuuuuuu... Tu peux dire ce que tu veux mon gars, si ça doit être comme ça tous les jours, on va causer sérieusement de la prime de risque ! »

Malgré l'échec de sa mission initiale, une grosse trouille dans les rapides et un plan d'attaque franchement hasardeux, le commando s'en est tiré avec quelques blessures légères et rentre au village avec 8 nouveaux alliés potentiels après avoir éliminé Etayn-la-Louve, son principal "engin de siège" et, espèrent-ils, gagnés quelques précieux jours avant le premier assaut...

Fin de la séquence et de l'Épisode, tous les PJ gagnent 2pH pour l'opération commando, le recrutement et les révélations des contrebandiers, plus 1pH pour Nevel qui a fort bien géré le tir décisif.



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